Sa rapidité est déconcertante, presque surnaturelle. Pourtant, tu la sais bien humaine. Elle enchaîne les attaques sans te laisser le moindre répit, bouffée par cette rage au ventre qui ne la quitte jamais. Cette colère qui la dévore menace de te submerger à chaque nouvel assaut de la blondinette mais tu prends sur toi. Concentré sur cette boule de haine qui enfle dans ton estomac, tu baisses ta garde et elle en profite pour te faucher au niveau des jambes. D'un seul coup, tu te sens partir en arrière et tu t'étales de tout ton long sur le sol. Le souffle coupé, tu restes à terre, ton regard rivé vers le plafond. Très vite, tu vois une tête blonde se pencher vers toi, une moue déçue déformant son visage angélique.
— Tu n'as fait que parer mes attaques, qu'elle t'accuses.
Tu soupirs, partagé entre l'envie de rire et celle de l'étrangler. Tu optes pour la première option, sachant pertinemment que tes envies de meurtres ne sont pas les tiennes.
— Crois-moi, c'était déjà bien assez.
— Bien assez insuffisant, tu veux dire. Tu feras comment le jour où tu sera amené à te battre pour sauver ta carcasse de géant? Tu secouera ta crinière de licorne?Elle module sa voix pour y insuffler de la moquerie teintée de condescendance, sauf que toi, tu vois au-delà. Derrière cette attitude désinvolte se cache une inquiétude réelle pour toi. Tu déplores la violence, elle le sait pertinemment sans pour autant abandonner l'idée de faire de toi un guerrier.
— Un truc te déplaît avec cette méthode? Ton sourire atteint ses défenses. Le coin de ses lèvres frémissent jusqu'à s'étirer discrètement en coin. Tu choisis ce moment pour tendre ta main vers elle et Roxane la saisit, t'aidant à te relever. Tu aimerai bien lui demander pourquoi elle est si chiffonnée depuis ce matin, toutefois, tu t'abstiens. Comme à chaque fois, ou presque, elle ira se murer dans un mutisme hostile avant de te laisser en plan. Alors tu vous épargnes un tel débâcle en la prenant dans tes bras. La surprise raidit son corps mais très vite, elle se laisse aller, posant ses mains dans ton dos.
— Tu pues, qu'elle murmure.
— Toi aussi, p'tite tête. Malgré vos relents de transpiration suite à vos heures d'entraînement dans la salle prévue à cet effet au sein de l'agence, vous restez ainsi un temps indéterminé. Jusqu'à ce que vous entendiez la démarche rapide et assuré d'Elkan venir droit vers vous. Il n'en faut pas plus pour que la blonde se décolle de ta carcasse de gros nounours. L'envie de la charrier t'es coupée lorsque tu vois le viking à l'embrasure de la porte darder ses prunelles limpides droit vers toi.
— J'ai une nouvelle qui ne va pas te plaire. * * *
Les archives de l'agence comptent plusieurs affaires non résolues mais tu ne saurai dire pourquoi, des cas te marquent plus que d'autres. Comme si la violence de certains actes parvenaient à percer tes os à la lecture des rapports.
— Je suis à la morgue et Linda confirme, il s'agit bien du même mode opératoire, t'informe Roxane par téléphone.
— Un copycat, que tu souffles en t'éloignant d'un petit sentier pour t'enfoncer à travers la forêt.
La lune est pleine dans le ciel nocturne mais ses rayons peinent à traverser les feuillages des arbres qui t'entourent. Plus tu t'éloignes de ce sentier et plus ton parcours s'obscurcit. Cela ne t'empêche pas d'avancer, persuadé d'emprunter le bon chemin.
— T'es certain de ne pas vouloir de moi?
— Non ça va aller. Je te rappel plus tard.
— Dans une heure, si je n'ai pas de nouvelles, je viens te chercher.
— Okay.Tu raccroches et te concentre. La peur s'imprime dans ta chair. Tu entends des hurlements se jouer à l'intérieur de ton crâne. Une violence incroyable qui te cloue un instant sur place. Des pleurs. Des regrets. Tu n'as plus aucun doute, c'est ici que le meurtre a eu lieu.
Tu perçois quelque chose de plus insidieux et déstabilisant. Tu jubiles et savoures. Le désespoir te gonfle le cœur d'une euphorie affligeante. Quelque chose cloche. Mais quoi?