Douce-Amère. Cette soirée ne faisait que commencer et déjà Illyria savait qu’elle profiterait à fond de ce que la nuit lui réservait. Aussitôt la dernière lueur du soleil disparut dans la pénombre, la vampire s’empressa de prendre sa super-vitesse et de courir jusqu’à Wisteria Mount – village principal du comté de Topas où la curiosité s’emparait d’elle. Depuis la dernière attaque de son royaume par les rebelles de San Phoenix, la beauté brune espérait continuer à prendre de la puissance. Elle savait que le territoire des loups pouvaient être beaucoup trop complexes – encore plus celle de l’eau – mais l’air semblait différent. Plus accessible même. Elle ne connaissait que très peu à leurs sujets, c’était ainsi parfait. La grande Illyria pourrait se faire passer pour une voyageuse et tenter de soutirer le plus de détail au sujet de cette communauté. Enfin, pour ce faire, la belle laissa son esclave – celle qui lui était asservie – la jolie Althea qu’elle s’était procurée elle-même lorsque le peuple du feu avait tenté l’impossible pour reconquérir leur terre bafouée. Par chance, Illyria avait toujours une longueur d’avance et elle s’en plaisait beaucoup.

Une chevelure frisée, un pantalon décontracté et une camisole blanche sur le dos, la voilà aux abords de Wisteria Mount. On pouvait sentir l’air des montagnes lui frotter le dos et juste ce détail lui donnait de longs frissons. La belle et arrogante reine marchait doucement à travers le village, dévisageant les gens qu’elle croisait jusqu’à ce qu’elle s’arrête face à un petit parc qui semblait plutôt calme. Illyria constata la présence d’une demoiselle au loin sur un banc et elle alla l’aborder directement. D’un doux sourire, elle posa une main douce sur l’épaule de cette dernière. « Bonjour ma chérie. Je ne veux pas te déranger, mais pouvez-vous me dire le nom de ce village ? » Elle se mit à rire – un petit rire qui semblait tout naturelle, à la limite de la nervosité, mais bon, Illyria savait bien jouer ses cartes.

Bittersweet symphony

- feat. Illyria -

Un léger vent soufflait, soulevant mes cheveux libérés de toute entrave, ainsi que les pans de ma robe. Le calme du parc contrastait avec le reste de ma journée, consacré aux réparations d’une éolienne tombée en panne non loin de Wisteria Mount. Lorsque j’étais rentrée à la maison, j’avais encore les oreilles bourdonnantes des discussions animées entre techniciens, ingénieurs et cadres administratifs, sans compter le ronronnement des machines, qui avaient finalement pu être mises en état de marche avant la fin de la journée. Si j’aimais beaucoup mon travail – au grand dam de mes parents qui auraient voulu me voir faire quelque chose de plus « raffiné » - parfois interagir avec les gens était presque douloureux. A peine rentrée ma mère m’avait abordée, très clairement décidée à me faire parler de Teeny et de l’avancée de notre relation. N’ayant pas grand-chose à lui apprendre sur le sujet, et ne voulant pas entendre ses reproches sur mon manque d’investissement dans ces fiançailles, j’avais prétendu une course urgente à faire avant la fermeture des magasins et j’avais fui la demeure familiale, juste après m’être changée pour une robe bleu à col et un épais gilet assorti. Depuis le soleil avait fini de se coucher et j’avais fait le plein d’apaisement, et je me sentais presque prête à rentrer. Même si je n’avais guère peur de ce qui pouvait m’arriver à Wisteria, il était quand même plus prudent de revenir chez moi.

Soudain une main se posa sur mon épaule, et je me figeai, rassemblant toute mon énergie, prête à faire usage de mon don. Mais en relevant la tête, ce fut le sourire d’une femme brune que je vis, avant qu’elle me demande où elle se trouvait, ses mots accompagnés d’une formule un peu trop familière à mes oreilles. Consciente toutefois que c’était le produit de mon éducation, et qu’elle ne semblait pas chercher à se montrer insultante, je fis un effort pour ne pas lui en tenir rigueur. Même si ce contact physique non-voulu avec une inconnue me mettait mal à l’aise. Je lui offris léger sourire avant de lui répondre : « Bien le bonsoir madame. Vous ne me dérangez aucunement, ne vous en alarmez point. Et nous sommes à Wisteria Mount, tout près de la place centrale de la ville. ». Trouvant curieux qu’elle ne sache pas où elle se trouvait – après tout, même si Wisteria n’était pas bien grande comparée à d’autres villes, elle n’en restait pas moins la capitale du Topaz Kingdom – j’ajoutai, circonspecte : « Vous êtes-vous perdue ? Puis-je vous aider ? ». Je n’étais pas tranquille à l’idée de laissée une femme seule et perdue dans les rues de la ville après la nuit tombée. Je préférais donc m’assurer que tout allait bien pour elle et je me levais pour me mettre à sa hauteur.

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En se glissant dans la peau de ce personnage naïf et perdue, Illyria se devait de bien jouer ses cartes si elle ne voulait pas se faire prendre à son propre jeu. La reine du clan vampire de Crimsondale ne connaissait rien du tout au territoire de Topaz Kingdom, même qu’elle s’y aventurait pour la première fois selon ses souvenirs et pour une vampire originelle de 69 ans, c’était plutôt surprenant. Enfin, la belle remarquait un certain malaise face au geste qu’elle posa à l’épaule de celle-ci, mais elle n’allait pas en faire tout un plat – de toute façon – la jeune demoiselle préférait se taire sur le sujet, ce que Illyria appréciait. Elle ne voulait pas se prendre la tête aussi rapidement. Elle devait garder son calme et ça, elle n’y arrivait pas souvent. Un geste de la main pour replacer une mèche derrière son oreille et un battement de cils charmeur suffit à la brune avant de lui répondre. « Oh, vous me dites que je suis tombée directement au pays des éoliennes ? J’aurais dû m’en douter en voyant ses gigantesques hélices blanches…. Je semble sans doute un peu confuse, mais je viens de faire une longue route…. J’ai demandé les services d’un ange de Magnolia Light ce matin, mais en chemin… il s’est passé quelque chose que je ne pourrais expliquer, nous sommes atterries au milieu de nulle part et on a été attaqué par des vampires… ou des sirènes… je ne pourrais vous dire… » C’était du grand n’importe quoi, mais elle montait son histoire de toute pièce. La brune pinça les lèvres en admirant la réaction de la jeune innocente. « et mon chauffeur a été tué…. » Je grinçais des dents démontrant mon choc à l’égard de ce drame qui s’était passé – enfin vous comprenez.

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Rapidement la main de l’autre femme se dégagea ce qui me soulagea. Même si je faisais un métier que certains qualifiaient « d’hommes », et certainement un métier que mes parents ne trouvaient pas vraiment approprié pour mon statut, ce n’était que dans des moments comme celui-ci que je réalisais à quel point mes collègues et les gens avaient qui je travaillaient se montraient relativement respectueux de mes origines riches, et du fait que j’étais une femme. Ne me touchant jamais sans permission, se montrant poli avec moi – même si plus d’une fois je les avais entendu jurer, ce n’était jamais à mon encontre – et même les plus vieux jeux finissaient par se montrer un minimum respectueux. Pourtant, contrairement à certaines des habitudes que j’avais acquises durant mon éducation élitiste et dont j’essayais de me défaire, mon malaise à être touchée sans demande au préalable me semblait pourtant tomber dans le domaine du raisonnable. Autant dire que je me déraidis rapidement alors que la brune m’expliquait ses mésaventures, et je fus un peu choqué d’entendre que l’ange qui la téléportait s’était fait tuer. Malgré moi j’eus une pensée furtive pour mon ange gardien, celui que j’avais rencontré pour la première fois durant mon Harvest et qui semblait disposé à m’aider à accomplir mes objectifs. Touchée, je lui dis : « Par Kyros ! Vous venez de passer des moments bien difficiles. Etes-vous blessée ? ». Puis après un instant de réflexion, je lui proposai : « Venez chez moi, vous y serez à l’abri, et nous réfléchirons à moyen de vous faire rentrer chez vous, même si pour cette nuit il vous faudra probablement passer la nuit ici ». Je n’étais guère enchantée d’inviter une inconnue chez moi, mais je ne pensais pas que mes parents y verraient trop d’objections. Après tout si cette femme avait les moyens de s’offrir les services d’un ange, elle ne pouvait venir que d’un milieu aisé, et mon père ne pourrait pas laisser échapper l’occasion de nouer des liens avec des ressortissants aisés venus d’autres contrées. Cette pensée me poussa d’ailleurs à demander, alors que je me levais pour lui montrer le chemin : « Puis-je d’ailleurs vous demander votre nom et d’où vous venez ? Pour ma part je suis Tallie. ».

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Mon plan fonctionnait parfaitement. Je n’avais pas besoin d’en ajouter plus qu’elle buvait mes paroles comme si nous nous connaissions depuis longtemps. J’étais tombé sur la bonne brebis. Elle m’invitait même à crécher à son domicile – ce qui était une preuve constante de sa bonne foi – mais surtout que j’allais réussir à facilement la duper. De plus, si je restais chez elle, je ne devais pas non plus y passer trop de temps. La nuit était jeune pour l’instant, mais je ne pouvais pas dévoiler mon plan en me cachant du soleil au petit matin. Être vampire avait ses avantages, mais également ses inconvénients. Je restais humble et démontrais beaucoup de compassion à son égard. Un petit sourire vibrait sur mes lèvres. « Non… je vais bien… enfin je crois… » Ajoutais-je en clignant des yeux. Je faisais pitié et c’était l’effet espéré. Mes lèvres se pincèrent, laissant un petit creux se dessiner dans mes joues. « Oh, mais vous êtes un véritable ange ! Je vous remercie grandement, je vous serais éternellement reconnaissante. Digne d’une déesse de la lumière. Am.. Shaenna doit être fière de vous. Enfin… si vous la connaissez personnellement ? » J’avais été à deux doigt de me tromper de nom en stipulant que Amara était la déesse qui gouvernait mon monde. Je voulais toutefois en savoir plus sur sa relation avec la grande déesse du bien. L’inconnue me questionnait sur mon nom. Bon… qu’allais-je dire. « Je suis Althea. » Ouais j’avais opté pour utiliser le nom de celle que je retenais prisonnière depuis l’attaque de Crimsondale. Était-ce risqué ? Peut-être, mais je prenais cette chance. Rien d’autre ne m’était venu à l’esprit. « Je vie à San Phoenix. Vous vivez ici j’imagine Tallie ? » Ajoutais-je en souriant.

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L’étrangère semblait être sous le choc, mais heureusement indemne, comme elle me le confirma, sans en avoir l’air pourtant très sûre d’elle. Toutefois elle ne restait pas en état de se débrouiller par elle-même surtout qu’il commençait à se faire tard. D’où mon invitation au manoir familiale, qui avait plus que la place pour l’accueillir de toute façon. Elle me remercia chaleureusement, ce qui effaça un peu de mon inquiétude de la faire venir chez moi. Elle me qualifia même d’ange, ce qui était de trop à mon avis, mais elle détourna bien vite mon attention en parlant de la déesse de la lumière, et je ne relevais même pas la façon dont elle avait buté sur le nom de la déesse. « Oh non, je ne la connais, enfin pas plus que les autres. Ne l’avons-nous pas tous rencontré à notre Harvest ? Elle est magnifique d’ailleurs, pas seulement physiquement mais elle a une telle lumière en elle. Enfin je m’égare, mais ‘espère la rendre fier en tout cas. ». Je ne me considérais pas vraiment comme une personne religieuse, mais j’avais beaucoup de respect pour les dieux, hormis Amara que je considérais comme responsable de bien des maux. Sachant que je pourrais facilement perdre de longues minutes à parler de mon unique rencontre avec Shaenna, je fis un effort pour me forcer à être terre à terre et revenir à la situation actuelle. A ma demande, elle m’annonça être Althea, tout droit venue du territoire du feu. « Dans ce cas, bienvenue à Topaz Kingdom, même si les circonstances ne sont pas idéales Althea. Et oui, je vis ici, avec mes parents d’ailleurs, c’est dans ma demeure familiale que nous allons, le manoir Nordet. » le nom était celui d’un vent froid, commun dans cette région, mais je gardais cette anecdote pour moi, ne voulant pas ennuyer mon invité. Je lui souris avant de lui montrer la direction de ma maison, et je lui dis : « Venez, je vais vous montrer le chemin. ». Je me mis en route, tout en gardant un œil sur la brune.

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Bien que je fasse partie de ces vampires originels – ceux transformé directement de Tharek lui-même – je restais toutefois une native du feu, comme les autres. J’avais été transformé plus tard dans ma vie – après avoir vécue mon propre Harvest, d’avoir abusée de mon pouvoir de manipulation empathique sur tous ceux que je voulais – particulièrement ma famille. J’avais mon passé avec Shaenna. Même qu’elle me connaissait plutôt bien. Je ne pourrais pas me cacher éternellement à Topaz Kingdom. Un jour ou l’autre, je tomberais sur quelqu’un qui avait déjà croisé ma route. Par chance, Tallie n’était pas proche d’elle. On oublie de la voir débarquer à un souper de famille alors. Je me mis à rire face à son propos sur nos propres rencontres avec Shaenna. « Oui oui… bien sur… c’est surtout que mon Harvest date d’il y a bien longtemps … on oublie son visage. » Dis-je en levant les épaules. C’est à ce moment que nous commencions à marcher en direction de sa maison. Elle semblait si naïve. J’étais tombée sur la bonne perle à exploiter. Je l’écoutais me répondre et m’expliquer un peu ce qui m’attendait. J’étais conquise par cette marque de confiance – mon dieu qu’elle allait finir par le regretter la pauvre… ou pas – je marchais doucement et lui répondis finalement. « J’avoue que ce n’est pas la meilleure des situations, mais je me sens très chanceuse d’être tombé sur une personne comme vous. Une autre personne aurait bien pu ne pas croire un simple mot de mon histoire et me chasser littéralement. » Mon regard continuait à se poser sur elle, je lui souriais tout en réfléchissant à ce que j’allais faire pour la suite. Je m’amusais bien pour tout dire. « Vous avez la chance d’être encore une famille unie. Ma famille a été éliminée par les vampires… il y a un petit moment. » D’un sens, je disais vrai.

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Heureusement pour la brune, Althéa, ne sembla pas se formaliser de mon enthousiasme affichée pour la déesse de la lumière. Lorsque je lui fis remarquer que tout le monde l’avait un jour ou l’autre rencontré, elle eut l’air gêné, disant que sa rencontre avec Shaenna datait d’un moment. Certes, Althéa devait avoir quelques années de plus que moi, mais pas tant que cela, si ? Ou peut-être avait-elle un don qui lui permettait d’apparaitre jeune ? Enfin peu importe, la conversation dévia rapidement vers quelque chose de plus pragmatique, alors que nous nous dirigions vers la demeure familiale. Elle en profita pour me remercier, me faisait remarquer que d’autres ne l’auraient peut-être pas aidée de la sorte. Je lui offris un petit sourire avant de retorquer : « Et bien c’est une bonne chose que vous soyez tombé sur moi alors. Même si je préfère croire que d’autres personnes auraient eu la gentillesse et la bonté de cœur d’offrir leur aide à une femme dans la détresse, surtout quand elle se retrouve seule en territoire inconnue, à la nuit tombée. ». Car même si j’avais toujours été protégée, je n’étais pas assez bête pour croire que le monde ne recelait aucun danger, surtout pour celles du genre féminin. Lorsqu’elle me parla de la chance que j’avais d’avoir une famille unie, je fus sur le point de nier, mais je ravalai bien vite mes mots en entendant la suite de sa phrase. Navrée, je lui dis : « Je suis sincèrement désolée pour vous, ce doit être horrible ce qu’il s’est passé. ». Même si une part de moi avait conscience que c’était déplacé de lui poser la question, ma curiosité l’emporta quand je l’interrogeai : « Y a-t-il beaucoup de ces créatures près de chez vous ? Cela doit être bien dangereux d’y vivre non ? ». Ce disant, l’énorme chalet de mes parents fut en vue alors que nous continuions de discuter. Tant mieux, car, quand bien même il n’y avait aucun vampire dans les parages, l’idée d’être dehors en pleine nuit commençait à paraitre de plus en plus inquiétante.

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Nous continuons à marcher en direction de la résidence de Tallie. Je ne comptais pas faire un carnage ce soir. J’étais dans son village que pour obtenir un peu plus d’information. Une fois que je serais en connaissance de cause, je pourrais plus facilement tenter de prendre d’assaut ces lieux aux côtés de mes sbires vampires. Je continuais à jouer les sottes en usant de petits sourires – évidemment tous ceux qui me connaissait bien saurait parfaitement que je jouais le jeu de l’hypocrisie – mais pour une inconnue comme cette petite native de l’air, je savais que je pouvais facilement la duper. « Vous avez un grand cœur et une bonne âme. J’espère pour vous que vous ne tomberez jamais sur une personne aussi noir que pourrait l’être un démon… » Les démons faisaient craindre les habitants de Elvendyr à travers le monde entier. Ils pouvaient s’avérer être très dangereux – il en existait des multitudes infinis, comment tous les connaitre. Impossible. Même Amara ne devait pas savoir tout ce qui se cachait dans le plus profond de son enfer. « Oh oui, horrible. Je suis née à Crimsondale, en territoire feu et notre village a été attaqué et revendiqué par le peuple vampire… disons que c’est chose courante par chez moi. Vous devez avoir déjà entendu parler de Illyria – la grande reine vampire. » Parce que oui, je savais que je faisais le tour des livres d’histoires. On parlait de moi au lycée et un peu partout dans le monde. Je pouvais en être fière. Je faisais partie des vampires transformés par Tharek lui-même. Je pouvais me permettre d’avoir cette notoriété après tout. Je lui désignai un petit sourire en attente d’une réponse. Elle ne savait tout de même pas que j’étais la grande Illyria moi-même alors pourquoi ne pas s’amuser un peu.

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Notre marche jusqu’au chalet excentré par rapport au centre du village où j’avais rencontré Anthéa passa bien plus rapidement que prévu, alors que nous étions plongées en pleine conversation. Une conversation qui étonnamment m’intéressait, moi qui n’aimait pas parler pour ne rien dire, et qui donc avait l’habitude de compter les minutes lors des soirées mondaines organisées par mes parents. Non cette discussion me donnait de quoi penser, et m’apprenait certaines choses sur la façon de vivre des natifs de feu. Même si les louanges de cette femme inconnue à mon égard me mettait un peu mal à l’aise. A part par quelques proches, on ne me vantait habituellement pas mon grand cœur, probablement parce que beaucoup de gens confondaient ce trait avec de la naïveté. La suite de sa remarque m’arracha une grimace involontaire, avant que je n’avoue avec un demi-sourire un peu gêné : « Et bien moi aussi je l’espère. ». Assez facilement, ma curiosité aidant, la discussion dériva sur les vampires, les créatures hybrides natives du feu, celles qui avaient privé Anthéa de sa famille. Je ralentis un peu le pas, pour écouter sa réponse, car la demeure familiale était en vue et je ne voulais pas encore mettre fin à cette conversation – hors il nous faudrait changer de sujet en arrivant, je le savais fort bien. Son récit manqua de me faire frissonner, et je lui répondis : « J’ai du mal à envisager ce que vous avez dû traverser. Et le nom de cette vampire ne m’est pas inconnu, même si on parle peu de ce genre de chose dans mon entourage. ». Je fis un petit haussement d’épaule, avant d’ajouter : « Mon entourage ne considère pas que ce genre de sujet soit approprié pour une jeune fille de bonne famille et je ne quitte guère le royaume de Topaz. ». Enfin en théorie je n’étais pas censé avoir jamais quitté le royaume de Topaz, mais j’avais parlé sans réfléchir, et j’espérais qu’elle n’en parlerait pas à mes parents qui se poseraient un peu trop de questions sur mes déplacements. Je décidais en tout cas de changer bien vite de sujet et pointait le manoir de la main, qui se trouvait maintenant à une centaine de mètres de nous : « D’ailleurs voici ma maison – enfin celle de mes parents pour être plus précise, mais je suis fille unique, alors elle me reviendra. ». Peut-être la seule chose dont je serais heureuse d’hériter de mes parents.

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La marche se faisait plutôt bien et plus que nous avancions, plus que je ressentais que la curiosité prenait d’assaut l’esprit de la gamine. Tallie était une gentille jeune fille – ça serait bien dommage de l’éliminer aussi rapidement. Je savais que je pourrais m’amuser avec elle – en plus d’en apprendre plus au sujet de son peuple. À Obsidian Kingdom, tout le monde connaissait mon nom… même que tout le monde avait peur de moi, mais ici, je n’étais qu’un nom parmi tant d’autres ou bien une vague théorie. Je lui fis une mine surprise. « Que de nom et bien, c’est intéressant… enfin… je veux dire, c’est surprenant ! Elle est tellement reconnue que ça m’étonne que son nom ne soit pas connu à travers Elvendyr. » Je lève les épaules. Je ne devais pas trop en faire – surtout si elle voulait me faire confiance et pas en venir à croire que j’étais une fervente admiratrice de Illyria… Je rigole doucement face à ses commentaires sur sa famille. Une autre coincée … elle me rappelait Effie d’ailleurs. Je souris. « Et bien, c’est parfois mieux d’être mis au courant du mal qui parcours notre monde… sans quoi, face à l’ennemi, cela pourrait s’avérer fatale… » Je lui fis un clIn d’œil en opinant doucement. Nous entrons finalement sur la propriété de Tallie et sa famille. C’était magnifique. Ils semblaient avoir du goût et sans doute de l’argent. Moi qui avait toujours brillé dans l’argent, je pouvais dire que je m’y connaissais bien. « Oh oui ! Vous en avez de la chance dit-donc, c’est magnifique ! » Rajoutais-je en souriant de plus belle.

ABANDONNÉ & VERROUILLÉ.