C’est parce que je ne la comprends plus ma vie, que je me grise les méninges de cet alcool aussi brûlant et renversant ! C’est parce que plus rien semble ne vouloir faire de sens, que je bois ma vie et me noie en les affres de cette eau-de-vie. Je privilégie les périls de l’alcool, à l’opposé de rattraper ces lambeaux de lucidité qui m’échappent complètement. Rivière de tequila et son long fleuve éthylique. Miel et sève d’une anesthésie locale et qui engourdie l’âme. Vertige et chute libre, c’est l’ivresse et l’ivrognerie qui m’empêchent de véritablement sombrer. Dégueulée des confins d’une réalité factice, je m’évertue dans l’artificielle d’un paradis et le grisant coma qui nonchalamment me guette. Le fardeau du mensonge broie les vertèbres et imparablement c’est la vérité qui rappelle à la terre cette échine fragile et servile. Coincée dans l’absurdité d’une société buvante, mon troublant sommeil me parait moins navrant et ainsi je voltige d’un pôle à l’autre. Qu’est-ce que je peux faire d’autre ? Pressant sans aucun doute le pas vers une connerie qui me coûtera fort probablement très cher, le temps ou le diadème des normalités qui autrefois couronnerait les crânes appesanti semblent prendre des allures de breloques insignifiantes. Un mensonge. Nous avançons aveuglément dans un parfait mensonge. Le voile de la routine doucement s’étiole, se châtre et puis se fane. Un léger aperçu d’Enfer non loin plane alors j’erre à cette dérive inévitable puisque ma raison se veut tout simplement irréparable !
Égale à le battement d’aile du Corbeau, son bruissement est aussi morigénant que terrassant, se sont des obscurités dissimulées qui doucement se délient à mesure que je me perds dans les éphémères. Une dextre plaquée contre ma tempe, sentant pulser dans l’éden de ma paume la maudite veine frémissante, le sol tangue sous mes Louboutin et c’est la jumelle qui m’empêche de me casser la figure en venant me rattraper contre le musculeux poitrail d’un anonyme tanguant là dans la nébuleuse.
- Charlize. Est-ce que ça va ?
Non. Ça ne va pas ! Égarée dans l’effervescence d’une forêt de corps qui se déchaînent comme se démènent la faune mutilée dans la tempête, oppressée entre les carcasses chaloupées qui se trémoussent telles de vicieuses damnées, il semble que le feu de joie ne parvient même plus à m’étourdir ou m’éblouir. J’ai envie de gerber et l’envie de danser pour sûr me quitte. Ce qui est inhabituel chez moi. Le cœur sectionné en deux sur la guillotine de l’existence, c’est la chamade qui me martèle les flancs à mesure que les volutes de l’assourdissante musique s’invitent dans ma pantelante poitrine. Le mordoré rougi de mes mirettes endommagées soudainement trop sensible et vulnérable aux dards étincelants des néons aux multiples couleurs, me faisant non seulement perdre le nord… mais l’alcôve de mes inhibitions !
- De l’air. J’ai besoin d’aller prendre l’air, que je m’entends bafouiller, la voix chancelante dans la houle de ma soudaine torpeur alors qu’à peine je sens s’enrouler autour de mes vestiges ce bras d’homme fort drapé d’un élan plus cavalier que chevaleresque.
Et c’est la nuit qui par surprise et mégarde se précipite autour de nous, voyant défiler les périphéries par allures et autre-part effarant, interceptant par moment des nués de corps, de verres, d’un zinc et bientôt d’une porte d’entrée qu’une paluche pousse et ou sinon de lampadaires aux cônes limoneux tout simplement aveuglant. La morsure du crépuscule frais sur les chairs caramélisées et bouillantes avec misère me fait tressaillir… n’entendant même plus la voix ou la brise qui insidieusement se fraie un laborieux chemin jusqu’à mes esgourdes. Je patauge dans de l’huile ou de la mélasse. D’une main paresseuse et molle je me crois désigner un taxi :
- On… on ne le prend pas ?
J’en ai pourtant de besoin pour rentrer chez-moi, non ? Et l’ombre de cette question disparait dans le ouaté de ma confusion, le bras se resserrant autour de ma taille alors que le cavalier nous fait presser le pas pour gagner la promiscuité d’une ruelle et ses ténébreuses.
- Là où on va, crois-moi, tu en n’as pas de besoin…
Il y a quelque chose d’étrange, de latent, au paroxysme de ce sourire qu’il m’adresse. Et dans les sépulcraux de ses fauves pupilles baignés en mes Onyx, il sommeille une sorte de transe et charme que je ne parviens à reconnaître. Sorte d’océan miroir et sombre. Perfide et insidieuse caresse qui m’engorge l’âme d'ivresse et me voilà qui m’affaiblie de ses liesses. Curieusement l’un de mes fins sourcils s’arque sous mon front alourdi, sentant un étau de fer me broyer les vertèbres et ligaments du cou. L’air est non seulement chassé de ma voie respiratoire, mais de mes poumons, comme mon dos gracile vient brusquement se plaquer contre les briques d’un mur siégeant sinistrement là derrière moi et que je sens l’armature humaine, colossale, bétonnière, venir tout contre moi se presser, prolonger et lover. Encagée et piégée.
Je capitule alors…
- Qu’est-ce que… - Shhh ! Tais-toi. Tu ne ressentiras rien.
Des phalanges glaciales papillonnent sur la carne de mon cou, balayent au passage la cascade des sombres ondulations de ma chevelure alors qu’il ne tarde à venir nicher dans le creux de mon épaule l’immondice de son visage, croyant entrapercevoir dans l’inclinaison sa langue poisseuse glisser et avec appétence venir lécher des canines d’une blancheur d’albâtre et acérée comme le froid des couteaux…
Oh, cielo ! Me dites pas que je vais mourir dans les bras d’un Dracula à deux balles ?!
nothing's gonna change my world
Isaure
MESSAGES : 44 BARGE DEPUIS : 24/02/2021 ROYAUME : RevealDown; terre-mère tant convoitée.
Sujet: Re: supersonic overdrive. (ISAURE) Mar 9 Mar 2021 - 10:25
“All I ever wanted was the world.” & La délicieuse euphorie ! Point d'embarras ici, si ce n'est l'absence de liqueur entre chaque godets. Comme hors du temps, l'existence semble n'être qu'une idéologie nébuleuse et abstraite sur laquelle il n'est pas utile de s'attarder. D'ailleurs, je me fous des chimères qui s'alanguissent autour de moi, telles des flammes infernales, la gueule toute prête à me dévorer. Qui suis-je si ce n'est cette ivresse latente que chacun se plaît à éprouver, le soir, lorsque le mal de vivre et l'ennui s'en viennent sonner leur glas ? Car je me meurs avec inconscience dans ce gouffre pernicieux qu'est la débauche et l'hérésie. Comme il est plaisant, n'est-ce pas, d'en occulter jusqu'à sa propre identité ? Je ne suis plus Isaure. Je ne suis plus ces deux égides, omnipotentes, qui me lacèrent l'échine. Seulement un noyau, un électron diffus dans l'atmosphère. Un songe tout au plus, une inspiration extatique. Et si je me heurte inlassablement au commun des mortels, c'est pour mieux oublier la couronne d'épines que je me dois de porter. Dans leur frivolité pourtant toute pudibonde, aucun d'entre eux ne s'épanche alors sur ma présence incongrue à leurs côtés. Je suis des leurs, peut-être plus humaine qu'ils ne le seront jamais. Je crois n'avoir jamais été qu'une imposture, là-haut, quand le devoir me forçait à ployer vertèbres et colonne. Ici, le dilemme ne se pose plus. Pourtant, ce n'est pas le hasard qui m'amène en ces lieux. Non. Attendez... ! Merde, je L'ai paumé !
Dans la cohue générale, je ne parviens pas à distinguer la moindre silhouette. Faut dire que le tintamarre présent entraîne l'assemblée à se soulever d'une seule et même fougue, donnant alors l'impression qu'une vague puissante s'ébroue de toute sa frénésie. L'alcool annihilant quelque peu mes songes, il me faut une seconde de plus pour me frayer un chemin parmi ce gargantuesque brouhaha. Une compagne de fortune m'interrompt cependant dans mon ascension difficile, agitant sous mon nez la bouteille encore pleine de mon alcool préféré. Je me sens comme un russe que l'on appâterait d'un simple tintement de verre. VODKA, GIRL ! Trop faible pour refuser l'invitation, je m'empresse d'ingurgiter le contenu de mon shooter d'un levé de coude parfait en tous points. Boarf, sûrement qu'Elle doit être au petit coin ! Vu ce qu'Elle se jette dans le cornet depuis le début de la soirée, sûr qu'Elle doit vomir l'Océan Pacifique d'une seule pulsion. Après cela, j'en oublie les dernières secousses de raison qu'il me reste. De toute évidence l'heure n'est pas au drama, mais à l'éclate ! Envoutée par les notes d'un Purple Disco Machine, je m'abandonne à l'hystérie ambiante, loin des siècles que je me trimballe au coin des yeux. Sûrement que je passe pour la MILF de service avec mon apparente cinquantaine et mon déhanché plutôt olé olé. D'ailleurs, c'est bien les minots qui s'essayent à harponner toute mon attention. Mais je n'en ai cure. Cette nuit je suis l'adolescence, l'insolence et l'insouciance.
« - Faut que j'fume, que je beugle à mon acolyte d'un soir.
A croire que tous les vices me collent au cul. Le fin rouleau au coin des lippes, je me faufile entre les corps ruisselants de sueur et d'alcool. Quelques mètres encore, puis je regagne finalement la fraîcheur du petit soir. Le contraste entre ma peau brûlante et la brise nocturne me dérobe un frémissement titanesque. Je m'attèle donc à tourmenter la malheureuse entre mes lèvres, histoire de retrouver rapidement la fournaise du night club. Mais c'est sans compter le ramdam indistinct que je devine, là-bas, dans la pénombre. Si je fais d'abord la sourde oreille, une petite voix céleste m'incite à y jeter un œil, juste pour être sûr. Chose que je regrette très vite. Merde. Sous mes prunelles hagardes se joue l'étreinte forcée d'un mufle et d'une femme... WAIT ! De MA femme. Enfin de MON humaine.
Ni une ni deux et gonflée d'un zèle tout bidon, je jette le mégot, retrousse les manches que je n'ai pas, pour venir me planter dans le dos du malotru. Avec l'aplomb d'un agent de police en civile, mon index s'en vient tapoter son omoplate dans l'espoir d'attirer son intérêt.
- Coucou, toi, paraît que c'est mieux à deux certes, mais que ça l'est d'autant plus lorsque la demoiselle est d'accord...
Ahem. Je crois que le Monsieur se fout royalement de mon conseil pourtant très avisé. Les crocs qu'il retrousse sur ses babines m'informent, par ailleurs, qu'il se moque complètement de mon avis. Oups !
- Un vampire, que j'expire, et je n'ai pas emporté mon pieu ni ma gousse d'ail.
Courage fuyons ! N'est-ce pas ce que l'on dit dans ces moments là ? Pour cause, je repense à ces histoires de petit coin. Tandis que je recule suavement, mimant le pas de loup, je prie naïvement pour qu'il en occulte ma venue.
- La mauvaise nouvelle, c'est que je ne suis pas certaine de pouvoir anéantir ce truc là, que je braille à l'attention de la Jouvencelle, la bonne nouvelle, c'est que s'il te tue, je pourrai te ramener à la vie ! »
code by solosands
nothing's gonna change my world
Charlize Flores
MESSAGES : 320 BARGE DEPUIS : 22/02/2019 ROYAUME : RevealDown, Floride, USA.
Sujet: Re: supersonic overdrive. (ISAURE) Mer 17 Mar 2021 - 9:41
Oh, Dios mio ! Dispersé à çà et là dans les confins lugubres de la grotesque organisation de mon temps, on peut dire que cela fait combien de jours précisément où est-ce que je suis au courant de l’existence du monde occulte !? Una semana et demie ? Deux semaines, si nous sommes loca et généreuses ? Et à quelle fréquence, désormais, est-ce que ledit monde occulte vient toquer à ma porte pour m’offrir sur le porche un petit paquet cadeau tout droit expédié des limbes mal lunés et infernaux de notre monde ?! Une ou deux fois ? Et l’enjeu de ma survie a pesé à combien de reprises dans la balance ? Une, deux ou trois fois ? Ça craint ! Ça fait peur ! C’est quoi ce timing limite sadique et aliéné sur la donne ? D’où il était écrit qu’en devenant membre de cette secrète et sélecte confrérie ; j’aurais droit à un abonnement gratuit et pour une durée de trente jours à ses exclusivités et sa livraison à domicile ?! J’en veux pas de ce service à la noix et de ces périlleux privilèges ! J’étais confortable, douillette, en les liesses abrutissants de mon ignorance. Je me complaisais à voguer sur le long fleuve tranquille de mon existence. Savoir ce que le reste du monde ignore, au final, c’est une perdition qui atomise directe tes intuitions et bien évidemment que c’est Bagdad après tout ça !
Ce terrier de lapin dans lequel je me suis fourré stupidement prend des allures de roller coaster infernal et impossible. À ce rythme, j’vais finir enguirlandée dans une camisole de force et séquestrée dans une chambre capitonnée ; m’imaginant prendre le thé en compagnie de nos amis les Ewoks et cloîtrée dans un décor à la isla bonita. Encore ce dénouement à cette sale histoire magique serait une compassassions salvatrice, à l’opposée de celui qui présentement se déroule dans le flou théâtre de cette nuit. Incapable, noyée dans un bassin d’huile et champ de cotons, lovée contre la carrure d’une sangsue sanguinaire, des mes dextres malhabiles et moites apposées sur son sternum, j’essaie en vain de repousser les murs de sa geôle qui sur moi se referment. Les volutes de sa respiration boréale dansant sur la carne de mon cou et déchaînant sur l’échine une chair de poule tout à fait défrisante. Le voile de l’ivrognerie s’étiole et c’est l’enclume d’une réalité bécasse qui lourdement s’écroule en les inter-cistes de mon esprit abîmé. Depuis quand est-ce que ma vie est devenu un tel foutoir ?! Comment j’suis atterrie là dans les bras de ce prédateur déguisé en Dracula ?
Et d’où peut sortir cette voix de Van Helsing efféminée et totalement resurgit là in extremis dans la gorge de cette ruelle crade ? Dans l’absurdité de cette intrusion inespérée, y’a ce petit moment complice et hors d’haleine où avec mon bourreau nous nous échangeons un « WTF » tout à fait légitime du regard alors qu’en parfait synchronisme lui il tourne la tête et moi j’incline la mienne pour venir reluquer ce mirage d’outre-ville qui flotte et visiblement cherche à produire son effet va-va-voom autre part. Comment expliquer l’inutilité de ce presque sauvetage ? La seule métaphore qui me vient à l’esprit est celle de cette fusée éclairante qu’on aurait balancé en le en plein mille d’un soleil de plomb pour bien évidemment pas réussir à capter l’attention de l’hélicoptère qui déjà bien loin faisait tournoyer ces « tac-tac-tac » en le céleste azuré.
Une moue ostentatoire me constipe la gueule alors que bien haut mon sourcil s’arque. Vraiment ? Je crève, (y’a visiblement pas d’autre option à ce dénouement de mierda) et elle me ressuscite ? Comment ? Elle a une trousse de premier soin à quelque part dans ces apparats de femme ? Elle a le charme du prince charmant qui d’un bisou de la vie réveille la belle endormie ? Franchement, ce mystère, je ne suis pas pressée ou convaincue de vouloir le percer. C’est peut-être pourquoi est-ce que mes menottes lestement grimpent sur le puissant poitrail, pour venir agripper les robustes épaules et dans la même foulée envoyer valser l’une de mes rotules en le service trois pièce de mon Batman saboté et heureusement pour moi toujours distrait sur l’étrangeté de cette intrusion. Touchdown ! Égale à ces piñatas éventrés à grands coup de batte de baseball, les burnes de Dracula explosent dans le froc et lui coupe le sifflet. Et pendant qu’il se voûte de douleur, je me tortille tel un vermisseau pour me dégager et libérer de son emprise. D’une foulée de gazelle estropiée, je rafle le niveau de la fuyarde en lui beuglant ce qui peut ressembler à :
- Et si tu te contentais solamente de me ramener sur le trottoir et sa claridad rassurante ?
Du sarcasme involontaire, sentant une poigne sauvage et brutale m’agripper le cuir-chevelu et sitôt vouloir me ramener la carcasse sur l’arrière. Le minois tiré vers les cieux sans astres, crâne propulsé derrière, c’est à l’aveugle que je lève le bras et que ma menotte vient saisir ce qui s’apparente à un poignet… ou avant-bras… ou biceps… bref… une fraction de membre s’apparentant à la branche de cette même famille. Fataliste, je l’entraine avec moi dans ce serpentin qui ironiquement peut prendre des allures de la chaîne alimentaire alors que le fou furieux aux burnes atomisées derrière nous se gausse déjà de sa brochette :
- T’avais raison, ma jolie : à deux c’est mieux !
D’où il trouve cela amusant de jouer sur les mots ?! Une question qui jamais ne trouvera de réponse, lorsque plein de vilenie et gaucherie il se débarrasse de ma tignasse pour d’un pas latéral me propulser et m’encastrer échine la première contre la tôle d’une benne à ordure… ma main toujours moulée contre le biceps-avant-bras-poignet de la lourdaude ; elle n’a d’autre choix que de suivre le vol plané et d’aller s’engouffrer en le vide ordure d’une monticule de sacs poubelles.
nothing's gonna change my world
Isaure
MESSAGES : 44 BARGE DEPUIS : 24/02/2021 ROYAUME : RevealDown; terre-mère tant convoitée.
Sujet: Re: supersonic overdrive. (ISAURE) Sam 22 Mai 2021 - 4:18
“All I ever wanted was the world.” &Et merde ! Je me le répète encore, encore, encore une fois, enc... non, à court sûr la blague serait trop longue. Pourtant, la gueule effarée et l'œil hagard, je n'amorce pas le moindre sourcillement. La sangsue - malgré mon interruption saugrenue - ne semble plus stupéfait par ma présence ô combien menaçante ! Faut dire que la totalité de mon corps trémule d'une frousse manifeste. Quel ange gardien ! Sûr que cela en ferait se gausser plus d'un. D'ailleurs, je me hasarde à lever le naseau vers le ciel d'un noir profond. Si mes lippes n'esquissent pas même l'ombre d'une syllabe, silencieusement, c'est à Eux que je m'adresse, à travers les pourtours d'une litanie céleste mais ridicule. Evidemment qu'ils ne se précipiteront pas pour me tendre ne serait-ce qu'une phalange. Peut-être l'ai-je bien cherché. Peut-être. Seulement, la Jouvencelle en détresse, Elle, n'a rien demandé. Du moins, Elle n'a pas mérité cet héritage franchement farfelu à savoir: un cerbère aussi redoutable qu'un pékinois, le courage planqué au fond du cul, là où personne ne pourrait se risquer à venir le chercher. A croire qu'Ils n'ont pas tout-à-fait tort: je ne suis bonne qu'à traîner ces ailes trop grandes pour moi dans le stupre et la boue. Pas besoin d'une imagination débordante pour que je ne m'imagine la tronche désarçonnée de mes géniteurs. Ils n'ont jamais su quoi faire de ma peau. Et maintenant, ils n'en seraient que plus éberlués. Je songe à fuir, un instant seulement. Gagner des contrées inconnues où l'on ne viendrait pas me sonder. Mais la Princesse s'ébat d'une fougue détonante, m'arrachant un hoquet réjouit:
« - Quelle fougue, que je lui beugle alors, j'a-dore !
Gonflant dès lors le poitrail d'une ardeur toute bidon, je m'agite d'un caquètement à la fois fébrile et goguenard. Qui l'aurait cru ? Voilà qu'une Lara Croft s'éveille des profondeurs de la trombine mutine de ma Protégée. Je lui claque une bonne vieille frappe sur l'échine, mimant l'attitude tout-à-fait charmante d'un gros beauf à l'hilarité grasse d'un alcool encore tonitruant entre les alvéoles. Je m'apprête à ajouter une tirade profondément intelligente, quand son regard se dérobe au mien, attiré par l'obscurité cuisante de cette ruelle malfamée. V'là que la Sangsue s'éveille de ses douleurs intimes, la rage au bide. Merde. Encore, oui, je sais. Pas le temps d'intercepter la suite. Malgré moi je me vautre dans ce pêle-mêle de membres et de plaintes, projetée quelques mètres plus loin dans un joyeux vacarme de tôles froissées. Eurk ! Ca sent la vieille banane et le jus de chaussette ! Etourdie, il me faut quelques secondes supplémentaires pour capter la scène précédente. Pour cause, je brandis mon avant-bras toujours captif à hauteur de mes prunelles qui, elles, tournent inlassablement dans leur orbite. Je crois que je vais dégueuler mon estomac. L'absinthe aussi fait un tour de force dans mon organisme lessivé. D'ailleurs, je suis sûre d'apercevoir la silhouette hésitante d'une constellation juste sous mon nez. Une étoile, deux étoiles... Un rugissement sinistre me claque le myocarde, et je me fais violence pour récupérer le fil de toute cette panade.
- Merde, que je jure cette fois haut-et-fort.
Je rassemble alors ma vieille carcasse en un seul morceau, me propulsant sur mes guibolles incertaines pour m'enquérir d'une poubelle corrodée par les hivers éprouvants. Eprise d'un élan courroucé, je moleste son crâne de toutes mes tripes. L'impact de la ferraille contre l'ossature résonne en un craquement écœurant, me dérobant une moue franchement rebutée.
- Lève-toi !, que je siffle en la traînant sans ménagement à ma suite.
J'ignore combien de temps nous détallons après cela. Ce n'est que sur le parvis d'une vieille chapelle - comme si cela suffirait à repousser notre assaillant -, que je me voûte, le palpitant aux abois et le souffle court.
- Ca va ?, que je lui demande après quelques longues inspirations, l'index pointé en direction de son arcade meurtrie, il faut soigner ça. »
Espérons que les effluves de sang n'attirent pas notre ami par ici... Espérons.