DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Un jeudi soir comme un autre. Le bar était rempli de bons ou mauvais citoyens, prêts à passer du bon temps en jouant aux fléchettes et au billard, en buvant un coup seuls ou accompagnés. Le service était assuré. Emily Reddick, la propriétaire du bar, prévoyait toujours du personnel en plus pour éviter le manque d'effectif. Un match de Basketball passait à la télévision, près du comptoir. Certains avaient les yeux vissés dessus. L'ambiance était au top ! Personne ne pouvait louper les deux gros palmiers installés à l'extérieur en façade et l'éclairage très imposant pour souligner le nom du bar : l"Alabama Bar". Il faisait officiellement concurrence au "Devil's Tail". De nombreux habitués se ruaient chaque soir pour passer un instant dans cet endroit où presque tout était permis. Em' surveillait tout, même un peu alcoolisée, elle arrivait à gérer les conflits. Avec sa force hors norme, elle se permettait de jouer les vigiles. Elle arrêtait les bagarres pour une question de sécurité. Alors, qui pouvait craindre un événement tragique dans ce bar ? Personne.

Présentement, Red venait de faire un peu de comptabilité. Au bout de trois quarts d'heure, elle abandonnait déjà. Le bar faisait du bon chiffre d'affaire. La belle n'avait pas à se plaindre. Elle choisissait de se promener un peu dans le bar pour demander des nouvelles de tout le monde. Elle connaissait pas mal de têtes. Au passage, elle emmenait un type qui allait frapper un autre type pour l'envoyer dehors. Puis, elle se dirigeait vers le comptoir pour parler à ses employés. Tout se passait bien. D'ailleurs, la brune repérait un type qu'elle appréciait beaucoup tant ils s'éclataient bien ensemble. Il s'agissait de Derek Morrow. Il était aussi paumé qu'elle et ils adoraient boire jusqu'à plus soif. Ils se parlaient depuis un peu plus de quatre ans. Ils savaient quelques points de la vie de l'un et de l'autre. Bien-sûr, ils ne demeuraient pas intrusifs. Reddick se précipitait vers son ami pour lui cacher les yeux. Elle prenait une drôle de voix :

C'est qui ?

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Une autre journée croulante sous une canicule étouffante et oppressante. Mon jumeau de frère étant absent au nid familial, j’en aie profité pour faire la lessive et un brin de ménage. N’allez pas croire que je suis un homme au foyer exemplaire, il en est bien au contraire ! Je ne savais simplement pas quoi faire de mes dix doigts et avant de compter le nombre de taches qu’il pouvait se retrouver sur nos murs, pour ensuite sombrer dans une imbécilité profonde, j’ai plutôt opté pour les nettoyer… J’ignore ce qui me rend si morose et amorphe, ce soir, mais je dois dire que j’ai la cervelle dans les rotules et le moral à zéro.

Peut-être est-ce à cause de mes retrouvailles récentes avec celle qui autrefois faisait fondre mon cœur comme un bloque de glace sous un médaillon de feu incandescent ? L’ombre de nos souvenirs errant vers la sombre clarté de nos néants les plus doux-amers fait couler mon palpitant dans le creux de ce tombeau qui lui sert de poitrine. Le vide qui me gorge est abyssal et le manque d’Elle tout aussi phénoménal. Où ai-je failli à la tâche ? Où et quand ai-je arrêté d’être un bon père et un bon mari ? Un monde qui d’un simple et fragile souffle qui s’écroule dans les océans mordorés d’un Enfer assoiffé de mort et autres misères humaines que l’Homme lui-même ne sait plus supporter tant il souffre et agonise sur les galets récalcitrants du royaume des damnés.

À défaut de ne pouvoir faire du ménage dans ma tête, j’aurais au moins donné un bon coup de chiffon à notre demeure ! Et c’est le cœur extrêmement lourd et la tête horriblement criblée que je décide qu’il en est terminé pour ce soir et qu’il est temps de broyer du noir autre part.

Je sais que mon jumeau de frère sera à outrance contrarié de ce geste désespéré qui est perçu pour lui comme la plus fâcheuse des trahisons… mais je n’ai pas envie de confronter mon reflet miroir, ce soir. Je veux partager ma disharmonie de la nuit avec un visage familier, sans toutefois outrepasser les banales civilités. Et mon sanctuaire se retrouve seulement de l’autre côté de la rue.

Comme un somnambule, je me fraie un chemin parmi les clients imbibés et infectés par les eaux de vie qui affluent dans leurs veines. La musique est plutôt supportable et l’ambiance assez bonne. Je suis un visage anonyme parmi les autres.  Et il semble que pourtant ma présence vient interpeler celle pour qui je suis ici, lorsque deux paumes de mains se posent sur les yeux et que la voix décharnée me demande ce qui instinctivement me fait sourire…

- Laisse-moi deviner. Maman Noel, c’est bien toi ? Voilà un cadeau qui arrive avant son temps !

Un partage honnête alors que je lui attrape les mains et viens lui faire face.

- Comment tu vas ?

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Emily Reddick était ravie de retrouver un bon allié. Il s'agissait de Derek Morrow. Ils se connaissaient au moins depuis quatre ans. L'Alabama Bar était ouvert depuis déjà deux années. Tous les investissements se trouvaient déjà bien remboursés car le succès du bar dépassait toutes les espérances. Em' n'avait déjà plus son mari ainsi que la garde de son fils de huit ans maintenant. Sa vie avait complètement changé. Avant de connaître Derek, la brunette avait vécu une sale période. Internée suite à la mort de son bien aimé, elle avait failli tout perdre ! Heureusement, ses beaux parents l'avaient soutenu et ils avaient repris les reines de l'existence de celle qui ne demeurait plus que l'ombre d'elle-même. Cette époque était révolue mais pas si lointaine. Derek possédait quelques informations à son actif. Il savait qu'elle était veuve et qu'elle était maman. Lui aussi se confiait parfois autour de quelques verres. L'alcool servait d'ami à ces deux âmes en perdition. D'ailleurs, la trentenaire conservait une bonne bouteille de vin dans son bureau pour partager un énième bon moment avec Morrow. Ce dernier était mille fois plus fun que son frangin. Red détestait Hunter. Il représentait un concurrent. Aussi, il avait un sale caractère. Il était insupportable, très enfantin par moment. Derek, un brin mystérieux, se présentait plus comme l'acolyte idéal. Il rencontrait plus de profondeur que Hunter. Il pouvait parler de tout et en même temps, il pouvait abandonner son sérieux, comme présentement. Emily bandait les yeux de son client préféré avec ses mains en annonçant un « c'est qui ? ». De suite, le bel homme effectuait une blague. Il entrait facilement dans le jeu de son amie.

T'es trop mignon ! Avec lui, elle osait plus afficher une certaine complicité autant dans le ton que dans les gestes. Quand il lui choisissait de lui attraper les mains et de lui faire face, elle le serrait dans ses bras. En se reculant, elle répondait à l'interrogation de son interlocuteur. Bof, je sors des calculs et toi ? Tu me suis ? Je t'ai gardé une surprise. Elle l'amenait à son bureau. Elle se doutait qu'il saurait. Il était doué pour les devinettes. Surtout, ils avaient déjà discuté de ce vieux cru dont Derek raffolait. Arrivée dans son lieu de retranchement, la belle sortait la fameuse bouteille. Tiens, pour toi, enfin pour nous. Elle prenait deux verres dans son armoire. Tu as le temps ? Red proposait à son invité de boire en sa compagnie. Elle préférait cela à toute autre activité. Morrow buvait pas mal, cela se savait, alors elle ne doutait pas de son approbation. Elle lui installait même une chaise. Quoi de beau, beau gosse ?

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

D’un œil extérieur, peut-être que ma petite sortie improvisée à l’Alabama Bar, cela peut passer pour de l’égocentrisme et un manque total de jugement à l’égard de mon frère. Après tout, il m’héberge, m’offre un boulot honnête et me fait courir la chance de recommencer ma vie. Du moins, les quelques lambeaux d’existence qu’il me reste… après l’Afghanistan. Je ne joue pas à l’autruche. Je suis au courant de la malsaine et vicieuse compétition qui règne entre Emily et Hunter. Ils sont propriétaires de deux bars en vogues en ce temps-ci de l’année. Ils s’arrachent les clients et souhaitent tous les deux épater la galerie avec des ambiances électriques dignes de faire rêver peu importe le touriste venant de très loin pour venir visiter ce petit coin de la Floride et finir la journée autour d’une bonne bière offert entre les quatre murs d’un pub à l’ambiance exaltée qui fera jaser. Et quoi de mieux comme publicité que le bouche à oreille soufflé par les lippes imbibés d’alcool des non habitués de la place ?

Je connais assez bien l’orgueil de mon jumeau. Je sais qu’il est allergique à la moindre nargue et la moindre provocation. Emily est douée pour lui lancer les piques et faire enfler l’ego de notre petit blondinet national. Comble de l’ironie de ce duo ? C’est que leurs business respectifs se retrouvent l’un face à l’autre, possédant chacun un côté du boulevard principal du centre-ville et faisant pulser le pouls de RevealDown comme aucun propriétaire de bar ne sait encore le faire. Ce qui ne fait qu’ajouter un brin de fièvre en nos chaudes soirées Floridiennes et je suis là à osciller inlassablement entre les deux tavernes, buvant un coup par-ici et un coup par-là. Pourquoi ? Parce que RevealDown, elle est propice pour ce genre d’activité. Entre les mystères, les épouvantes, au cœur de la peur provoquée par Diable sait quel licorne mal lunée et farfadet farceur, il y reste une place, creux dans l’ombre, pour l’enivrement et l’oubli des sombres tracas de nos jours excentriques. Et franchement, dans ce village plombant sous un soleil de plomb, il n’y à pas grand-chose à faire…

Du moins, c’est ce que je croyais autrefois. Loin. Loin dans l’Avant. Avant mon retour officiel et que je découvre la face cachée de nos lunes. Depuis que je suis ici, j’ai l’impression qu’une vie s’est déroulée. J’ai accumulé les erreurs, les traumatismes et les remords. Avec le crime camouflé de ce voisin barge que j’ai tué avec mon frère et le sacrifice en direct que moi et une poignée d’autres gens avons assistés… lors de notre onirique passage dans un endroit diaboliquement magique portant le nom de… de quoi, déjà ? Elvendyr ?

Trop. Trop de décès et trop de corps à voir tomber comme des mouches.
Et sur le tas, mes retrouvailles avec mon ex femme et les souvenirs qui affligent.
Étonnant que le spleen s’empare de moi ?
Non. Je l’avoue.
Rassurant qu’il existe Emily. Mon rempart. Celle qui m’empêchera peut-être de m’enfoncer plus creux encore dans cette nauséeuse spirale infernale qui m’emportera plus bas que dans la terre si je continus à la laisser me posséder.

Compétition ou pas entre mon jumeau et mon amie, ce soir, j’ai franchement besoin de retrouver ce visage familier et de panser des plaies trop profondément ouvertes. À commencer par les désinfecter avec le meilleur remède qui soit : l’Alcool.

- Ugh ! La comptabilité. Mes plus plates sympathies avec les chiffres et les nombres. Tu dois en avoir du pain sur la planche. Avec tout le peuple que je peux voir vadrouiller dans ton bar, ce soir !

Je suis sincèrement heureux que ses affaires se portent si bien. Elle le mérite. Après tout le bordel qu’elle a enduré ! À l’affirmation d’une surprise qui m’attend à son bureau, je fais mine de froncer les sourcils et de réfléchir sur quoi cela peut bien être. La vérité est que je me doute de ce que cela s’agit et me fais pas prier pour suivre Emily jusque dans son antre. En voyant la bouteille de vin, un grand cru que j’adore à m’en rendre ivre à chaque fois, un énorme sourire de gamin vient fendre la barrière de mes lèvres.

- Tu es trop gentille, mais tu as fait une folie ! Cette bouteille coûte une fortune ! Et tu es télépathe ou quoi ? Depuis le début de la semaine, que j’ai envie de savourer ce vin en bonne compagnie. Une pierre deux coups. Bien sûr que j’ai le temps !

Tout sourire, je m’approche de la femme d’affaire, tends la main pour qu’elle me passe ce produit tout droit livré d’un des vignobles les plus réputés de l’Italie et ne peux m’empêcher de la prendre dans mes bras pour lui démontrer ma gratitude. Pour ensuite venir écraser mon cul sur la chaise présenté que pour mon fessier et hausser mollement les épaules à sa question :

- Rien de nouveau. Que du vieux. M’enfin…

Mes azurs glissent un instant sur le mur situé derrière elle, hésitant à lui confier les petites crottes que j’ai sur le cœur.

- La semaine dernière, j’ai eu une crise et pas une légère… Assez sévère pour que les flics me coffrent et que ce soit ma femme… ex femme… qui vole à mon secours…

Un triste sourire illumine tout de même mes traits, tandis qu’elle s’affaire à sortir des verres de son armoire.

- Hormis le boulot, tu fais quoi de bon, ces temps-ci ? Et je t'en prie, laisse moi nous servir ces coupes. Tu t'assieds et te relaxe un peu, que j'exige, alors que je me lève et m'empare de la bouteille.

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Emily Reddick restait ravie d'apercevoir la bouille de Derek Morrow. Ils possédaient une belle complicité depuis quatre années minimum. Les deux amis rencontraient un passif assez lourd qui les poussait souvent à prendre la bouteille d'alcool pour une grande alliée. Ils ne sortaient pas de leurs problèmes. Ils pensaient s'entraider en partageant un ou deux verres. Or, ils alimentaient leur souci ensemble. Emily avait plus l'habitude de s'enfermer dans son bureau pour boire en solitaire. Contrairement à Derek, elle n'affichait pas son état. Parfois, elle n'y échappait pas mais elle évitait de se mettre une mine devant les clients. Du personnel gérait l'affaire alors elle prenait toujours l'excuse de travailler dans son antre pour se libérer d'une manière qui ne l'aidait pas du tout au final. Jamais elle ne récupérerait la garde de son fils avec un tel comportement. Le voulait-elle ? Non, elle savait qu'elle représentait un danger pour Isiah. Les trous dans le mur de son bureau attestaient de ses dépassements de limites. Alors, il valait mieux qu'elle reste seule avec le souvenir de son mari décédé au combat, cinq années plus tôt. Derek aussi noyait ses démons. Il avait vécu pas mal de déboires qu'il ne pouvait pas occulter. Les deux amis se soutenaient. Présentement, ils échangeaient quelques banalités.

Je ne suis pas à plaindre c'est certain. J'ai juste la flemme de calculer ce soir. J'ai bien avancé mais je n'ai pas terminé. Ça sera pour plus tard !

Remettre au lendemain, mauvaise idée ! Heureusement, il y avait des traces de chaque dépense et de chaque recette. Red saurait remettre les chiffres à leur place. La brunette annonçait qu'une surprise attendait Derek dans son bureau. Elle préférait être seule avec lui. Le bar était rempli de monde. Morrow arborait un air d'étonnement. Son interlocutrice souriait comme rarement. Il était drôle. Le beau gosse la suivait. Il ne craignait pas la surprise. Il devait se douter et comprendre de quoi il s'agissait. A la vue de la bouteille d'une valeur plutôt élevée, il ne dissimulait pas sa joie. Emily avait réussi à lui faire plaisir. Cela la rendait contente. Pourquoi ce présent ? Il le méritait. Il représentait un très bon ami et Red l'appréciait beaucoup.

Tu m'en as parlé et je l'ai acheté. Je t'écoute quand tu parles. Elle souriait de nouveau. Ce n'est pas une folie, je peux me le permettre tu sais et tu mérites bien ce cadeau. Il disait avoir le temps de la consommer avec elle. Cool !

La propriétaire de l'Alabama Bar offrait la bouteille de ce grand cru à son allié. Ensuite, il la serrait dans ses bras. Il paraissait reconnaissant. Emily, même alcoolisée, prenait l'habitude de retenir les goûts, les envies de ses proches. Ancienne serveuse, elle entendait chaque dire des clients. Accoutumée à cette pratique, elle ne perdait pas ce don. D'ailleurs, elle demandait des nouvelles du frère de l'exécrable Hunter. Il était installé sur un siège. Derek osait se confier, comme souvent. Ce lien demeurait exceptionnel car les barrières tombaient pour laisser place à la sincérité et l'authenticité.

Ah ouais ? Du genre ? Em' restait étonnée par la révélation effectuée par son interlocuteur. Elle a accepté de te sauver ? Tu as du prendre cher ?! Reddick compatissait. Elle choisissait ce moment pour sortir les verres de l'armoire. Derek la questionnait à son tour. Rien de space, ma vie n'est pas si animée que cela. Avec Isiah, le courant passe de moins en moins bien. Il me questionne sur … sur … tu sais qui et je n'arrive pas à lui parler. Alors, un gros fossé se creuse et j'sais pas quoi faire. Suite au conseil de l'homme divorcé, elle s'asseyait gentiment. Merci. Elle attendait la suite de l'histoire de son ami.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Il y a de ces nuits enténébrées où les corbeaux font panaches aux crânes bourrelés de pensées qui hantent comme des simulacres. Les pauvres malheureux qui demeurent à jamais oubliés aux confins des ombres maudites, leurs poitrines mises à jour et qui répandent le flux liquoreux et vermeilles de leurs cœurs larmoyants. Sanglants pour trop avoir chéri un hideux amour et s’être déchirés sur les lames tranchantes d’un trop vaste chagrin. Ainsi va et coule la rivière des ignobles damnés aux desseins abjectes. Indéfinissables que restent nos insignifiantes vies.

Emily et moi, nous sommes de ceux qui n’ont pas menés une vie facile. Nous sommes de ceux, qui en surface, il semble que tout indiffère… il ne suffirait seulement, que de gratter la fine couche de poussière qui nous terre, pour entrapercevoir combien nous sommes écorchés vifs. Écorchés vifs, pour avoir espéré. Écorchés vifs, pour avoir attendu. Écorchés vifs, pour s’être laissé berner par les illusions. Les illusions d’une vie heureuse et simple. Des erreurs accumulées et malheureusement entassées dans un coin bien précis de nos crânes. Comme pour mieux nous rappeler combien on a merdé et combien nous sommes naïfs d’espérer encore. Malgré tout. Malgré les tempêtes. Malgré les peines. Malgré les pertes. Malgré les sacrifices.

Il y a de cela quelques années, maintenant, qu’Emily et moi, nous n’avons plus besoin d’enfiler les gants blancs et de porter nos masques, lorsque par une accumulation d’un trop plein de tout, l’on s’invite à venir se retrouver, un bon soir, autour d’une bonne bouteille d’alcool, pour laisser s’évacuer nos vils chagrins qui nous rendent à ce point serviles avec la misère humaine.

Je retrouve en ce petit bout de femme, une compagne de beuverie, une précieuse amie, mais également un tendre reflet miroir.

- D’accord. D’accord. J’arrête de me la jouer faux modeste et accepte volontiers de partager ce bon vin avec toi.

N’empêche que je dois me souvenir de surveiller tout ce que je dis, en sa présence, il est vrai qu’Emily est une fine oreille et vraie éponge à renseignements. Je reste un moment la tête vautrée dans le défilement de mes pensées, observant d’un œil hagard les deux coupes de vin qui se remplissent de précieux nectar. Ce n’est qu’une fois la première remplie à moitié, que je tends la coupe de verre à la jolie brune et acquiesce à ses paroles.

- Disons qu’avec le divorce, je le prends déjà cher. De surface, comme ça, elle m’a semblé que davantage attristé qu’autre chose. Nous sommes au bout du rouleau, mais le fichu espoir que tout rentre en ordre, entre nous deux, je le garde, que je soupire, complètement découragé de mon comportement.

- Je me suis saoulé la gueule. J’ai mélangé le fort avec les pilules. Complètement éméché, je me suis rendu au jardin d’enfants où Nell et moi avions l’habitude de déposer notre petite quand nous devions bosser. Jusque-là, tout semble tristement normal, sauf qu’à ce moment-là, j’ai occulté le fait que ma petite est…

Je suis tout simplement incapable de terminer cette phrase. C’est un ultime coup de poignard dans mon cœur de père.

- En bref, complètement ivre, je voulais aller récupérer ma petite à la garderie…

Je reprends place sur la chaise et tends ma coupe pour trinquer en compagnie de mon tendre reflet miroir. Je ne peux que ressentir tout le désarroi que doit supporter la pauvre mère avec son fils.

- Aie ! Putain de deuil, uh ? En même temps, je peux comprendre l’envie du môme de vouloir en savoir plus… mais je comprends tout le mal que cela emporte de te remémorer ces souvenirs…

Avant d’apporter la coupe à mes lippes, je lui souffle, honnête :

- Tu es une bonne mère, Emily. Plus grande et plus forte que tu ne peux te l’imaginer. Tôt ou tard, il finira par s’en rendre compte…

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Les deux amis allaient partager une bonne bouteille de vin. Celle-ci possédait une grande valeur. Derek Morrow avait évoqué son amour pour ce délicieux liquide et Emily Reddick l'avait écouté. En effet, la propriétaire de l'Alabama Bar avait acheté cette bouteille pour la partager avec son allié. Ce soir, ils réalisaient cet échange. Était-ce une bonne idée ? Ils avaient tendance à trop boire. Ils se laissaient souvent déborder et ils donnaient vie à une certaine addiction. Cela ne représentait pas la solution adéquate à tous leurs problèmes. Or, ils devaient penser le contraire pour agir de la sorte. Emily se cachait souvent dans son bureau pour s'adonner à ce plaisir. Elle évitait d'être trop déchirée devant les clients pour une histoire d'image et de popularité. Parfois, elle n'arrivait pas à calmer ce besoin et elle accompagnait la clientèle. Depuis le départ soudain de son mari, elle avait adopté cette nouvelle tendance. Pour Derek, ce souci qui n'en était pas un pour lui, datait depuis plus longtemps. Il digérait mal certains éléments de son existence et la boisson devenait un réel soutien. Ce résumé demeurait un peu faible mais il semblait pourtant plein de sens.

Tu as plutôt intérêt Morrow ! Elle lui offrait une belle frappe sur l'épaule. Parfois, elle oubliait son pouvoir. Oh pardon, ça va ?

Le vin était versé dans les coupes prévues à cet effet. Em' était bien installée et prête à se détendre. Derek rencontrait la même optique. La conversation prenait forme. Derek s'exprimait sur les derniers événements qui rythmaient son existence. Son ex-femme l'avait sauvé d'une situation très gênante. Le trentenaire paraissait très découragé par son propre comportement. Il réalisait sûrement qu'il creusait un écart avec celle qu'il voulait reconquérir. Il pouvait modifier la donne. Était-il prêt ? Il commençait à ouvrir les yeux.

Attristée, au moins, la situation a eu un impact sur elle, tu ne penses pas ? Derek développait ce moment assez complexe de sa vie. Red restait un peu choquée. Pourquoi tu as fait cela ? Tu aurais pu finir aux urgences ! Elle buvait une importante gorgée de sa coupe en oubliant de trinquer pour le coup. Je comprends... tu as atterri dans cet endroit par habitude, à cause du souvenir sauf que tu ne peux pas agir de cette façon, fin'... pas dans cet état. Elle soupirait, je pige la situation, tes souvenirs sont si forts qu'ils prennent le dessus, encore plus dans un état second. Tu revis les bons moments. Après, tu passes à la réalité... c'est chaud... je te comprends. Elle pouvait le dire car cela était vrai. La brunette baissait les yeux. Elle restait très empathique en compagnie de son ami car elle l'appréciait grandement et elle savait ce qu'il éprouvait puisqu'ils ne se cachaient pas grand chose. L'instant de trinquer était arrivé. A quoi ? A une vie merdique ? Il n'y avait qu'eux pour le savoir. Reddick se confiait à son tour sur ses soucis avec son fils. Ouais... ce n'est pas top. J'sais pas quoi faire, j'y arrive pas, heureusement que je ne l'élève pas. Tu imagines ? Il deviendrait dingue ! La suite la touchait. Merci, j'suis pas une mère. Isiah ne pouvait pas s'en rendre compte, tout comme sa mère n'y parvenait pas. Alors ce vin ?

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Regardez-nous chouiner et se complaindre en ces bourbiers marécageux qui s’avèrent êtres nos chiennes de vies ! Comment est-ce que du jour au lendemain tout peut partir si facilement en vrille ? Mon plus gros vice et ma plus grosse dépendance reste par malheur bien ensevelie dans les replis rougeoyants de mon cœur. Elle est une monstrueuse imperfection. Une sombre et béante imperfection. Un défaut de fabrication - qui depuis le jour où j’ai commencé à contempler le monde avec les yeux d’un homme -, celui-ci grandit en moi comme un putain de cancer… cette chose innommable qui nécrose absolument tout et ratatine notre intérieur comme un vulgaire raisin sec. Une vérité si honteuse que je ne parviens jamais à l’affronter, mais qui en retour me confronte à la moindre seconde et inlassablement. Essayer de le cacher, ça me tue par en dedans et vouloir l’ignorer relève d’un acte purement suicidaire. Mais ces élans délétères sont pour moi quelque chose d’addictif et de grisant. Un néfaste sanctuaire et qui n’est là que par le fruit de mon imaginaire.

Et dans tout ça, si seulement je parlais de mon sale problème d’alcool. Lorsqu’Em’ me demande cette fameuse question de la mort qui tue, à savoir « pourquoi est-ce que j’ai fait ça ?» La réponse m’est si cristalline et limpide que j’ai presque envie de pleurer. Pleurer de rire. Pleurer de désespoir. Pleurer, parce que je suis complètement grillé de la toiture.

Pourquoi j’ai fait ça ?
Pourquoi…
Pourquoi…
Parce que je suis un sale con ? Non. C’est une réponse trop facile à livrer. Une belle pelletée de merde que j’engouffre aux fonds des gosiers en faisant croire que c’est du caviar. C’est plus profond et sinistre que ça. C’est du Derek Morrow tout craché. Tout simplement. Je suis accro à faire briser et s’éclater l’erratique qui agonise au creux de ma poitrine. C’est quelque chose de fondamentale et de viscérale. C’est une émotion conflictuelle qui, au travers de la douleur et de la honte, m’aide à ressentir la vie et ses grondements. Combien je m’échine dans les chaos et les funèbres distractions. Si je parviens à cacher et engourdir mes peines réelles, tout m’aide à me réveiller le matin avec un sentiment à peu près paisible. C’est un jeu malsain. Je le sais.

Em’ également le sait. Elle connait l’Ombre et chacune de ses parts. Elle connait ce sentiment horrible qu’est de se percevoir si non-entier et de se voir si vide. Des semblables qui déchirent tellement… ô mon dieu mais tellement…

- La vérité est que je ne suis non seulement perdu lorsque je suis dans un état second, mais sur tous les plans de la vie en générale. Depuis mon retour en ville, je ne sais plus où sont mes points de repaires. Tellement de choses ont changées, Em’. Ça fait peur. Vraiment. Je ne sais plus ce que je veux et ce que je voudrais.

Auto-destruction. Voilà le nom de ce foutu jeu. Et ce qu’on y gagne à la fin, c’est un prix tellement dérisoire qui nous donne envie de recommencer une nouvelle partie… encore et encore.

- Tu as déjà toutefois considéré la possibilité de l’élever et de le prendre sous ton aile ? Peut-être que c’est lui qui est là pour te sauver… et non l’effet contraire ? Que je tente de soulever comme hypothèse, de la manière la plus maladroite qui soit.

En sachant les merdes que je viens de raconter, je me presse d’approcher à coupe vers la sienne et de trouver à la vite de quoi à célébrer :

- Et si on trinquait à l’amitié et à l’espoir futur qu’on s’en sorte… tous les deux ?

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

De l'alcool et des sujets profonds : un bon mélange pour une soirée noyée dans la nostalgie ! Des êtres chers perdus et un deuil infaisable, comment aller de l'avant ? Derek et Emily ne possédaient pas les clés pour atteindre cet objectif. Pourtant, en discutant ensemble, ils essayaient de se soutenir. Cela pouvait avoir un effet bénéfique ! Ils s'offraient quelques conseils. Avec le recul sur la situation de l'autre, ils tentaient d'apporter une certaine lumière dans les zones d'ombre. Morrow venait de confier un élément plutôt embarrassant de son existence. Red cherchait à comprendre le mécanisme qui l'avait poussé à agir de la sorte. Emily s'inquiétait grandement pour son ami. Il allait de plus en plus loin notamment pour boire de plus en plus. Il se confiait. Derek était totalement perdu. Il ne savait plus où il se situait. Pourtant, il rencontrait le soutien de plusieurs personnes dont Hunter certainement. Il pouvait se raccrocher à ces êtres. Qu'est-ce qui l'empêchait de choisir cette option ? La peur ? La honte ? Pourtant, son ex-femme l'avait sauvé il y a peu de temps. L'espoir existait. Il ne devait pas baisser les bras. Pour sûr, il avait besoin d'aide, peut-être même celle d'un psychologue. Em' avait connu l'asile quelques mois avant de connaître Derek. Cette expérience traumatisante ne l'avait pas amené vers le bon chemin. Alors, elle pouvait saisir la raison, qui faisait que son allié depuis quatre années, ne faisait pas appel à ce genre de soutien.

Tu n'es pas seul Derek. Tu as Hunter. Tu m'as moi et je suis sûre que tu as un tas d'autres potes. Raccroche-toi à la base. Il ne faut pas demander l'impossible. Vas-y pas à pas. Je n'ai pas d'objectif non plus mais je me rends compte de ce que j'ai actuellement, c'est un début. Il faut survivre à l'aide de ces petites choses et le reste viendra ensuite. Conseil peut-être basique et difficile à suivre mais au moins, Derek pouvait avancer dans une direction. Reddick parlait beaucoup. Or, sa situation ne demeurait pas aussi idyllique. Elle survivait grâce à son bar, l'alcool, et peut-être son fils... . Isiah ressemblait de plus en plus à son père et cela devenait de plus en plus compliqué à gérer. Elle ne pouvait pas l'élever surtout avec un paramètre aussi dingue. Non, c'est un enfant. Il a une belle vie avec ses grands-parents. Il doit continuer dans ce sens. Je le vois quelques week-ends et c'est déjà bien. J'ai de plus en plus de mal et on ne se parle plus, j'pense que je ne suis pas faite pour cette vie avec lui. Considération basse et aveuglement certain, Em' se mettait ces barrières seule. Elle n'assumait rien. Trinquons ! J'suis d'accord ! L'action se réalisait. Ils pouvaient boire ce bon vin tout en continuant leur discussion. Tu crois en un futur plus joyeux ? Elle voulait savoir s'il y croyait, lui qui était si paumé. En tout cas, tu pourras toujours boire de l'alcool ici, avec moi, et parler toute la soirée.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Je serais extrêmement mal honnête de ne pas lui donner raison sur ce coup-là. Il est vrai que je suis bien entouré et soutenu. Nell, mon frère, ma mère et même cette raclure de macadam qui se prétend être mon beau-père et homme de bien. Outre la famille, la vie m’a donné la chance de faire la connaissance d’Emily. Cette petite boule de nerf au regard de braise, j’y retrouve en elle, absolument tout ce que je peux rechercher en terme de relation saine et équilibrée. Malgré la gueule que peut bien avoir nos petites soirées alcoolisées et 100% axées sur des discussions un brin mélancoliques. Une famille, des amis et l’impossible chance d’être rentré aux États-Unis avec tous les membres de mon corps (et vivant)… et non éparpillé à çà et là dans un cercueil décoré par les couleurs du drapeau de notre pays.

- Tu es adorable, Em’ ! Il est rassurant de savoir que je peux toujours compter sur ton hospitalité et ta présence. Saches que malgré les apparences, qu’importe le jour ou la nuit, je suis là pour toi… tu peux compter sur moi.

Je ne fais que ça, me lever le matin et avancer dans les putains de journée pas à pas. C’est ce qu’ils m’ont recommandé de faire, lors de mon inoubliable passage à la psychiatrie militaire. Là où j’en ai fait voir des vertes et des pas mûres, au pauvre personnel chargé de mon dossier et là où je ferais mieux de retourner…

Je suis encore trop fragile et vulnérable. Ce congé, ce projet de réinsertion social, il est arrivé trop tôt dans ma chienne de vie. J’ai pas envie de me truffer le pif de lunette rose pour m’imaginer que tout est parfait et même daigner dire que j’ai entraperçu ce satané farfadet de l’autre côté de ce fichu arc-en-ciel. Faut croire que j’ai encore quelque chose à apprendre de la douleur et le désespoir. Mais je ne peux en vouloir aux gens qui proche de moi souhaitent me voir rétabli et en parfaite sainteté psychologique. Là est peut-être le nœud de mon problème. Je me prétends être quelqu’un d’autre, en leur compagnie, pour ne pas les décevoir et les inquiéter.

- Peut-être que tu n’es pas fait pour cette vie dans l'immédiat et peut-être que plus tard tu le seras. Le timing est plus qu’inapproprié, il en est vrai, mais qui sait de quoi sera fait demain ?

Car en vérité, il est que le monde n’est jamais plus clément à l’égard de l’un ou de l’autre. Que des gens comme Emily ou moi, l’on vient toujours par se perdre au travers des ténèbres de ce soir et la pénombre de demain. J’erre un pied dans l’ombre et l’autre dans la lumière, la conscience inlassablement tiraillée entre les deux et n’écoutant que l’ordre que peut bien me souffler les murmures de leurs distractions.

Le bruit cristallin de nos deux coupes de verre qui légèrement s’entrechoquent me rappelle immédiatement à la réalité, clignant des yeux à quelques reprises pour retrouver le focus et laisser sombrer mes azurs dans le regard mordoré de mon interlocutrice.

- Une question qui demande une certaine profondeur de réflexion. Est-ce que toi tu y crois en un futur meilleur ?

Et avant que moi-même je n’ose répondre, des jointures qui timidement se font entendre contre la façade de bois, avisent la présence d’une personne de l’autre côté de la porte… et cette personne à peine toque-t-elle, qu’un maigre jour apparait et dans l’ombre de l’embrasure se dessine un œil et une moitié de figure qui semble être livide d’hébétude.

- Euh. Emily. J’veux pas te déranger… mais il y a un client, au comptoir, qui a commencé à faire du grabuge et… et… hum… quand un videur à voulu le sortir… il s’est produit… euh… hum… il vaudrait mieux que tu viennes voir ce qui se passe. Personne ne sait quoi faire !

Que de mystère.
Et il faut croire que le devoir appel notre chère propriétaire et femme d’Affaire !
Scrupuleux, je prends le soin de lui assurer :

- Si jamais tu as besoin d’aide d'une paire de bras supplémentaire, fais moi signe, Em’…

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Les deux amis se permettaient de rappeler leur présence pour l'un comme pour l'autre. En somme, ils se sentaient prêts à épauler l'autre. Il s'agissait d'une vérité mais y parviendraient-ils ? En étaient-ils seulement capables ? Ils avaient vécu trop d'épreuves, ces dernières les avaient largement affaiblis. Alors, sauraient-ils s'entraider comme ils l'affirmaient ? Leur peu d'énergie leur servirait certainement mais pour quoi ? Ils voulaient tous les deux reconquérir un être : une partenaire de vie et un enfant. Du boulot les attendait. Ils devaient économiser leur force. Leurs bonnes paroles partaient du cœur. Elles étaient sincères et pensées. Or, ils s'avançaient sûrement trop rapidement. Emily Reddick répondait positivement aux dires de son interlocuteur.

Merci Derek, tu es loyal. Tu peux aussi compter sur moi. Les apparences ne sont que des apparences, il faut creuser. Alors, je sais de quoi tu es capable. Te parler me fait toujours du bien comme le fait de te voir et de passer ces moments avec toi. N'hésite pas, il y aura toujours une bonne bouteille pour toi et surtout une écoute. Les amis sont faits pour cela. Et... s'il le faut parle à tes proches, au plus tu parles, au plus tu te libères.

Ils se donnaient des conseils, sans forcément les suivre. Em' avançait au jour le jour en se raccrochant au peu de choses qu'elle possédait. Par contre, elle ne discutait pas de ses problèmes aussi facilement avec autrui. Morrow devait être comme elle pour cela. Ils rencontraient beaucoup de points communs. Femme ou homme, cette donnée ne faisait pas de différence. L'un pouvait se comporter aussi bêtement que l'autre. Derek et Emily représentaient une preuve vivante de cette idée. Pourtant, ils avaient les clés. Ils étaient passés par les mêmes portes. Ils répétaient ce qu'il fallait entendre mais la mise en pratique des conseils n'existait pas. Derek se voulait même philosophe, un philosophe de comptoir bien entendu. Il n'avait pas tord sur un élément : le timing ne qualifiait peut-être pas le bon. Red vivait une situation complexe. Son fils ne lui parlait plus à cause de son silence sur son père. Au quotidien, cela n'était pas vivable. Morrow prônait un changement possible avec le temps. Alors, leur réflexion sur l'avenir trouvait une résonance. Ils pouvaient éventuellement croire en un futur meilleur, notamment si la théorie du trentenaire se vérifiait.

Ouais bonne question ! Tu marques un point. Le temps de boire, plutôt de savourer un bon vin, arrivait. Les sourires revenaient. Euh... à cet instant, je crois juste à tes goûts en matière d'alcool. La brune ne s'empêchait pas de rire. Il fallait détendre l'atmosphère. C'était sans compter sur le sort qui s'acharnait sur la propriétaire de l'Alabama Bar. J'arrive tout de suite. Derek rebondissait sur la situation, proposant son aide. Merci, ça va aller. Je te laisse en compagnie de ce bon vin. Ne bois pas tout. Elle souriait pour ébouriffer les cheveux de son ami. Emily observait la situation. Il était question de remettre en place un client trop zélé. Ni une, ni deux, Reddick attrapait le perturbateur par le col pour le soulever du sol et le traîner dehors. Tu paieras les soins de mon employé gros c** ! Ne remets pas les pieds ici si c'est pour te la raconter comme tu viens de le faire ! Le client se relevait pour lancer un coup de poing près du visage de la femme. Celle-ci réussissait à l'intercepter. Elle lui écrabouillait littéralement les phalanges. Dégage ! En revenant, la proprio fut applaudie comme à chaque tour de force. Tournée générale les amis ! Elle sommait au serveur d'aller vite sur le service. Doucement, la belle rejoignait le bureau.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Dans les vestiges terreux de ce soir éphémère, j’y retrouve son pesant d’or. Et dire que j’ai passé à deux phalanges près de rester chez-moi à tourner en rond et ruminer sur absolument tout et n’importe quoi. Je me serai gouré et pas qu’un peu, de faire ça ! Mes huileuses diaphanes suivent la trajectoire de mon amie qui, fidèle à elle-même, après une flatte-flatte sur la sombre crinière, me somme de rester ici à savourer mes lapées de vin. Un rictus se profile à la barrière de mes lippes, tandis que j’agrippe la bouteille et l’observe aller se fondre dans la masse de l’autre-côté. Diable, son tempérament tout feu tout flamme, je ne m’en lasserai jamais !

En bon saint-bernard que je peux l’être, parfois, je reste ici là sans broncher d’un poil, approchant la coupe de vin à mes lèvres pour y savourer son délicieux nectar alcoolisé alors que je prête tout de même une oreille attentive au brouhaha extérieur. Je ne crains pas pour la sûreté de mon amie, du haut de ses trois pommes, elle s’avère être un redoutable petit bout de femme, mais il y a tout de même des facteurs X que je redoute. À commencer par un client masculin un peu bourré qui fait du grabuge… il n’y a rien de plus con et grotesque qu’un gars en état d’ébriété et qui se comporte comme un homme des cavernes pour prouver à la plèbe et à lui-même qu’il en a une grosse paire dans le pantalon. Oui, pour être un soir sur deux, ce même genre de gars bourré qui fini la soirée avec une humeur aussi cordiale qu’un balai à chiotte, j’anticipe le déroulement de cette séance de crêpage de chignon avec une certaine appréhension.

Mais lorsque j’entends l’annonce d’Emily et les hululements de la foule en délire, les tracas sitôt s’estompent et mes jointures blêmies par la crispation de mes poings retrouvent rapidement leurs couleurs rosie naturelle. Le petit contretemps est balancé dans les orties et pour célébrer cela c’est open-bar ! La porte du bureau s’ouvre et dans la foulée je vois apparaitre la tête brune de ma petite guerrière.

- Je te félicite, Reddick ! Tu sais bien refroidir les ardeurs d’un boulet et à la fois hausser le mercure dans la place ! Tu gères véritablement bien ton commerce. J’aimerai tellement savoir c’est quoi ta recette secrète ! Je crains à l’os, moi, en matière…

J’attends qu’elle vienne asseoir son joli séant dans le siège et je demande derechef.

- Il voulait quoi, le gus, au passage ?

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Red venait de régler un problème au bar. La brunette possédait plusieurs casquettes dont celle de vigile. Depuis la découverte de son don, elle s'en servait pour remettre de l'ordre sur son lieu de travail. Les hommes qui géraient la sécurité n'étaient pas virés mais ils ne trouvaient presque plus leur place. La plupart du temps, ils s'occupaient des entrées. Em' installait l'ordre. Les troubles fête étaient vite remis en place. La proprio rencontrait une force surhumaine. Elle pouvait soulever des objets très lourds comme une voiture sans craindre d'avoir mal. Cela changeait la donne. Plus jeune, elle subissait les humiliations des autres, même la violence. En prison, elle avait appris à se défendre. Maintenant, grâce à son pouvoir, elle pouvait affronter tout et n'importe quoi. Elle ne se rappelait pas de l'apparition du don, ni de la manière dont cela s'était passé mais elle savourait cette renaissance.

Présentement, Emily rejoignait son ami. Il attendait tout seul. Une bouteille d'un bon vin l'accompagnait. Reddick appréciait cet homme. Elle lui faisait confiance pour lui laisser son bureau où tous ses papiers étaient rangés. Elle aimait partager des moments avec lui. Ils relâchaient tout. Ils se comprenaient. Ils se confiaent l'un à l'autre sans détour. Le jugement n'avait pas sa place, les conseil si. Bien-sûr, ils n'hésitaient pas reprendre leurs faux pas. Ils étaient amis. Reddick avait offert une tournée à tous les clients du bar. Ces derniers semblaient heureux. Parfois, il fallait se sacrifier un peu pour autrui. En entrant dans le bureau, la trentenaire soupirait. Elle choisissait de boire un coup.

Merci, il fallait les calmer, ça peut vite dégénérer. Derek la complimentait. En appelant son interlocutrice « Reddick », il rappelait son frangin. Hunter avançait ce nom de famille avec un ton négatif, pas son frère jumeau. Hunter était gamin à 100%. Il ne tolérait pas la concurrence. Derek valait 1000 fois mieux que son frère. Ma recette secrète ? J'ai un don. Je n'ai rien provoqué. Je gère mon entreprise grâce à ce pouvoir, je n'ai aucun mérite. Je peux assumer toutes les situations. Tu ne connais pas cela ? Elle évoquait un éventuel don. Le gus ? Il faisait chier son monde. Maintenant, il est dehors avec quelques phalanges en moins. Elle souriait. Tu veux une démo ?

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Une moue mesquine et à la fois curieuse se profile subtilement à la lisière de mes lippes, l’observant prendre place sur son trône, savourer quelques lapées du vin, pour décompresser, alors que j’ai très bien remarqué la mimique qu’elle a tiré lorsque je l’ai hélé par son nom de famille. L’écho d’un souvenir amère qui la fatigue et turlupine. Un rapprochement inévitable. Une proximité étroite et viscérale. Une réaction allergique instantanée. Ce qui pouvait me sembler anodin prend soudainement une importance étrange. Emily m’a comparé pour ensuite m’opposé à mon frère jumeau. Il a l’habitude de l’apostropher par son nom de famille, ponctuant le point d’exclamation avec fort probablement un timbre de mépris dans la voix et écorchant l’empathie de notre femme d’affaire qui représente la menace et la concurrence. Réflexions et constats qui m’emmènent à rester silencieux le temps d’un battement ce cils, me disant que c’est franchement dommage que ma meilleure amie et mon frère s’entendent aussi bien que chien et chat. Dualité qui me coince inlassablement entre l’arbre et l’écorce. Me force à jongler entre la vérité et le mensonge, lorsque je parle avec mon frère qui est à prendre avec des pincettes ces derniers temps. Si jamais ce dernier venait à découvrir que je sympathise avec l’ennemi, l’apocalypse now nous paraîtra comme un doux euphémisme...

Un déglutis de travers. Une gorgée de vin pour faire passer tout ça. On se secoue les méninges. Et on reporte notre attention sur notre précieuse interlocutrice qui avance des propos pour ainsi dire mystérieusement ambitieux et qui me ramène à l’une des raisons précise qui m’a poussée à venir lui rendre visite ce soir.

- T’es au courant ?! Que je ne peux m’empêcher de souffler, complètement surpris par son partage, me repositionnant sur ma chaise, pour me pencher vers elle et lui murmurer avec l’austérité d’un gars qui s’apprête à révéler un grand secret :

- Pour… pour les dons ?

Je cligne des yeux. J’assimile les informations. Évalue les possibilités.

- Tu… un pouvoir magique. Tu… tu en as un ?

C’est risqué. J’aurais peut-être dû passer par quatre chemins avant de lui balancer ça comme ça de but en blanc ?! Elle va me prendre pour un cinglé !

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Emily Reddick venait d'évoquer son don. La brune possédait une force hors du commun. Elle pouvait soulever une voiture sans avoir mal, déraciner un arbre, enfoncer des portes très solides, casser la figure des plus costauds, etc. La propriétaire de l'Alabama Bar ne savait pas comment elle avait attrapé cette faculté. Cela datait de quelques mois. Em' s'en servait sans souci devant tout le monde. Au bar, elle gérait l'ordre. Pour le moment, personne ne l'arrêtait ou ne l'empêchait d'utiliser cette force hors norme. Alors, elle agissait comme bon lui semblait. Au début, elle ne contrôlait pas son pouvoir. Les nombreux trous sur les murs de son bureau ou de son appartement le prouvaient. Sans le vouloir, la belle avait déjà bien blessé des personnes. Heureusement, Isiah n'avait jamais subi les frais de cette découverte mais il avait compris que quelque chose se tramait. Ce don changeait sa maman. Elle était encore plus dure qu'avant. Emily ne craignait rien, ni personne avec ce pouvoir. Sa peur venait plutôt de ce qu'elle serait capable de faire avec cette force. La trentenaire se confiait à Derek avec une facilité habituelle. Le partage semblait l'emporter. Les deux amis osaient tout se dire sans avoir peur d'être jugé ou du regard de l'autre. Présentement, l'attitude de Derek poussait la brunette à sourire. Morrow paraissait mal à l'aise.

Oui je suis au courant Derek. Je ne comprends pas comment et pourquoi mais cela existe. Red buvait une nouvelle gorgée de son verre. Oui. Elle se levait pour attraper sa propre chaise et briser les barreaux de celle-ci. Volontairement, elle choisissait de donner un énième coup de poing dans le mur, un énorme trou profond se formait à l'endroit où le choc venait de se réaliser. Désolé pour cela, j'ai une force hors norme et je ne ressens pas tellement la douleur. C'est dingue, non ? Et toi, comment tu sais ? Tu en as un, de don ? Tu connais des gens qui en ont ? J'aimerai tellement savoir la source de... ce truc... tu vois ? J'ai attrapé ce pouvoir quelques mois plus tôt, je ne sais même pas de quelle manière s'est arrivé mais c'est arrivé. Ça aide pour le travail, j'te jure. La sécurité ne sert plus à grand chose, j'en garde quand-même une. La sincérité était reine. Reddick ne se gênait pas pour tout raconter.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

La surprise. La confusion. Le mystère. Et puis s’immisce doucement le doute. Les yeux aussi ronds que des balles, j’observe la chaise sitôt être sous l’emprise herculéenne de sa propriétaire. À la fatale rencontre avec les paluches de celle-ci, ce qu’il reste de ce pauvre meuble de bois réduit en éclat n’est qu’un ramassis de ruine. La mâchoire désormais grande ouverte, (mine que j’avais tendance à tiré, gamin, lors de ces frénétiques soirées passées à regarder des combats de luttes à la télé), je la vois se précipiter vers l’un des murs de la pièce et sous le tambourinement des jointures qui s’écrasent contre la paroi de plâtre, un trous béant se creuse et me donne soudain l’impression d’être emmuré en un fromage gruyère. Nom d’une pipe à shit !

Époustouflé, je sursaute comme si un farfadet venait tout juste de me pincer la fesse gauche alors que j’en renverse presque le contenu de ma coupe sur ma blanche chemise. Cerise sur le cake, l’air mine de rien, ma meilleure amie revient s’asseoir à mes avants et profite de ce brin de sérénité pour avaler une lapée de son vin.

- Aheum…

Bon, d’accord. Nous sommes loin, (grand dieu, mais très loin), de la réplique du siècle et digne d’un Golden Globes. De l’index, je me gratouille la tempe, avale de travers, fronce les sourcils, regarde à nouveau les dégâts et autres langage corporel du même acabit, le temps que mes esprits se rencontrent et reprennent connaissance.

- Ça explique la manière fastoche avec laquelle tu t’es débarrassée de Jean-Claude Le Bourru, tout à l’heure. Franchement, tu me sidères. Sincèrement, c’est complètement dément, Em’ ! Honnêtement, désormais, je vais te voir dans ma soupe !

Une gorgée de vin plus tard.

- Il… il existe un… un monde parallèle. Un monde magique. Dans le genre Narnia Chronicles qui aurait couché avec Lord of the Rings. Le fruit de lors fornication nous a donné un royaume qui s’appelle…

Bordel, il s’appelle comment, déjà ?

- ELVENDYR ! Que je m’exclame, index en l’air, m’avançant sur mon siège pour lui confier, l’air très sombre : Il y a de cela quelques semaines, un truc chelou nous est arrivé. Sans qu’on ne comprenne pourquoi, nous sommes une poignée de gens à avoir traversé un portail ou que sais-je… pour atterrir dans cet… ailleurs. Je crois que ton pouvoir peut peut-être venir de là. Mais il se trame des choses vraiment pas nette, Em’. On… on a assisté à un putain de sacrifice. Des gens sont morts sous nos yeux !

Je dépose ma coupe sur le bureau et lui attrape les deux mains en les miennes.

- Tu dois faire gaffe, mon amie. Avec un grand pouvoir, viennent de grandes responsabilités !

Oui, ceci est une réplique de Spiderman et alors ?!

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Emily Reddick effectuait une démonstration de ses dons. Elle partageait un élément phare de son  quotidien avec son ami. Elle ne craignait pas son jugement. Elle préférait même avoir l'avis de Derek Morrow sur tout cela. Il en savait peut-être plus qu'elle. Cet échange permettait de développer des zones d'ombre et d'être transparent. Derek prouvait une surprise, un étonnement à la vue des actions de son amie qui se servait de son pouvoir pour lui montrer de quoi il s'agissait. Après cette scène, Em' s'installait pour poursuivre sa conversation avec Morrow et aussi pour continuer à boire en sa compagnie. Ce don la dépassait. Elle ne connaissait rien sur ce dernier.

Ça te fait peur ? Je te fais peur ? Je ne m'en servirai pas contre toi. Ce don me sert pour le travail surtout, comme tout à l'heure en effet.

La suite venait surprendre Red. Son allié avait plus d'informations en sa possession sur l'apparition du surnaturel sur terre. Comment avait-il obtenu ces renseignements ? Comment supportait-il tout cela ? La vérité n'était pas toujours bonne à entendre. En l'occurrence, elle faisait peur. Emily pensait que son interlocuteur se jouait d'elle mais il semblait si sincère. Disait-il vrai ? Il ne racontait pas des histoires, il balançait ce qu'il savait. Il déballait son savoir avec légèreté et humour. Apparemment, Derek avait côtoyé ce « monde parallèle ». Il ne l'avait pas cherché. D'ailleurs, il avait assisté à un sacrifice. Emily affichait de la surprise. Cette donnée la perturbait. Pourquoi un sacrifice ? Par qui ? Pourquoi ? Aussi, la tristesse l'envahissait en silence, pas parce que Derek n'avait rien dit mais plutôt parce qu'il avait vu quelque chose de traumatisant, encore... . Comment se sentait-il ? Le sujet était délicat.

Bah merde alors, ça fait beaucoup ! C'est quoi ce monde parallèle ? Pourquoi ce sacrifice ? Ils nous en veulent ? J'pige rien. Ça va toi ? Ils t'ont rien fait ? Ils sont quoi ? As-tu reçu un pouvoir si c'est ce lieu qui offre des dons ? Je n'ai jamais été là-bas alors ta théorie... en réalité, elle ne savait pas toujours ce qu'elle faisait la veille alors... elle avait peut-être été amenée dans cet endroit sans le savoir, ni le comprendre... elle ne tient pas debout. P***** c'est fou ! Ensuite, elle se marrait car Derek en rajoutait toujours. Il se situait dans la mise en scène. Vive Spiderman ! Gros nigaud, va ! Elle ébouriffait les cheveux de son ami. Ils se taquinaient très souvent.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

- NON ! Bien entendu que non !

Avec étonnement, je m’entends insurger ces mots, la voix inflexible alors que l’éphémère stupéfaction s’étiole déjà dans l’air et laisse doucement place à l’espoir abritant mes plus labyrinthiques songes. Elle ne me fait pas peur. Imaginer ne serait-ce qu’une once d’un tel sentiment à son égard, il m’en est tout simplement inconcevable. Notre amitié m’est beaucoup plus vaste et puissante que cela.

- Tu ne me feras jamais peur, Em’ !

J’essaie maladroitement de rectifier le tire, de faire comprendre mon propos, mais il en devient vain lorsque par mégarde je lui en fais croire le contraire et ainsi je me confonds dans un parfait hécatombe psychologique.  

- Pour tout dire, ce pouvoir, il me rassure, surtout avec les bozos qui trainassent dans le coin. Je ne t’apprends rien en te disant que parfois, RevealDown, ça peut devenir un putain d’asile à ciel ouvert !

Bref, je ne fais que répéter ce qu’elle m’assure et pour cet éclair de vie qui soudain étincelle dans l’ombre de ce soir, je ne peux m’empêcher de lui sourire. La discussion converge à nouveau sur les assommantes révélations, mes confessions sur les derniers événements passés n’étant qu’un ramassis d’informations que je lui ai balancé pêle-mêle à la figure et elle essaie au mieux d’en comprendre le sens.  

- Je---j’en sais rien. Je crois que c’est un rituel satanique pour enclencher je ne sais quelle malédiction. Je ne crois pas que ces aliens nous en veulent personnellement… ils nous considèrent peut-être comme des brebis à sacrifier dans les flammes sacralisées. C’est complètement fou, je sais !

À nouveau la spirale infernale, j’essaie de maladroitement de la contrôler.

- J’ai pas de pouvoir. Du moins pas à ma connaissance, mais je sens et je sais qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond chez moi. C’est quelque chose de pas normal… Et cette chose, je l’ai sentie se réveiller lorsque…

Lorsque j’étais en Afghanistan.
Ce secret, jamais encore il n’a été révélé.
Douloureux. Beaucoup trop douloureux.

Elle m’ébouriffe les cheveux et s’esclaffe de ce rire contagieux qui en d’autres circonstances m’aurait redonné le sourire… mais pour l’heure, je reste austère, limite troublant alors que je me relève, me rapproche d’elle et lui agrippe les épaules de mes deux mains. Je plante mes yeux fous dans les siens et je répète :

- Emily, je ne plaisante pas. Tu dois faire gaffe. Vraiment faire gaffe. Des gens sont morts, avec ces conneries. Je ne sais pas ce qu’ils veulent et ce qu’ils cherchent. Mais s’ils arrivent à te mettre la main dessus…

L’éventualité de sa fatalité me cloue instantanément le bec.
J’y vais un peu fort, je sais. Mais je suis terrifié à l’idée de perdre un proche de plus.

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Derek Morrow ne craignait pas Emily Reddick, surtout le don de cette dernière. Le pensait-il réellement ? Était-il question de faire plaisir à son amie, de lui dire ce qu’elle souhaitait entendre pour ne pas la décevoir ? Ou alors, était-il sincère ? Em’ avait peur d’elle-même parfois car elle ne mesurait pas toujours sa force. Elle ne contrôlait pas totalement ce pouvoir. Comment être assurée de ne pas détruire quelqu’un un jour ? Tout pouvait arriver. Red ne voulait pas en arriver là. Or, quelques fois, elle ne mesurait pas sa force. Pour le moment, les murs ou les objets prenaient plus que les humais… heureusement.

De toute manière, je ne m’en prendrai jamais à toi. Je t’estime trop pour te faire du mal. Mon but n’est pas de blesser mes clients mais de leur faire peur quand ils vont trop loin. Derek tentait de rassurer son interlocutrice. Essayait-il de se convaincre que cette capacité ne demeurait pas à craindre ? Je suis d’accord avec toi.

Bien évidemment, Red ne pouvait pas gérer tous les problèmes à Revealdown et effectuer la loi comme bon lui semblait. Il y avait des règles à respecter et elle ne se permettrait pas de les briser. Elle n’était pas supérieure aux autres. Puis, la prison restait un endroit connu pour elle et elle ne désirait pas y remettre les pieds. Elle choisissait d’agir en bonne citoyenne. La suite la perturbait. Morrow effectuait des révélations troublantes. Emily ne pouvait pas les ignorer.

Waouh, c’est dingue ! S'exclamait-elle, surprise et en même temps apeurée par ce scoop. La malédiction aura un impact sur nous ? Elle va directement nous toucher ? Quel rôle on joue dans tout cela ? Tout cela reste fou et improbable, je suis triste de savoir que tu as assisté à ce massacre… . Elle le pensait horriblement fort. Reddick souhaitait connaître une information sur son ami. Avait-il un don ? Tu peux m’en dire plus. Elle restait intriguée. Comment tu peux sentir cela ? Tu crois qu’il va t’arriver quelque chose ? Que tu vas te transformer ? Elle parlait en usant du premier degré, elle n’évoquait pas de transformation physique mais plutôt mentale, rien de bien précis. Les deux complices poursuivaient leur conversation. Derek se montrait protecteur. Em’ gardait le sourire. Arrête… il n’y a pas de danger à Revealdowan… sauf les délinquants du coin mais je ne les crains pas. Toi fais gaffe à toi, tu as plus à craindre sans pouvoir. Elle riait, mais elle s’inquiétait réellement pour lui.

codage par LaxBilly.

The night city grows.

♫♪♫
(C) CSS + Crossover by Disturbed.

Un puzzle. Un gigantesque et énorme puzzle, dont les pièces s’égarent et s’oublient en les vestiges de mon esprit. Mon esprit, peut-être, légèrement trop marqué par les derniers événements alors que les souvenirs deviennent de sordides plaies infectes, qui s’animent et brûlent les parois de mon crâne. Les dernières semaines, elles m’ont été redoutablement infernales. Putain, mais qu’est-ce que je raconte là ? Les dernières années, elles me sont été redoutablement infernales. À tout dire, à vrai dire, j’ignore quand et où est-ce que la Vie me donnera une chance d’enfin entrapercevoir sa putain de lumière au bout de son tunnel. Je n’en peux plus, de ce rythme de vie. J’ai l’impression d’être une locomotive qui roule de vive allure sur les rails, si près de prendre le champ, je ne suis même pas fichu de voir le mur de brique qui m’attend sournoisement et vers lequel je fonce comme un fou furieux !

- Ce n’est pas quelque chose que je ne saurai t’expliquer. Seulement, je le sens dans mes tripes.

Révéler ce que depuis près d’un an, je gardais enfoui au plus profond de moi, ç’a quelque chose de perturbant et de rassurant. Toujours ces saletés d’amalgames. Toujours…

- Lors de mon dernier déploiement en Afghanistan, il s’est produit quelque chose. Un événement clé, que pourtant je ne me souviens pas…

Je ferme les yeux, essaie d’éclaircir ma vision, me frictionnant les paupières de mon pouce et index, à mesure que les souvenirs refont surface.

- La plus part de mes hommes ont péris, ce jour-là. Ceux qui ont survécus à cet enfer, ils sont plongé dans le coma depuis près d’un an… alors que moi, je suis rentré au pays pratiquement sain et sauf. Comment tu expliques ça, Em’ ? Ne me sors pas le coup du miracle ou de la chance et ou le hasard. Je ne crois pas en ces conneries.

Bouleversé, je contourne la table, attrape ma coupe de vin et avale les dernières lapées, pour calmement répondre aux interrogations de mon amie.

- J’ignore si la malédiction aura un impact sur nous. Tout ce que je sais, c’est que ce monde semble être relié au nôtre et que d’une certaine manière ; nous semblons tous liés. Et tu as tors de penser que RevealDown est une ville paisible et tranquille. Des tonnes de choses étranges se produisent. Ma cousine me l’a toujours dit et j’y avais jamais prêté attention. Mais une fois qu’on se donne l’occasion d’ouvrir les yeux et de regarder les choses telles qu’elles le sont, on remarque le bordel latent qui nous siège et entoure. Les disparitions inexpliquées, les ouragans qui nous fouettent constamment, les attaques d’animaux qui se succèdent et l’asile psychiatrique qui déborde de cas mythiques et que les toubibs ne comprennent pas. Les flics, aussi, qui jouent à l’autruche et qui nous font croire que tout va bien.

Un rire ironique m’écorche d’instinct les lippes. Un peu aigre, un peu amer, je consulte l’heure et soupire.

- M’enfin, je suis épuisé et étiqueté comme barjo. Qui sait, peut-être que tout ce que je te confie là, ça n’est jamais peut-être qu’un délire de plus ? Allez, il faut que je me sauve, avant que mon frangin se demande où je suis passé, je lui fais un clin d’œil : il ne sait pas que je copine avec l’ennemi. Comme tu le sais si bien.

Je m’éloigne vers la porte de son bureau, poignée en main, je prends le temps de lui dire, avant de sortir :

- Merci, pour le verre de vin et merci d’avoir pris le temps de papoter avec moi. On devrait faire ça plus souvent et ne pas attendre si longtemps ! Je te dis bonne nuit et à bientôt !

DEREK & EMILY

SWEET HOME ALABAMA... BAR

Les confidences persistaient. L'échange était authentique. Le partage s'invitait. Derek Morrow expliquait qu'il se sentait comme différent. Il expliquait les circonstances de cette pensée. C'était pendant son dernier déploiement en Afghanistan. Emily Reddick saisissait mieux les enjeux de ses dires précédents.

J'imagine que tout cela a un rapport avec la guerre. Tu as vu des choses... horribles, c'est sûrement cela qui t'a changé, rien à voir avec un truc qui ne tourne pas rond. Tu as sûrement du mal à digérer ce que tu as subi d'où cette perte de mémoire. Cela relève du traumatisme.

Elle se risquait à une explication assez bancale, sommaire et simpliste. Or, elle tentait de comprendre les choses et de se mettre à la place de son grand ami. Son visage affichait les stigmates du passé. Il réagissait de manière expressive au fur et à mesure de ses confidences. Il avait besoin de soutien. Derek développait ce qu'il avait commencé.

Ouais j'avoue c'est dur à croire, tu as peut-être une étoile tu sais. Elle se reprenait. Pardon, tu ne voulais pas entendre cela. Bah.... franchement je ne sais pas, tu as peut-être été aidé par une autre force.

La propriétaire de L'Alabama Bar écoutait les dires de son interlocuteur. Elle voulait en savoir plus sur cet autre monde et... sur la malédiction. Elle craignait le pire. Les humains risquaient quoi ? Morrow avait été choisi. Il connaissait plus de données que la moyenne car il avait rencontré une situation très étrange et spéciale.

Tu es sûrement plus clairvoyant que moi. On verra bien les conséquences de tout cela … . Derek devait s'éclipser. Il était tard. Il usait toujours d'ironie et d'autodérision. Reddick le serrait rapidement dans ses bras. Elle avait passé un bon moment en la compagnie de Morrow même s'il l'avait troublé avec ses révélations. A très vite, j'ai aimé partager cette bouteille avec toi et quand tu veux ! Bonne nuit, à bientôt. Prends soin de toi.

FIN

codage par LaxBilly.