JANVIER 1830, ELVENDYR.

Douce valse. Océan de souffrance. Je me retrouvais là. Face à ce chaos total. Tout le monde était déchainé. Le sang coulait, on pouvait entendre les gens hurler, mais également cette vibrante musique Rock parcourir mes tympans. J’étais là, du haut de mon siège, une main posée sur ma dernière victime. Cette femme, une envoutante native qui désirait de plus en plus de jeunesse en échange de l’énergie de son compagnon. Idiote, naïve… Je n’avais aucune pitié pour eux. Ils me permettaient de survivre, de gagner en force. Après cela, que je respecte mes pactes ou pas, ça ne m’importe point. Mes doigts glissèrent le long du délectable cou de ma victime, posant ma langue sur sa nuque pour agripper son oreille de mes dents. Je lui souffle à l’oreille quelques mots. « C’est la fin. » Et mes ongles s’enfoncèrent dans sa chair, aspirant le peu de vie qui restait en elle. Je ressentais sa peau se durcir sous mes ongles pour devenir si fripée que je ne réussissais même plus à avoir une poigne assez solide. Ses pupilles s’enfoncèrent, laissant un cadavre desséché derrière que je laisse tomber près des autres. Je me craque ainsi les doigts, fixant mes dissipes à mes pieds. Je les voyais danser, drogués jusqu’aux bouts des doigts. J’aurais pu feindre un sourire, mais en vain. « J’ai soif. Débarrassez-moi de cette vieille desséchée…. » Je me lève et m’impose face à la table des breuvages. J’exige d’un claquement de doigt un verre d’un sang délectable. Je n’étais pas vampire – mais j’avais toujours adoré ce liquide. Une dose de bourbon et j’allais pouvoir m’abreuver en paix. Mon regard avide se reposait sur ses demoiselles presque nues qui se déhanchaient devant moi. C’était excitant, délectable. Je savais que la guerre de Tharek faisait rage à travers Elvendyr, mais ça ne m’empêchait pas de relaxer encore, de profiter de ce moment de détente et de paix absolu. Que le sang coule, je m’en fichais. Rien ne m’importait vraiment. Amara allait diriger ce monde et je serais là pour elle jusqu’à la fin.

When light breaks.

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JANVIER 1830, EMERALD KINGDOM,
Quelques heures avant le pacte avec ce diable.

Éclatent les poudrières et les plus funestes embarquements. Que s’étiolent dans l’air, ces âmes fêlées et poussières. Des pantins disloqués et déliés de ces vibrantes ficelles qui autrefois les gardaient en selle. Notre monde devient encensoir. Le parfum de son horrible pestilence, la puanteur de l’horreur et des souffrances, mouchetant l’atmosphère de ces infusions de guerre et de calvaire. Des carnes livides, sanguinolentes, enveloppent comme un suaire les cadavres qui retombent sur nos terres meurtrières par millier, abandonnés à l’indifférence et l’hérésie de ce temps apocalyptique, alors que nous humons sans désaveu l’abondance de ces lambeaux de chairs pourrissantes et purulentes.

Des cris. Des pleurs. Des poings élevés, pour de vains coups portés sur des êtres hybrides qui se complaisent entre Ombre et Lumière. Ces cavaliers de l’horreur et la discorde. Avatars quasi oniriques, qui soulèvent au travers de leurs sillages, les veloutes pernicieuses qui sèment la mort et les remords. La rue principale de notre royaume n’est que le prolongement de l’ombre de la vallée des morts, épicentre d’une catastrophe torrentueuse qui ravive le feu et les flammes.

Coincé entre deux oriflammes, comme tous les autres malheureux qui refusent l’infâme, nous luttons contre ces choses qui s’attaquent à tous les corps et hurlons nos vies en plein essor démoniaque. Les jointures écorchées, pour avoir cognés et mordues trop de chairs inhumaines, les muscles endolories de guerre et d’infatigables combats, au sein d’une émeute que nous ne gagnerons pas, je laisse retomber un énième révolté voulant m’envelopper de sa folie,  alors que mes sentinelles de givres recherchent désespérément le visage de ma mère.

Dans cette spirale infernale, coincé dans la débandade, nos mains entrelacées se sont quittées et nos regards confondus se sont perdus.

- Maman ! MAMAN !

Ma voix se perd dans le chaos ambiant, enterrée sous les échos mortifères et d’enfer. Mais dans le tumulte, entre deux clignements d’yeux effarés, je la retrouve… larmoyante mutilée qui survie au combat, essaie sans grand espoir de calmer l’hémorragie de ses paumes poisseuses plaquées au niveau de son abdomen troué alors qu’une à une les ficelles l’abandonnent et qu’elle s’écroule sur ce plancher dissident.

- Sa—salem…

ONYX KINGDOM, ELVENDYR.
À l’instant présent.

L’antre de la dépravation et de l’anarchie nous embaume les carnes de ces arômes perfides et nauséabondes. Un parfum asphyxiant qui d’instinct nous donne envie de gerber alors que mes pas foulent lestement ce sol de dépravés. Le corps agonisant de ma mère, ainsi creux retombé dans mes bras, le calme de son trépas me tourmente et me chagrine. Me chagrine à un point où les murs émotionnels se sont érigés autour de moi comme une forteresse, isolé en la pénombre de ce confinement, je suis sourds... aveugle… déconnecté de tout. Absolument tout.

- WOLFRAM !    

J’ai perdu mon cœur et ma bonne raison en chemin. J’suis dangereusement culoté. Je le sais. Mais j’en ai strictement rien à battre !

- Wolfram ! Par les forces de ta disgrâce, de tes infâmes, j’invoque ta présence et t’ordonne de te présenter le bout des cornes ici afin d’exhausser mon but désiré !

Le calme de son trépas me tourmente et me plonge en pleine hérésie...

JANVIER 1830, ELVENDYR.

Sous les rouages de cette musique démoniaque se dissimulait certains individus qui ne venaient pas pour faire la fête, ni pour se nourrir – encore moins pour mourir. Il y avait une masse de population grandissante autour de moi et je n’arrivais plus à reconnaître chacun d’entres eux. Leur identité, voir leur humanité ne m’importaient si peu que je ne les nommais que très rarement par leur prénom. Chose, démon, créature, c’était des termes que j’usais dans la coutume depuis. Face à cet homme qui se fraya un chemin jusqu’à mon « trône » - si on pouvait appeler ça ainsi – je restais de marbre. Je ne comprenais pas les raisons de sa venue. Je voyais qu’il tenait dans ses bras le corps d’une femme, sauf que je ne comprenais pas dans quel but. « Toi. » Dis-je d’un soufflement froid. Je me lève malgré tout. On m’avait désigné et on exigeait ma présence. Je pose ma coupe en force de crâne humain dans la main de mon fidèle pour me diriger à ses côtés. Je lui fais face, mon regard avide ne cligne pas. Mes pupilles restent rondes. Je ne dévie pas son regard et lui répond d’une voix austère. « Pour qui te prends-tu pour m’imposer tes lois, infecte spécimen. » Je me tenais droit comme une barre et attendait une réaction de sa part. Je ressentais la détresse dans sa voix, sauf que ça ne me touchait pas du tout. Qu’allait-il exiger. Je savais qu’il espérait quelque chose de moi… malheureusement, rien ne se faisait gratuitement avec moi… J’exigerais quelque chose en retour… bien que mes paroles ne valaient … rien.

When light breaks.

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JANVIER 1830, ONYX KINGDOM.

À la douceur de ces éphémères moires maternelles, je viens déposer sur le sol le cadavre de celle qui m’a mise au monde, ma disgracieuse main de bête se démoulant doucement de sa nuque, pour laisser reposer et se poser son crâne alourdi contre le marbre froid du parterre. La voix auguste et noble de celui que je suis venu chercher se fait enfin entendre au cœur de ces bruissements de damnés. D’une main appuyée sur le sol hostile, je redresse l’échine et contemple de mes sentinelles de givres ce visage démoniquement austère qui me jauge comme si je n’étais que de la vulgaire vermine.

- C’est par le fruit de ces infectes spécimens, que votre Legendre perdure et grandie au sein de notre royaume, Wolfram. Sans nous, vous ne serez rien ! que j’exalte, plein de rancœur, le regard fou, braqué sur lui, alors que j’embrasse d’un ample geste de main les périphéries de la salle.

Le démon a raison. Mon arrogance n’est pas la bienvenue en ces lieux dévastés par la dépravation. Devant cet empereur des damnés, je ne vaux absolument rien, je dois faire attention, mais hélas mes larmes et ma peine masquent ainsi tout  bon jugement. Alors je m’égare sur les fils rasoirs d’une fausse assurance et leurs indicibles dissidences. Mes somnambules viennent un instant à contempler cette flopée d’âmes fêlées qui lui sert de sbires, ne pouvant alléger le fardeau qui m’afflige alors que d’une voix cassante j’ajoute :

- Je me prends pour l’un de ces innombrables agents du Chaos, que le royaume de l’Onyx a lui-même répendu sur les terres dévastées d’Elvendyr. Ma mère, femme qui présentement gît à votre lustre, démon, ne s’avère être que dommage collatérale à vos effroyables idées de grandeurs.

Crâneur, yeux gorgés de larmes salines, je me rapproche d’un pas.

- Ma vie en échange de la sienne ! Accordez-lui, démon, la jeunesse éternelle. Sauvez-la, en échange de quoi, je vous promets mon total asservissement !

Mon audace me tuera. Je le sais…

JANVIER 1830, ELVENDYR.

Je restais là, figé devant lui et droit comme une barre de fer. Mes pupilles avides de sentiments à son égard ne s’arrêtaient même pas pour cligner. Un silence de ma part dura quelques instants. Je finis par baisser le regard vers le corps inertes de la mère de ce dernier. Il semblait avoir entendu parler de moi à travers Elvendyr et je prenais cet acte pour une flatterie. D’un sens, c’était touchant de savoir qu’on entendait parler de ma grandeur à travers le monde. J’aurais pu sourire à cette idée, mais ça ne me ressemblait pas. Je restais de marbre. Mes yeux l’analysaient encore quelques secondes avant de répondre, penchant la tête vers ma gauche, tel un robot sans émotion. « Je ne peux rien faire pour ce corps desséché. Elle est morte, sa coquille ne lui sert à rien. » Je fis un pas vers l’arrière, comme pour démontrer que je ne ferais rien pour lui venir en aide. Il était là à me supplier. À s’offrir à moi, sa vie ou son contrôle. C’était amusant à voir. Voulais-je vraiment de se larbin ? En réalité, oui. Je reniflais à des kilomètres à la ronde qu’il s’avérait être un lycans. Je voulais contrôler ce peuple. Je pose mon attention à nouveau sur lui. « Je peux cependant lui offrir une nouvelle vie, un nouveau corps. Beaucoup plus jeune, beaucoup plus … ferme. » Continuais-je mécaniquement. « Et pour ce faire, tu acceptes d’être mon fidèle disciple. Une traitrise de ta part conduirait à ta propre mort. Je te pourchasserais, je te traquerais jusqu’à ce je puisse aspirer chaque gouttelette de ton essence pour faire de ton corps qu’un morceau sec et languie… De ton sang, signe ce contrat. »  Je claque des doigts et un de mes hommes, surement dans la vingtaine, mais si maigre et blême qu’on lui donnerait 30 ans de plus. Il ne semblait à peine réussir à tenir sur ses cannes. Je lui arrache ainsi le bout de papier des mains et le temps à mon humble serviteur. « Ta liberté contre l’existence abjecte de ta créatrice. »  J’attendais. Toujours austère. Voir sans vie.

When light breaks.

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JANVIER 1830, ONYX KINGDOM.

Impassible, aussi expressif que le regard vide d’un merlan mort et frit, il ne faut pas être devin pour comprendre que la vie éteinte de ma pauvre mère ne vaut plus grand-chose aux yeux de ce démon à la réputation aussi éparse que conjecturale au sein d’Elvendyr. Je me fiche de ce qu’il attend de moi, tant qu’il exhausse mon vœu le plus désespéré et répare cette âme en peine qui s’est fêlée à quelques parts entre les péchés d’orgueil d’une succube égoïste qui, pour nourrir ses affreuses idées de grandeurs, à mis tous les royaumes à feu et à sang.  

Ces somnambules cobalt anesthésiées qui me servent d’yeux dérivent doucement du noble lustre du démon, pour venir contempler cette espèce de demie portion de larbin qui aussi livide que la neige et frêle comme une tige desséchée se rapproche de moi. Faisant fi de cet automate lobotomisé, je lui arrache des mains la feuille de papier, la créature lupine ensevelie en les ténèbres glaiseuses de mon être hybride ne pouvant retenir le reniflement de dégoût qui d’un souffle monstrueux remonte quasi jusqu’à ma trachée alors que mes tripes se broient sous les griffes de la bête qui s’agite d’impuissance dans sa cage fragilement fait de chair et d’os. Ce larbin comprend rapidement qu’il vaut mieux pour sa santé qu’il se tienne loin de moi, qui de moins en moins se fais passif…

- Qu’à cela ne tienne, Wolfram. Ma liberté contre sa vie, que j’annonce, fataliste, sourire goguenard aux lippes, alors que la soie de ma dague s’enfonce dans les chairs de ma paume comme du beurre, le flot liquoreux et vermeille ne tardant pas à suinter de la plaie profonde.

Serrant le poing pour accélérer l’hémorragie, j’élève ce dernier au-dessus du contrat, là où sur le blanc d’albâtre vient s’éclabousser trois gouttes de sang encore bouillantes, mais retombées d'une invisible blessure… car mon âme hybride accélères déjà la génération de mes tissus humains. Le pacte fait avec l’être démoniaque, je présente le papier sanguinolent au larbin alors que mes yeux restent figés sur le cadavre de ma mère.

- Les menaces sont désormais superflues, avec ce pacte de sang que vous m’avez balancé sous le nez. Pour notre commun avenir, nul besoin de vous échiner à ces traques inutiles et harassantes. Il n’est pas nécessaire de déchaîner vos enfers, démon. La servile loyauté étant malheureusement ces ficelles qui me remuent, soyez gré de ma plus fidèle servitude. Je ne vous décevrai pas, Wolfram.

Mes prunelles reluisantes quittent le morne visage de ma défunte mère, pour venir plonger dans les yeux verdoyant de mon interlocuteur. J’ai l’impression de sombrer en deux puits sans fond. Ces yeux ne sont que les soupiraux des âmes expirées et brûlées par ces flammes qui avidement les lèchent.

Mes prunelles avides dévisageaient sévèrement le jeune homme face à moi. Il venait de m’implorer de ramener l’âme de sa mère – en me livrant à ses plus fidèles obéissances. J’appréciais cette franchise – encore plus cette naïveté. Il serait mien et je savais en faire bonne usage. Salem ne semblait pas savoir dans quel bateau il se lançait, mais ça m’était égale. Une fois le papier en main signé de son sang, je claque des doigts pour le faire disparaitre. Ma tête reprit une inclination vers la droite, laissant même mon cou craquer bruyamment. On aurait pu comparer ce mouvement à une scène de l’exorcisme (mais bon – personne ici ne comprenait ma référence vous savez). On parle que pour parler… enfin. Salem me jurait son asservissement. J’aurais pu sourire pour démontrer ma joie, mais je ne fis rien. Qu’un regard avide d’émotion et un quatre-vingt-dix degré vers ma gauche pour exiger d’un signe du doigt à l’une de mes dissipes de me rejoindre. « Je ne m’attends pas moins de votre part, horrible spécimen. » Ajoutais-je. La femme que je venais de pointer vint à notre rencontre. Il s’agissait d’une jeunette, aussi maigre que mon autre serviteur. Elle avait des cernes jusqu’au bout du nez, ses cheveux noirs et minces collés sur son visage, habillé de sous-vêtements troués dont les marques de piqures d’héroïne recouvraient la majeur parties de son corps. Des hématomes sur sa peau démontrant qu’elle n’était clairement pas en santé. Je me penche ainsi vers le cadavre de la mère de Salem, ferme les yeux en posant ma première main sur la défunte, puis la seconde sur cette lamentable droguée. Après quelques secondes, tout mon corps se mit à trembler, jusqu’à ce qu’une grande respiration m’interpelle. Mes yeux s’ouvrent spontanément et on pouvait y voir un noir absolu. Des mots de ma langue natale surviennent alors pour finalement me voir revenir à la normale. Cette fois-ci. Un sourire en coin se dessina un court instant sur mes lèvres. Je me mordille la lèvre inférieure et retire mes mains des deux femmes. La femme de Salem restait blanche et sans vie, sauf que le regard de la frêle droguée venait de changer. « SALEM !? QUE S’EST-IL PASSÉE ? » Dit alors la toxicomane. Mes pupilles suivirent la conversation du regard, de marbre face à ce débordement d’émotions natives.

When light breaks.

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JANVIER 1830, ONYX KINGDOM.

Mon audace me tuera.
Mon cran me brisera.
Mon imprudence me disloquera.
À l’encre carmine de mes veines, j’ai signé le contrat, validé les balafres de ce coutelas qui présentement me poignarde dans le dos et me démantèle sur l’autel des sacrifiés. Dégoûté au plus profond de mon âme damnée, moi qui dans l’effroyable peur croyais dompter cette idée folle à dessein héroïque, je ne peux m’empêcher de m’éloigner de cette aberration de la nature à grandes foulées maladroites, mes yeux dégoulinant de dégoût malheureusement noyés dans les puits véreux de ce regard brumeux qui m’observent avec énigme et égarement.

Non. Impossible ! Absurde. Abject.
Cette carcasse livide, mouchetée de plaies purulentes, sceau de vices, sévices, immondices, elle ne peut être ma mère ! Cette moire laquée de néfaste et poison ne peut appartenir à celle qui m’a mise au monde !?

- Tu--- tu n’es pas elle. Non.

Impossible. Absurde. Abject.
Ce n’est pas Elle. Elle ne peut être prisonnière de ce répugnant simulacre vaurien !?
Mon audace me fait lentement perdre la face.
Il me prend pour le dindon de la farce.

- Conjure ce mauvais sort, démon ! Libères la de cette enveloppe charnelle de dépravée et repue aux plus funestes des bassesses !

Je fais volteface à la créature démoniaque, larguant en ces deux puits de ténèbres, les amarres de mon désespoir noyé dans ces maudites larmes que mes barrages ne peuvent retenir.

- Tu m’entends !? Délivres la de ce Mal, Wolfram ! LIBÈRES LA !

Séquestré dans les liens de ma carne fragilisée, me voilà qui s’agite, s’étoile, s’anéantis, reniant cette chose qui est supposé être ma mère alors que je me fraie un chemin dans la foule pour gravir le niveau du démon.

- Délivres la, Wolfram ! LIBÈRES LA !

Mon audace me tuera.
Mon cran me brisera.
Mon imprudence me disloquera.
Ces évidences n’existent plus, lorsque mon poing se lève et s’abat sur la mâchoire de ce monstre.

Tout était surprenant ce soir, mais j’appréciais cette rencontre. Salem voulait que je ramène l’âme de sa défunte mère à la vie, c’était ce que je fis. Malheureusement pour lui, ce n’était pas tout à fait ce qu’il escomptait, mais on ne s’amusait que très rarement à mes côtés. J’aimais me moquer des autres – un humour noir qui s’avérait être froid voir morbide, mais c’était ce qui faisait jaillir ma flamme. Je dévisageais l’étrange loup qui m’implorait de reverser mon tour de magie, mais aucune chance. Je croise les bras froidement, l’observant dans toute sa pitié. « Un pacte est un pacte. Ton sang a coulé et ta mère est revenue à la vie. Il fallait être plus précis, sale clébard. » Dis-je sèchement en grinçant des dents. Mes bras se croisèrent. Salem tentait l’impossible pour que je change d’avis. Je trouvais son cran assez remarquable. Lorsqu’il tenta une riposte, poing à mon visage, mon regard avide changea et un léger sourire vint se dessiner le temps d’une seconde sur mes lèvres. Magnétiquement, mon bras se lève pour lui attraper son poing. Sans attendre, je le serre fortement et d’un geste furtif je l’envoie valser à plusieurs mètres plus loin. Il tomba sur un amas de boîtes en bois qui servaient de chaises aux clients de la place, provoquant un arrêt de la musique. Tous les regards se tournèrent vers Salem. Je lève la main et claque des doigts. « Du vent. » Hurlais-je sur un ton satanique et aussitôt, tout le monde retournait à leur occupation. J’avance de quelques pas pour le rejoindre. « Ose une autre fois et je ferais de ton minable corps, un tas d’os asséchés. On dit que la vie d’un chien est plus courte que celle du natif – si tu ne veux pas que je mette cette théorie en valeur avec ton minable petit corps, ne tente rien. Prends cette sauvage qui te sert désormais de créatrice et va-t’en ! » Continuais-je à lui dire, sur un ton sévère et assez audible pour que tout le monde m’entende.

When light breaks.

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JANVIER 1830, ONYX KINGDOM.

Le souffle est si rapidement chassé de mes poumons à bout d’effort, lorsqu’avec douleur et fracas mon corps à la lourdeur du marbre vient minablement s’échouer en ce qui est désormais des vestiges de bois. Pataugeant dans les débris des meubles, les craquements sinistres que j’entends, j’ignore encore s’ils appartiennent aux meubles ou à ma colonne vertébrale qui c’est prise une sacrée raclée. Groggy à la fois de gêne et d’effroi, ma paume gauche vient effleurer puis embrasser le sol poussiéreux, usant de ma célérité surhumaine pour me rétablir sur mes jambes et ne surtout pas donner l’honneur à ce traite un sentiment de supériorité supplémentaire. Mes prunelles cobalt jouant dédaigneusement à la roulette russe, entre le démon et cette horreur de la nature qui désormais s’avère être ma mère. À cette horrible pensée, je secoue la tête, écœuré.

Cette farce n’est pas ma mère. Les mains barbares, odieuses, de l’incube ont saccagés et flétrie mon trésor le plus rare et précieux. Elle n’est qu’une éclisse de désespoir et d’Enfer. Une pomme pourrie qui est en train de gangrener les landes déjà malades de mon esprit oxydé. J’ai pas envie d’en finir là. Je n’ai surtout pas envie de quitter ces lieux accompagné de cette catin débraillée et misérable. J’esquisse malgré tout quelques pas de recul, sourire goguenard aux lippes, je le jauge de haut, suant de condescendance et bouillant d’une haine qui je le sais dans l’écho des âges qui se prolongeront deviendra viscérale.

- Gardes bien en mémoire ce que tu viens de dire, démon. Je ne sais pas quand, je ne sais pas où, mais je t’en fais pas la promesse, un jour, je te le ferai payer et tu pourras vérifier lors de ton dernier souffle ta petite théorie sur les clébards de mon genre et les Natifs.

Je vais le tuer.
C’est une promesse.
Signé à l’encre carmine de mes veines.
Sans un regard sur ce déchet humain qui je refuse se veut être ma mère, je tourne le dos à ce théâtre de l’erreur et quitte ce lieu de perdition pour aller me perdre dans l’apocalypse qui tombe et retombe encore sur notre royaume maudit.

Mon corps restait dressé face à cet individu infect qui me menaçait vulgairement. Que prenais-je de ses propos ? Que très peu d’intérêt. S’il croyait être le premier à maudire mes actes, il se mettait le doigt dans l’œil. J’étais un démon, une entité très vieille et mon comportement malsain m’avait conduit à recevoir beaucoup de haine à travers les années. Je jouais avec les gens, je jouais avec les âmes. Je savais comment m’y prendre et je restais invulnérable. J’étais un spécimen difficile à mettre chaos et jusqu’à présent, personne ne s’y était risqué réellement – et ça, malgré toutes les injures qu’on m’intentait. De marbre, comme depuis le commencement, je fixais Salem qui se plaignait de la situation. Un long soupir se dégageait de mon être, laissant place à un énervement intérieur puissant. « Tu n’es pas le premier à jurer de te venger. Ne pense pas que tu arrives à mettre tes paroles en marche. Je suis le démon Wolfram. Beaucoup plus puissant que quiconque ne peut l’être et ma défaite ne risque pas d’arriver prochainement. Profite de la nouvelle vie que tu as désormais avec celle qui t’a donné la vie. Sache que cette chance, tu ne l’auras pas une seconde fois… je te rappelle que c’est toi qui est venu à moi. Sans mon intervention, ta mère ne serait plus. Prend cette chance tandis qu’elle est là. Elle ne se représentera jamais. » Dis-je sur un ton constant. Mes yeux le dévisageaient toujours, je n’avais qu’une hâte. Reprendre mon siège.

THE END
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