| Ambiance musicale |
Poisoned with love - Neon Hitch

La rumeur court. L'amour ne s'achète pas, dit-on. L'écho enfle tellement que pour une grande majorité des gens, c'est devenu une certitude, une vérité inébranlable. C'est faux. Le bonheur, l'affection, le sexe, absolument tout s'achète et se vend au plus offrant. Azaléa en sait quelque chose puisqu'une grande partie de sa fortune s'est construite là-dessus. L'amour en bouteille, la promesse d'un avenir radieux, le doux parfum de l'extase. Les gens sont prêt à tout pour effleurer du doigt l'image même du bonheur. Elle l'a compris et se sert de ces âmes putrides sans le moindre remord.

La nuit menace tout juste de tomber, laissant entrevoir une lune aussi ronde que resplendissante. Pleine et à découvert, elle inonde la voûte céleste de ses rayons d'argent, apportant son lot de mystères et de cadavres. La nuit du loup-garou. Un frémissement d'excitation secoue la carcasse de la traqueuse alors même qu'elle pénètre l'intérieur du Devil's tail. Une fois cette affaire réglée, elle pourra alors s'élancer au cœur de la foret, arme aux poings. L'impatience commence déjà à ronger son estomac.

Quelques piliers de bar sont déjà agglutinés au comptoir et à observer la manière dont ils sont avachis, ils ont le cul visés sur leur chaise depuis déjà longtemps. Azaléa balaie ensuite la salle d'un rapide coup d’œil et constate avec bonheur que son client n'est toujours pas arrivé sur les lieux. Tant mieux. Elle chemine jusqu'au comptoir, la démarche assurée et féline. Lorsqu'elle s'installe sur le tabouret, elle retire sa veste en cuir et remarque avec amusement les yeux globuleux de l'ivrogne à côté d'elle. Sans retenu, il lorgne sur son décolleté mais en soit, ça ne la dérange pas. Elle a déjà une réponse toute trouvée à ce manque de tact flagrant.

Sourire enjôleur en coin des lippes, la chasseuse lorgne l'ivrogne en question et son camarade de beuverie. Ils y voient un signe encourageant, l'interpelle mais Azaléa ne répond pas. Elle se concentre sur eux, sur l'amour naissant entre ces deux hommes. Elle les imagine, main dans la main, à se louvoyer du regard au fond d'une ruelle. Au creux de ses intestins, une boule de chaleur irradie. Elle grossit, se déploie et pour finir s'extirpe de son corps pour se diviser et se loger dans la carcasse des deux hommes.

Aussitôt, les deux soûlards se détournent d'elle. Ils se sourient, rougissent, se lancent dans des balbutiements. Pour le plus grand bonheur de la traqueuse, elle n'existe plus à leurs yeux. Azaléa extirpe alors un billet de son décolleté et appelle la barmaid la plus proche.

— Une bière, s'il te plaît.

@Phoebe Parker. Ainsi s'appelle la petite brune qu'elle vient à l'instant d'interpeller. Il y'a encore quelques jours, elle ne connaissait que son prénom, pour l'avoir entendu ici et là, lors de ses soirées au Devil's Tail mais jamais elle n'avait pris le temps de s'y intéresser. Elles ne sont jamais rien d'autres que des visages que l'on croise. Des anonymes perdu au milieu d'une foule d'anonymes. Ce soir, le hasard répondant au nom de @Caleb Lynch aligne les étoiles et contraint le monde de ses deux femmes à se heurter.

Caleb, Azaléa & Phoebe

« Do what I do : hold tight, and pretend it's a plan. » Doctor Who

Ladies and gents, this is the moment you've waited for
Been searching in the dark, your sweat soaking through the floor
And buried in your bones there's an ache that you can't ignore
Taking your breath, stealing your mind
And all that was real is left behind...
Nous revoici nous revoilà au Devil's. Tremblez, pauvres carcasses alcoolisées, je n'aurai aucune pitié pour vous !
La soirée avait commencée sur les chapeaux de roue avec un client agressif, insistant et particulièrement obscène. Soyez fiers de moi, j'ai tenu dix minutes avant de le fracasser contre le marbre du bar ! Décidant d'en faire l'exemple, je l'ai accroché au mur par le col à l'aide d'un couteau, pieds ballants de quelques centimètres au dessus du sol, le pif en sang, dans les vapes.
-Avis aux amateurs : si vous ne vous montrez pas respectueux, polis et patients, vous finirai comme lui. A bon entendeur...
La soirée c'était, de fait, déroulée presque tranquillement. Les quelques inconscients qui avaient voulu jouer au funambule avec mes nerfs se sont retrouvé soit avec de l'ipéca, une plante causant nausées et vomissements, ou ont fait la connaissance de ma fidèle poubelle. Quant aux autres, ils se sont soit enfuis, soit se sont montré à la limite du correct. Ce qui serait presque respectable, dans leur cas.
Malgré cela, je me retrouvais avec le même public que d'habitude : une bande d'alcoolisés pathétique ; Gerry et son nez dans son verre d'alcool ( il a, depuis le temps, développé inconsciemment une capacité à l'apnée que pourraient lui envier les nageurs professionnels ) ; une brebis égarée somewhere over the rainbow à l'extrême coin du bar, qui se sent probablement plus protégée par le fait de pouvoir, potentiellement, se réfugier derrière le bar ou ne pas se retrouvée coincée entre deux malpropres si la malchance la poursuivait.
Et, rayon de soleil parmi cette vision quelque peu désespérante, une jeune femme brune qui, sans peur, s'approche du bar et s'y installe, s'attirant immédiatement les regards affamés de ces cradingues qui veulent toujours ce qu'ils ne pourront jamais avoir. La jeune femme avait beau dégager l'assurance de celle qui a déjà eu affaire à ce genre de situation et sait exactement comme la gérée, je gardais un oeil sur elle au cas où il faudrait intervenir. Enfilant un gant en latex, j'agrippais la tignasse de Gerry pour enfin lui retirer le nez de son verre, et le laissait retomber mollement à côté de la table.
-Unhdgfbgbzpjhggbnkdqko... marmonna-t-il en désignant son verre du doigt.
Mouais. Et bah c'est pas gagné.
Je m'affairais à resservir quelques clients, à relaver quelques verres, surveillant toujours du coin de l'oeil la jeune femme. Se produisit alors une chose étrange et écoeurante : les deux poivrots qui la reluquaient avec cet air d'araignée devant son dîner, se mirent à se regarder l'un l'autre, rougissants, balbutiant ( probablement le trop plein d'alcool ), ne semblant pas savoir où et comment se toucher, avant de finalement se jeter l'un sur l'autre pour s'embrasser.
Je crois que je vais vomir.
Mon problème n'étant pas de voir deux hommes s'embrasser ( habituellement je trouve même ça plutôt mignon ), mais plutôt de voir ces deux là le faire. Fétide et Putride, Crasseux et Affreux, mélangeant leurs fluides. Désolée mais ça, là, ça a de quoi dégoûter n'importe qui. J'ai besoin d'un remontant.
Deux gouttes d'huile essentielle de menthe poivrée sous la langue plus tard, la belle brune m'interpella.
-Une bière, s'il te plaît.
Au même moment se réveilla Obscène, qui commença à s'agiter dans tous les sens.
-Qu'est-ce que... ? A l'aide ! Pourquoi je suis... TOI ! rugit-il en posant enfin son regard sur moi. Fais moi descendre de là tout de suite espèce de pute, tu vas voir, je vais te faire ta fête...
-Permettez deux minutes ? lançais-je à ma cliente. Question qui n'attendait réellement pas de réponse, Obscène allait finir par réussir à se décrocher à s'agiter comme ça ! Attrapant une poêle à frire, je la lui aplatis sans ménagement en pleine figure, le renvoyant derechef sombrer dans l'inconscience.
-Je rappelle à notre aimable clientèle que tout comportement irrespectueux se verra attribué le même sort. Le Devil's Tail vous souhaite une bonne soirée !
Reposant ma dévouée poêle répondant au doux nom de Raiponce ( comment pourrait-il en être autrement ? ), j'allais enfin servir sa bière à ma cliente.
-Navrée pour l'attente, lançais-je en souriant.

fiche by disturbed

Aujourd'hui, c'est le grand jour. Le jour où Phoebe fucking Parker va tomber amoureuse de lui, pour la seconde fois. Et non pas grâce à son charme naturel — auquel elle semble désespérément imperméable depuis qu'il a frappé à sa porte bercé d'illusions —, mais grâce à une solution un poil moins ... conventionnelle. Une solution toute en courbes et cuir du nom d'Azaléa Chase. La sulfureuse brunette sera, à un prix probablement trop coûteux pour qu'il n'aille pas le subtiliser au labeur d'autrui, son cupidon de la soirée. La seule qui pourrait provoquer l'amour, si l'on en croit ces mysticismes roublards qu'il tend généralement à ignorer mais qui, sous l'impulsion de ses terribles impatiences, lui sont apparus comme la meilleure idée du siècle. Au pire, qu'est-ce qu'il risque, hein ? La décapitation ? L'éventration ? L'écartèlement ? Avec Phoebe, rien n'est impossible. Cette foldingue est bien capable d'énumérer des moyens de torture pour s'endormir, à tel point qu'il se demande quel démon a bien pu la posséder lors de leurs années passées séparés. Parce que clairement, entre la Phoebe qu'il a connu, et celle qu'il doit désormais affronter, subsiste un océan de dissemblances qu'il n'explique pas. Sauf par l'existence d'un démon bouffeur d'âmes. I mean, what else ?

Poussant les portes du Devil's Tail où son rendez-vous avec Azaléa était convenu, Caleb entre triomphant déjà, s'imaginant Phoebe enfin tomber dans ses bras en excusant avec moult effusions son comportement castrateur. Parce que ces excuses, il les mérite ! Après avoir enduré son impolitesse, ses insultes, son agressivité, ses coups et son ingratitude, c'est bien le moins qu'elle puisse faire, outre lui concéder son joli manoir. Jetant un regard circulaire sur la plèbe d'habitués qui parsème le bar, il la repère aussitôt. Difficile de la rater, de toute façon. Azaléa est une putain de panthère noire qui a passé sous le fil de son croc prédateur pléiade de cœurs et d'égos, il n'en doute pas. Sa prestance est indéniable et lui-même n'aurait pas hésité à tenter sa chance, fusse t-il l'esprit libéré de ses rêveries matérielles. Ses mirettes cristallines, moins pétries de décence, s'attardent avec imprudence sur la silhouette féline de la brunette, y savourant rapidement les sensuelles cambrures. Daaaamn, she's hot. « mademoiselle chase. » qu'il la salue ironiquement, s'installant à ses côtés alors que Phoebe lui tend justement une bière après avoir fracassé un alcoolique du dimanche avec toute la douceur de son caractère. Signe du destin pour lui dire de tourner les talons avant de subir le même sort ? Probablement. Est-il assez sensé pour le faire ? Probablement pas. « une bière pour moi aussi. à moi que tu ne fracasses toute ta clientèle masculine à coup de poêle à frire ? niveau expérience client, c'est pas ouf » ouais, parce qu'en demandant, Caleb ressent quand même les probabilités monter que s'il reçoit sa bière, ce sera probablement pour se la prendre dans la gueule. Aussi, il se penche vers Azaléa, murmurant assez bas pour que ses palabres échappent à la tigresse surexcitée qui s'entête à détruire ses congénères mâles avec la violence d'un bulldozer : « j'espère que tu sais faire des miracles, parce que sans ça, je finirais sans doute comme ce brave gentleman ». Il lui désigne l'imbécile accroché au mur, pris de la certitude que sa punition à lui sera probablement dix fois pire.

Et encore, dix fois, c'est optimiste.