Make believe I'm everywhere. Given in the light. Written on the pages. Is the answer to a never ending story. Reach the stars. Fly a fantasy. Dream a dream. And what you see will be. Rhymes that keep their secrets. Will unfold behind the clouds. And there upon a rainbow. Is the answer to a never ending story.

D’une allure pressée, pas particulièrement alarmée,  pas particulièrement précipitée… damn… juste… pressée ; je traverse la rue, les diaphanes anesthésiées glissant sur les façades des commerces et leurs baies vitrées -pour certaines- barricadées/condamnées. J’ai beau détesté comme un malade cette ville de merde, j’dois avouer que RevealDown perd son charme d’autrefois. C’est dingue ! Un an à peine que je suis parti et c’est comme si nous l’avions rasé pour en faire un décor digne de la Guerre des Mondes. Comble de cocasserie, ma chouette ; dans le contre-jour, au milieu de la chaussée, tout croulant assit sur son cheval rachitique, un vieux cow-boy passe en jouant de l’harmonica ; hymne bizarre qui tremble dans l’air salé et bouillant et qui rebondit sur les murs tagués avec le spleen d’un désespoir incurable. Comme si toute la lourdeur du monde pesait sur l’échine de la pauvre bête écumante, les sabots du grand dada martèlent le bitume à la fatalité d’une sentence. Ivre de dépaysement, je gagne le trottoir, paluches de panda ronchon bien fourrés en les poches de mon sweat’ imbibé de sueur, je volte et face sur ce drôle de mirage qui lentement et doucement se dissous vers le resplendissant couchant.  

… ça fait très western et Tombstone comme vision.
Et je constate alors que c’est la première âme que je croise dans les rues… Un fucking cow-boy… en RevealDown. C’est glauque. Sinistre. Ostentatoire.

Pas normal.

• • •

Ne mesurant absolument pas l’étendu de ma connerie, je me suis laissé emporté aux quatre vents… flânant un peu ici… un peu là-bas… Oh, et pourquoi pas part là ?! Drago, dans les couloirs d’Hogwarts. Boromir, dans les rues de la Citée Blanche. Kovu, et son illustre « trahison, déception ». Paria. Traîne-misère. Hère. Lâche. Exilé. À mon front s’imprime le sceau de l’Outsider et comme le statut l’exige bah j’ai la pétoche de rentrer chez-moi… de retrouver les miens. J’ai pas de couilles. Bordel, que j’ai pas de couilles. La honte est une connasse de tenace, ma chouette.

Adossé contre la brique d’un mur quelconque, un zéphire de découragement érafle la barrière de mes lippes, formant pas volute un amas de fumée ; la journée est sur le déclin et le mercure aussi. À force de perdre mon temps, j’ai perdu la notion du temps. Quelle ironie. Découragé, je me passe une main sur la figure, roule les larges épaules pour réajuster mon hood’ qui me colle à la peau comme de la cellophane et renifle un bon coup. Puisque dormir en spooning avec le clodo de la ruelle d’à côté n’est qu’en désespoir de cause chose envisageable, en l’épais brouillard de mon esprit se calque et se profile ZHE songe. Je n’ai nulle part où aller et zoner dans les rues de RevealDown la nuit, j’sais pas, je le sens pas… c’est comme si je m’enduisais les pectoraux de sauce Teriyaki et que j’allais ensuite crécher dans la cave d’Hannibal Lecter. Tu vois le genre, ma chouette ? Ce n’est pas une bonne idée. Ce n’est pas… safe.

Encore ce feeling de n’être en sécurité nulle part.
C’est bizarre. Pas normal. Mais qu’est-ce qui se trame ici, putain !?
GIVE ME A SIGN, FOR HEAVEN'S SAKE !

Derek & Skylar

« I am always surprised to discover that when the world seems darkest, there exists the great opportunity for light. » Brigid Kemmerer

Cette fois ci, il était foutu. Skylar Micelli avait survécu à bien des choses dans sa vie, mais cette fois-ci, embroché depuis le bas gauche du ventre jusqu'à l'épaule droite, doucement en train de rôtir au dessus d'un feu pendant qu'une horde de démons mettaient à sac sa maison et son terrain, il n'avait aucune chance de s'en sortir. Personne n'avait osé lui venir en aide, alors qu'il avait hurlé à s'en déchirer les cordes vocales tandis qu'il se faisait presque minutieusement transpercer de part en part. Personne n'était venu, et personne ne viendrait.
Il aurait pu éviter ça. Éviter d'être là. Depuis que les vibrations cinétiques spiroïdales se sont heurté aux couches du continuum atmosphérique il y a un an ( en bref, depuis qu'Amara a déclaré la fin des deux mondes ), les pouvoirs du petit bouclé s'étaient manifestés avec plus de force et de manière récurrente, à l'instar d'un système immunitaire répondant à une attaque.
Autrement dit, non seulement Skylar avait vu l'attaque avant qu'elle ne se produise, mais il aurait en plus eut largement le temps de se sauver.

Il avait appelé, appelé et appelé encore la seule personne qui l'ait toujours protégé cette dernière année, sans réponse.
L'inéluctable approchait, sa maison serait torpillée, saccagée, tout ce à quoi il tenait, tout ses souvenirs seraient brisés, arrachés, brûlés. Il ne voulait pas perdre sa maison ! Comment déplacer une maison ? On ne peut pas.
En fait si, on peut.
En théorie.
Le petit brun avait perdu une heure à tenter de concevoir des plans pour déplacer sa maison. De ce genre de plan qui ne fonctionne que dans un absolu des plus théoriques, ou dans les comptes de fée.
Lorsqu'enfin il s'était décidé à renoncer au projet, il s'était assit, impuissant, dans son canapé, à regarder autour de lui. Quoi prendre ? Quoi sauver ? Et d'ailleurs, pourquoi prioriser un objet à un autre ?
Skylar avait alors commencé à entasser des objets les uns après les autres, au point de pratiquement vider la moitié des pièces au beau milieu de son salon. Il avait ensuite tenté de tout mettre dans des valises, façon Marie Kondo, mais force était de constater qu'il n'avait pas suffisamment de valises pour tout transporter.
Résultant quoi le petit brun avait bel et bien fini par sortir de la maison... pour y revenir avec la plus grande valise qu'il avait pu trouver en magasin. Et qui, au passage, n'était toujours pas suffisante pour contenir ne serait-ce qu'un quart de la maison.
Et c'est ainsi que, désespéré, se sentant abandonné par la seule personne qui avait été là pour lui chaque jour depuis un an, effrayé à l'idée de perdre les souvenirs et les odeurs de feu son grand-père de coeur, de perdre ses repères et le seul endroit sur terre où il était supposé pouvoir se sentir en sécurité en toute circonstance ( car après tout, si on ne peut plus se sentir protéger chez soi, que devient-on ? ) que Skylar s'était lui-même prit au piège. Lorsque les démons firent irruption dans la résidence, le petit brun était parti se cacher dans le meuble sous son évier. Il n'avait pas tardé à être découvert, malmené et maltraité par ces démons qui, sans être les esprits les plus affutés de l'Enfer, conservaient un sens indéniable de la torture et s'amusèrent avec Skylar comme un chat pourtant bien nourrit s'amuse avec un oiseau ou une souris.

Cette fois ci, il était foutu. Skylar Micelli avait survécu à bien des choses dans sa vie, mais cette fois-ci, embroché depuis le bas gauche du ventre jusqu'à l'épaule droite, doucement en train de rôtir au dessus d'un feu pendant qu'une horde de démons mettaient à sac sa maison et son terrain, il n'avait aucune chance de s'en sortir.
Sauf si, peut-être...
-Héééééé, souffla le malheureux d'une voix éraillée, à peine audible, entre deux moments d'inconscience. A l'... à l'... à...
Des larmes roulèrent à nouveau sur son visage. Respirer faisait atrocement mal. Pleurer faisait atrocement mal. La fumée brûlante du feu, proche, si proche de sa peau, faisait atrocement mal.
-Pit... P...
Emporté par la douleur décuplée par ses sanglots, il sombra à nouveau dans une semi inconscience. Juste assez pour se croire dans un mauvais rêve, juste assez pour avoir douloureusement conscience que c'était bien réel.
Pourquoi la mort faisait-elle si mal ?

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GIVE ME A SIGN, FOR HEAVEN'S SAKE !

-Héééééé

Les omoplates toujours pressées contre la façade d’un bungalow quelconque, mes sombres et fins sourcils bien serrés se tricotent en-dessous de mon front qui lui se dresse sur l’horizon. J’suis pas fou, right ? Y’a un truc. Ou du moins un truc a couiné un son ! C’est subtil, mais palpable. C’est inaudible, mais identifiable. Un peu comme le QI de mon frère, maintenant que j’y pense. Curieux, interloqué, je me redresse sur les guiboles et me rapproche du trottoir. Oreille tendue vers aucun endroit précis, mais à l’affut du moindre bruit.

-A l'... à l'... à...

AH ! Je le savais ! Y’a un truc… ou du moins un truc a couiné un son. À ce niveau, cela pourrait être n’importe quoi. Une bestiole, un môme qui joue dans le jardin, quelqu’un qui regarde un film et j’en passe. Dans ces rues désertiques, dans ce calme étrangement plat qui règne en sultan tout autour, j’ai de quoi m’émoustiller la barbe au moindre bruit. N’est-ce pas, ma chouette ? C’est rassurant, de songer qu’il a y âme qui vive. Et c’est un peu pathétique de se dire que je suis prêt à me précipiter vers ce son, parce que la sérénité alentour me fout la pétoche et que la solitude après ma petite virée de l’an dernier me sied plus très bien l’état d’esprit. UGH ! Je dois me faire une raison, ne pas embêter les gens et simplement poursuivre mon chemin comme si tout cela roulait sur le dos d’un canard. Ragaillardi par cette sage réflexion, mains fourrées dans les poches de mon hood’, j’opine du chef et emboîte le pas pour quitter ce quartier résidentiel de malheur…

-Pit... P...

- Ana… ANARCHIE ! Bawawawa ! Ana… ANARCHIE !

Comme si la bobine du film de ma vie était passée au mode rewind, mon corps effectue les mêmes gestes, mais à l’envers et c’est de retour à la case départ sur le trottoir. L’échine tendue comme la corde d’un piano, mes scrupuleux cobalts flamboyants sondent les périphéries avec l’intention délibérée cette fois d’enfin trouver l’origine de cette maudite aiguille cachée dans sa satanée botte de foin !  Que je reconnais cette voix crétine et le slogan ambigu qui l’accompagne.  J’m’y suis frotté et piqué cette après midi. Les savoirs déboulés en ville, ça n’augure absolument rien de bon. Tu sens ma chouette qu’ils ne sont pas là pour profiter de nos petits trésors du territoire ou faire du tourisme… Comme au Drive In, comme le propriétaire du Drive In, comme ma bagnole louée carbonisée dans le stationnement du Drive In ; tout ce qu’ils touchent, ça finit indubitablement troué comme un fromage gruyère ou replié sur soi-même comme un pauvre sushi. BREF ! J’dois leur mettre la main dessus, nous avons comme qui dirait une unfinished business.

J’te sauve du temps de lecture, ma chouette. J’ai pas besoin de t’expliquer ce que j’ai fait ou pas fait pour me retrouver ici la carcasse encastrée dans cette scène des plus WTF. Sérieux, ces agents du Chaos sont issus de la pire tourmente. J’ignore à quoi ils carburent (obviously la chair humaine grillé à point), mais ça leur bousille les neurones et pas qu’un peu ! Une vie humaine embroché comme un gigantesque méchoui penchant dans la balance, j’peux pas avoir recourt à mon pouvoir de radioactivité ou sinon aussi bien achever ce pauvre gars d’une balle entre les deux yeux. J’vais devoir y aller à la bonne franquette et à la bonne vieille méthode : du fourreau de mes reins j’extirpe mon 9mm et le déclic du cran de sûreté que je viens de retirer annonce dans l’assemblé générale mon arrivée. Les frisants du barbec tournent tour à tour un visage ingénue vers ces deux opalines voilées qui me servent de mirettes :

- Ana---
Bang !
- Rrrrrch---
Bang !
- Iiiiiiiie---
Bang !

Sérieux, reproduire cet effet domino avec autant de justesse et précision serait impossible ! C’est l’genre de coup de chance qui ne se produit qu’une seule fois dans une vie et vous venez d’y assister ! Fier de mon exploit, je contemple mes coups mortels encastrés en les troisième œils de ces crapules et j’me dis que l’armée c’est comme la bicyclette aka inoubliable. Le canon fumant retrouve sa planque entre la ganse de mon pantalon et mes reins ; tel l'anti héro que je suis viens enfin prêter mains fortes à notre malheureux jouvenceaux.

À l’odeur répulsive de la chair et duvets grillés, on comprend qu’il est mal en point et qu’il était sur le seuil de rencontrer le même sort que Freddy Krueger ; mort brûlé vif. J’attrape le boyau d’arrosage qui par un heureux hasard traînait là tout près, d’un puissant jet d’eau amoindri, éteint, étouffe et tue la valse des flammes rutilantes. J’espère que le pauvre gars n’est pas asthmatique parce que j’suis en train de l’enfumer comme le van fluo flashy d’un hippie.

Désembrocher un méchoui grandeur nature, ma chouette, surtout lorsqu’on est seul à le faire, ça ne se fait pas simple comme bonjour alors il faut y aller étape par étape si tu ne veux pas échapper le rôtie dans les braises adentes du feu de camp que tu viens d’éteindre. À petits trots, je m’acharne à la partie inférieure de la brochette, la retire de son socle et viens déposer la pointe sur la pelouse. Je libère les chevilles de ses entraves, avec le sens gravitationnel le corps du malheureux ligoté commençant déjà à glisser sur la barre de fer et m’empressant dans ma besogne pour ne pas lui casser la figure :

- Tu devrais être bon pour retomber sur tes deux pattes pendant que je m’occupe de l’autre côté.

Un songe énoncé à haute voix… ça m’arrive souvent, ces temps-ci. Hum. Toujours aussi coincé dans l’urgence de la situation, je décroche l’autre extrémité de la longue tige et profitant que le gus frisé soit encore capable de tenir debout sur ses guiboles je la dresse jusqu’à la verticale pour tenter de dénouer les cordes enroulées autour de la cage thoracique.

- Putain… les nœuds son serrés de ouf ! J’y arrive pas ! que je tempère, peste et injure…

Pour finalement déclarer forfait et me contenter de retirer la pole en la faisant glisser entre l’échine et les robustes cordes.

- T’aurais de quoi couper tes liens ? Après on pourra soigner tes brûlures.

De l’aloès médicinal. Vite… il nous faut de l’aloès médicinal !

Derek & Skylar

« I am always surprised to discover that when the world seems darkest, there exists the great opportunity for light. » Brigid Kemmerer

Ce n'est que lorsque l'on est blessé ( ou... attaché à une broche et en train de rôtir au dessus d'un feu ) que l'on réalise que tout, absolument tout dans le corps est relié. Actuellement, bouger un simple orteil provoquait chez Skylar des vagues de douleur insurmontables. Que fait-on lorsque quelque chose d'aussi primitif et essentiel que respirer provoque d'atroces souffrances ? Expirer faisait moins mal qu'inspirer, et l'astrophysicien se retrouvait à essayer d'expirer plus d'air qu'il ne parvenait déjà à en inspirer.
Et on ne s'en rend pas nécessairement compte au quotidien, mais la simple action d'utiliser sa voix pour parler sollicite bien plus d'éléments dans le corps que les simples cordes vocales. Or Skylar avait déjà essayé de parler à voix haute pour signaler son état... et il n'était pas près de recommencer.
Par miracle, quelqu'un l'avait entendu et venait d'apparaître dans son champ de vision. Mais pour la première fois depuis de très longues années, l'arrivée fortuite d'un potentiel sauveur ne réveilla pas en Skylar la bouffée d'espoir qui l'aurait habituellement envahit. Peut-être était-ce la douleur. Peut-être était-ce la faiblesse. Peut-être était-ce cette intime conviction que, quoi qu'il advienne, il allait mourir.
-Aidez moi, chuchota-t-il.
Et peut-être y avait-il encore un peu d'espoir malgré tout.
Chuchoter sollicitait tout autant le corps. Et faisait tout aussi mal, si ce n'est plus, contre toute attente. Il y eut plusieurs coups de feu, plus effrayants les uns que les autres, et qui firent sursauter le brûlé, donnant d'un point de vue extérieur la dérangeante vision d'un mollusque qui se contorsionnerait sur un pic.
Après avoir abattu les démons responsables du carnage, son Sauveur attrapa le tuyau d'arrosage et aspergea copieusement les flammes... et le malheureux petit brun.
Si même un courant d'air était une torture en ce moment même, un jet d'eau donnait la sensation qu'un millier de lames venaient lui déchirer la peau. Il voulait que ça s'arrête. Que tout s'arrête. La peur, la douleur, le sentiment d'abandon et de solitude. Le désespoir.
Le sauveur de Skylar entreprit ensuite de le détacher de son bûcher, et parvint même à déposer au sol la partie de la broche où se trouvaient les pieds du petit brun, si bien que ce dernier glissa tout du long jusqu'à ce que ses pieds touchent le sol. Et, incapable de tenir sur ses jambes, ce dernier finit pratiquement à genoux, retenu uniquement par ses mains comme un pantin désarticulé.
-Tu devrais être bon pour retomber sur tes deux pattes pendant que je m’occupe de l’autre côté.
Il rigole, pas vrai ? Tenir debout n'était plus qu'un lointain concept relevant pratiquement de la théorie du complot.
L'homme continua sa besogne tant bien que mal. Skylar, de son côté, n'était largement plus en mesure de savoir ce qui était vrai et ce qui était faux. Un instant il se sentait être bouger et avait envie de vomir, l'instant suivant il se retrouvait dans une situation floue où il parlait avec Dieu-sait-qui à propos de Dieu-sait-quoi. Mais ça n'avait pas d'importance, tant que dans ce demi sommeil, il n'avait pas mal. Son estomac le dérangeait toujours, mais la douleur passait. Jusqu'à ce qu'elle revienne, bien sûr.
-T’aurais de quoi couper tes liens ? Après on pourra soigner tes brûlures.
« Est-ce que vous me comprenez ? » signa alors Skylar en langue des signes.
C'était la seule option qui lui restait. Un ASL approximatif, puisqu'il était hors de question actuellement de pouvoir bouger sans hurler à la mort. Il pourrait épeler les mots qui demanderaient trop d'action avec ses bras. Il pourrait... il pourrait. Mais seulement si...
« Est-ce que vous me comprenez ? » signa-t-il à nouveau, le regard implorant.
Mais il semblait plutôt évident que son sauveur ne le comprenez pas. Au mieux, il avait comprit le signe qui le désignait lui, et celui qui désignait le pauvre Skylar. Mais le signe pour comprendre n'était très ironiquement pas... comprit. Désespéré, se sentant particulièrement seul, le petit brun fondit en larmes et se retrouva prit au piège dans un cercle vicieux : il pleurait de désespoir, la douleur se manifestait encore plus - si cela était possible - dans sa gorge à cause de tout ce qu'il avait hurlé et sur sa peau couverte de cloques, le conduisant à émettre de nouveaux gargouillis de douleur et à pleurer plus encore...
Pleurer à cause de la douleur, avoir atrocement mal à cause des pleurs...
Ironie, quand tu nous tiens...
Skylar se surprit à penser qu'il avait de la chance de ne pas être un homard. Il avait découvert un jour que les homards, les écrevisses, bon nombre de crustacés à vrai dire, n'avaient pas dans leur corps cette même possibilité que l'être humain à s'évanouir de douleur. En cela leur corps ne les protégeaient pas, si bien que ces homards, ces écrevisses et ces crustacés en tout genre souffraient jusqu'à leur mort dans l'eau bouillante.
D'horreur à ce souvenir qui l'avait déjà traumatisé à l'époque et de douleur, Skylar sombra à nouveau dans l'inconscience.

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Comment ? Pardon ? Plait-il ?!?! Bien serrés mes sourcils se tricotent et j’ai beau disséquer ses gestes dans tous les sens praticables ; j’pige que dalle de ce que peut bien me mimer le malheureux jouvenceau. Apprêté à mon sauvetage, bien creux emmitouflé dans mon blason d’or de celui qui a le cœur vaillant et le noble courage de tous les chevaliers de la table ronde, je termine de déficeler les liens du méchoui humain avec cet éclat de verre retrouvé parterre… et d’un certain point de vu ces frénétiques mouvements de poignets esquissés de mes sauveuses paluches pourraient comme qui dirait porter à confusion. NAON ! je m’autorise pas une petite pause branlette, peu importe qui est témoin de ce qui est en train de se passer ici-dedans :

- Conserves ton énergie, bonhomme ! Tu vas en avoir besoin parce que sino---

Même pas le temps de terminer ma phrase, de lever deux poings victorieux en l’air parce que je viens de délivrer l’embroché, que la carcasse inconsciente de celui-ci s’écroule aussi subitement que lourdement raide-là dans mes bras ! Rotules fléchies, les tablettes de chocolat bien contractées, je recueille ce paquet cadeau comme on se reçoit dans les bras un macchabée déchu des cieux et le souffle coupé j’acquiesce :

- Eeehhhhh meeeerrddeeeeee…

J’en fais quoi de lui maintenant ?

• • •

- Bonsoir, bonhomme ! tout sourire, je lui tends sous le pif des croissants et une bouteille d’eau repêchés on the go à la pâtisserie du coin alors que je courais les boutiques pour lui dégoter de quoi soigner/aseptiser/bander ses blessures et brûlures.

- T’es dans les vapes depuis 6 heures…

J’ai eu le temps de traîner son corps jusqu’au canapé, de constater les dégâts de sa piaule et sur lui ; plusieurs brûlures superficielles, quelques vilaines, mais il n’est pas nécessaire de l’ajouter au recensement des grands brûlés du pays et avec un bon baume (Ha ! Ha ! Ha !  Dit à voix hautes, c’est drôles : bon baume), il devrait s’en tirer pas trop mal… disons que sur le champ de bataille, j’ai soigné plus amoché que lui… faire un garrot sur la jambe explosée d’un frère d’arme ? Ça… ma chouette… c’est ce que j’appelle un véritable casse-tête… parce que tenter de retrouver un membre atomisé dans la cambrousse, c’est vraiment pas de la tarte et la plus part du temps la viande amputé a le temps de pourrir avant qu’on soit rapatrier à l’infirmerie.

- Comment tu te sens ?

Derek & Skylar

« I am always surprised to discover that when the world seems darkest, there exists the great opportunity for light. » Brigid Kemmerer

Lorsque Skylar reprit connaissance, la douleur semblait avoir disparu et il était confortablement installé sur quelque chose de moelleux. Était-il mort ? Avait-il rejoint le Paradis ? Le Paradis était-il moelleux ? Il devait sans doute l'être, c'est le Paradis après tout !
Puis il bougea, et la douleur s'abattit de nouveau sur lui comme une massue. Il grimaça et ouvrit les yeux sur son salon légèrement moins dévasté que la dernière fois qu'il y avait mit les pieds, mais qui n'en demeurait pas moins le triste témoin du passage des démons.
-Bonsoir, bonhomme ! l'accueillit une voix quelque peu bourrue, mais chaleureuse.
Pas le temps de dire ouf qu'un petit sachet en papier kraft à l'odeur réconfortante de boulangerie apparut sous son nez, suivit d'une bouteille d'eau.
Skylar ouvrit de grand yeux ébahit. A voir son expression, son Sauveur aurait aussi bien pu lui annoncer qu'il lui avait acheté la boulangerie toute entière.
-C'est... c'est pour moi ?
La question était tout à fait légitime. Après tout, on lui avait déjà mis un paquet de viennoiseries sous le nez juste pour qu'il le respire, mais pas qu'il en mange ! Le principe en lui-même dépassait le champ de compréhension du petit brun, mais la possibilité n'en demeurait pas moins. Voyant son Sauveur acquiescer, Skylar le remercia copieusement avant d'ouvrir le sachet et de croquer à pleine dent un gros morceau de croissant.
-T’es dans les vapes depuis 6 heures…
Sous l'effet de surprise, Skylar avala malgré lui sans mâché. Vous avez déjà eu cette sensation d'avoir comme une pierre bloquée dans la trachée lorsque vous mangez beaucoup et trop vite ? Un blocage se crée, et ne passe ( non sans mal ) qu'avec beaucoup d'eau. Imaginez une moitié de croissant à peine mastiquée à l'intérieur du conduit... Son Sauveur était resté à ses côtés pendant six longues heures ! Volontairement ! Personne n'avait jamais fait cela pour lui ! Personne ne prenait même juste la peine de le déposer dans un chenil ! Il ne l'avait ni abandonné, ni balancé sur le bord de l'autoroute 95, il était resté et c'était la plus belle personne au monde !
-Comment tu te sens ?
-Bobo, grimaça Skylar avant d'ouvrir de grand yeux affolés. Mais ce n'est pas de ta faute !!! Non, non, non, non, vraiment, tu as tout fait ce qu'il fallait, j'ai moins bobo que quand tu m'as trouvé ! Je parle ! Tu vois ça ? J'arrivais pas à parler ! Maintenant je parle ! C'est grâce à toi si je parle ! C'est grâce à toi si je respire aussi ! Et si je mange ! Il montra le paquet de croissant pour appuyer son propos. Et si je bois ! Il lui montra la bouteille d'eau. En même temps c'est normal, tu m'as empêché de cuire, je t'ai dis merci pour ça ? Parce que vraiment, merci ! Merci merci merci merci !!! Tu es un sauveur. Mon sauveur en fait ! Je te dois tout ! Je ferais tout ce que tu veux jusqu'à la fin des temps ! Promis juré ! Mais pas craché, c'est cacaprout... Tu sauves souvent les gens ? Ça pourrait être ton métier, tu fais ça vraiment bien ! Regarde, je peux même marcher, ajouta le petit brun, tout fier d'avance, en essayant de se lever. Il glapit de douleur et retomba aussi sec sur le canapé, lui arrachant un nouveau cri. Nope, je peux pas... Mais ce n'est vraiment pas du tout de ta faute tu sais ! S'il te plaît, ne soit pas fâché, je vais faire des efforts, c'est promis ! Voilà, ça y est, il allait faire de la peine à son ange gardien parce qu'il était incapable d'être à la hauteur lui-même. C'était horrible ! Il était horrible ! Soudain très triste, le petit brun ajouta : Je te fais défection, pas vrai ? Je te fais défection... je fais défection à mon sauveur sans peur et sans reproche... Je suis horrible ! Je suis une horrible personne ! Tu m'as sauvé et moi, je te fais défection...
La tête entre les mains, au bord de la crise de larmes, Skylar se blottit au fond du canapé. Il aurait dû être capable de se lever. Il aurait dû ne plus avoir mal. Ce n'était pas grand chose, pas vrai ? Cette incroyable personne qui se tenait devant lui avait combattu des dragons et les flammes de l'Enfer pour lui sauver la vie, et lui était incapable de tourner la tête sans crier ? C'était... impensable ! Inadmissible ! Il devait guérir ! Pourquoi son corps refusait-il de guérir ? Pourquoi devait-il systématiquement décevoir toutes les personnes qu'il rencontrait ?

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