Kingsteen & Phoebe

« Que celui qui combat les monstres prenne garde dans sa guerre à ne pas devenir un monstre lui-même. À force de plonger trop longtemps votre regard dans l'abime, c'est l'abime qui entre en vous. » Friedrich Nietzsche

Et nous revoilà au Devil's Tail ! Je vous ai manqué ?
Mes « retrouvailles » avec Caleb la veille ne cessaient de tourner et retourner dans mon cerveau. Je n'allais plus jamais avoir la paix, à moins de le tuer. Ce qui était très sincèrement une option valide, et réalisable. Caleb, c'est le chewing-gum collant et gluant qui s'est agglutiné en dessous de la semelle de votre chaussure : dégueulasse et un bordel pas possible pour le décoller.
Si ça se trouve il est chez moi, là maintenant tout de suite.
Si ça se trouve il est en train de déménager ses affaires.
Ne rigolez pas, c'est franchement bien son style. Je vais le tuer.
Je le tue d'abord, et ensuite je déniche de l'acide. Ouais. C'est un bon plan.
-Hé, p'tit cul. Le client en question me siffla comme pour me faire rappliquer plus vite en claquant des doigts. Un autre.
Je l'ignorais ostensiblement et allait m'occuper d'un autre client. T'as une porte de sortie mec... saisie la.
-HEY ! Je t'en ai demandé un autre, pétasse.
... D'accord.
Attrapant une bouteille de whisky, je l'abattais en plein sur le crâne du gars.
-Avec ceci, ce sera tout ?
Je vis Derek de loin me faire les gros yeux et haussais les épaules pour toute réponse. Oui, bon, je sais, je rembourserai. Mais il l'avait mérité !
« L'incident » eut pour effet de faire fuir quelque peu la clientèle du comptoir, à l'exception faite de quelques clients déjà trop saouls pour comprendre réellement ce qui s'était passé ou même être en mesure de réagir. D'un geste habitué, j'enfilais un gant en latex et soulevait la tignasse de Gerry qui avait - encore - le nez dans son verre. Un jour, il arriverait à se noyer dans son alcool... et ce n'est certainement pas moi qui le regretterai.
Les places vides de mon comptoir ne tardèrent pas à se remplir à nouveau ( pour un peu on aurait presque envie de casser plus de bouteilles d'alcool sur la tête des gens ! ), accueillant tout un nouveau lot de gens plus ou moins insupportable. Une femme d'une quarantaine d'année commanda un Manhattan avant de se morfondre sur les désastres de son mariage.
-Vingt ans de mariage et il me quitte pour sa secrétaire. Non mais vous y croyez vous ? C'est vrai, après tout... c'est la situation la plus clichée au monde. La secrétaire ? Pourquoi pas l'assistante, la gouvernante ou l'hôtesse de l'air tant qu'on y est ? Vous ferez enchaîner les verres s'il vous plaît, je ne veux pas voir mon verre vide, ajouta-t-elle en payant à l'avance - et avec pourboire - les prochains verres. Regardez-moi. Non mais, regardez-moi ! J'ai tout ce qu'il faut là où il faut, vous ne croyez pas ? Vous en connaissez beaucoup des femmes de mon âge avec des nichons pareils ? Même pas besoin de soutien-gorge, parfaitement, Monsieur, lança-t-elle en s'adressant à un type assit à côté d'elle. Son monologue ( et ses verres ) s'enchaînèrent sans que je lui accorde spécialement d'attention.
A quelques mètres d'elle se trouvaient cinq type, de toute évidence encore au lycée.
-Quatre bières et une vodka, beauté !
Parce qu'il est évident que le petit chefaillon de la bande devait se la péter avec un alcool plus fort...
-Vos cartes d'identité, les gars, demandais-je en sachant d'avance à quoi m'attendre.
Comme prévu, cinq carte d'identité parfaitement fausse quoi que très réaliste, leur accordant à tous l'âge légal pour boire.
-...Ouais c'est ce que je disais, quatre cocas et une eau gazeuse, répondis-je.
-Hey comment ça des cocas et de l'eau gazeuse, on a l'âge légal pour boire, vous avez vu nos cartes d'identité !
Je me lance dans un débat ou j'impose les règles ?
... J'impose les règles.
-Écoute-moi bien, la terreur. C'est ça ou tu te tires de l'établissement.
-Sinon quoi ?
-Crois-moi, tu n'as aucune envie de le découvrir, rétorquais-je en soutenant son regard.
Une vingtaine de minutes plus tard, cette même bande de gros bras typiquement sportifs populaires de leur lycée prit en grippe un couple de jeune gay qui venaient d'entrer dans l'établissement.
-Alors c'est vrai ce qu'on raconte sur toi, Joshy, t'es vraiment une tarlouze !
-En même temps t'as vu comment y s'fringue... mais attend, tu t'es pas mis du mascara ?
-Alors lequel de vous fait la fille ?
L'un des amoureux tenta de repousser leurs agresseurs qui se faisaient trop près, sans énormément de succès et provoquant leur hilarité.
-J'savais bien que ça pouvait pas être Joshy qui faisait le mec ! T'es toujours aussi incapable de te défendre même si ta vie en dépendait.
-Foutez-nous la paix ! C'est quoi votre problème ?
-La liste serait trop longue malheureusement. Mais leur plus gros problème actuel, c'est moi, les coupais-je.
Il est évident que les hommes ( et les femmes ) homosexuels sont tout à fait à même de se défendre seuls. Mais ces gamins là sont vraisemblablement au lycée, et semblent passer plus de temps à essayer de se faire oublier qu'à oser réellement riposter. Ça viendra peut-être avec le temps. En attendant, je balançais un bon coup de genoux, d'abord dans les parties puis dans l'estomac du chef des populaires ici présent. Pour faire bonne mesure, je l'attrapais par la tignasse et le traînait dehors, jusqu'aux poubelles. Revenant auprès du petit groupe, je lançais :
-Quelqu'un souhaite le rejoindre ? Je marquais un temps de pause, le temps d'étudier leurs expressions. Alors dégagez. Quant à vous deux, ajoutais-je d'un ton plus enjoué comme si rien ne s'était passé, un thé, un café, un cocktail sans alcool ?

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Touch me again and I'll rip out your rib cage and wear it like a vest.

Décembre 1869

Deux jours. Cela faisait déjà plus de 48 heures que Kingsteen prenait la tête à son père pour aller sur Terre. Pourquoi ? Pour Tallie, bien évidemment ! Ils avaient fouillés tout Elvendyr, mais impossible de la trouver alors il ne restait qu'un endroit pour Kingsteen où ils n'avaient pas encore cherché : c'était sur Terre. Et avec son père l'ange, il pouvait aller là-bas, d'un claquement de doigts ! Et que Aeglos se rassure, une fois qu'il aurait au moins vu un endroit, Kingsteen serait capable de se déplacer tout seul, comme un grand garçon, et n'aurait donc pas besoin de son paternel pour évoluer dans ce monde que notre petit King ne connaissait absolument pas. C'était l'avantage de son pouvoir : de créer des portails vers les endroits qu'il a déjà visité. Un pouvoir qu'il garde secret, parce qu'entre de mauvaises mains, ce dernier pourrait causer des ravages.

Alors ce jour là, à ce moment précis de la journée où le père et le fils notent le rapport de la dernière réunion, l'ange se tourne vers sa progéniture.

Allez viens, petite visite à Revealdown.

Il avait dit ça en poussant un soupir. Teeny sait ce que ça veut dire : qu'il accepte de l'y amener mais qu'il ne cautionne pas. Qu'il le fait juste parce que son fils lui a trop prit la tête et qu'il n'a pas envie d'avoir de remords lorsqu'il fermera les yeux ce soir. Oui, Aeglos n'est pas capable de comprendre cette obsession que son fils a besoin de trouver Tallie. Mais pour Kingsteen, c'est normal : cette fille, sa fiancée qu'il ne connaissait pas mais qu'il a commencé a apprécier, a disparue. Comme ça, comme par magie. Et personne n'est capable de la retrouver ! Hors King le sait : elle ne serait pas partie comme ça, pas sans une bonne raison. A moins qu'il ne lui soit arrivé quelque chose de grave. Et tant qu'il ne la retrouvera pas, tant qu'il ne la verra pas en s'assurant qu'elle va bien, il n'arrêtera pas de la chercher. Et tant pis si elle lui dit qu'elle ne veut pas l'épouser, il l'acceptera et arrivera à convaincre leurs parents qu'il peut se marier avec quelqu'un d'autre. Même si ce n'est qu'une histoire d'argent... il y a bien d'autres femmes et d'autres hommes sur Elvendyr pur eux non ?

Merci père.

Le duo finit par disparaître et... Revealdown. Voilà que Kingsteen se trouve pour la première fois sur Terre. C'est... Différent ? Le paysage est beau, mais ça n'a rien à voir avec son Royaume. Topaz est magnifique, mais cette terre a autre chose, un truc particulier qui lui plaît bien quand même.

N'oublies pas de revenir pour dormir.

Teeny fit un petit sourire et un signe de tête avant de regarder Aeglos disparaître. Bien. Au moins son père ne veut pas rester à ses côtés. C'est plus agréable. Il se sentira plus libre sans son père l'ange coincé qui ne sait pas s'amuser. Poussant un soupir il se met alors à marcher. Il évite quand même les gens. De toute façon sa tenue semble... se remarquer légèrement. Elle dénote totalement avec ce monde. D'ailleurs... ces trucs qui roulent, c'est vraiment étrange. Cette Terre est étrange. Il ne connait vraiment rien de ce monde.
Ses pas finissent par se faire arrêter par des cris un peu plus loin et un groupe de garçon qui se fait mettre dehors.

Phoebe : (...)

Drôle de manière de traiter ses clients. Mais ça intrigue Kingsteen. Et puis ne dit-on pas que c'est dans les bars que l'on trouve les meilleures réponses ? Il ne sait pas. D'ailleurs, ce qui est très étrange, c'est qu'il serait incapable de savoir si Tallie s'est présentée sous ce nom ou si elle n'a pas une autre identité. Et il est incapable de dessiner comme elle sait le faire. Et encore plus incapable de sortir une photo d'elle. Parce qu'il n'en possédait pas, tout simplement.
Entrant dans ce fameux bar, portant le nom The Devil's Tail comme indiqué sur la pancarte, King se dirige doucement vers le comptoir. Il repère rapidement la serveuse qui a mit le groupe de garçons dehors mais... il doit avouer qu'il n'a pas peur. Alors quand elle arrive devant lui il lui fit un petit signe et lui offre un charmant sourire.

Bonjour Mademoiselle. Serait-il possible d'avoir euh... Qu'est-ce que vous servez en fait ?

C'est vrai ça. Est-ce que les boissons de ce monde étaient identiques à celles qu'il pouvait trouver dans le sien ? Il ne savait pas. Mais il préférait demander. Quitte à passer pour un abruti parce qu'il ne connait pas les boissons.

Loukoum

Kingsteen & Phoebe

« Que celui qui combat les monstres prenne garde dans sa guerre à ne pas devenir un monstre lui-même. À force de plonger trop longtemps votre regard dans l'abime, c'est l'abime qui entre en vous. » Friedrich Nietzsche

De retour derrière mon comptoir ( non sans avoir finalement intégré une belle dose de teinture mère de valériane à la boisson de la quarantenaire cocue qui commençait sérieusement à me taper sur les nerfs ), le service reprit plus ou moins normalement. Un taxi les ramena, elle et Gerry à leur domicile respectif. Au moins je ne les aurais pas sur le dos le reste de la soirée ces deux là !
Il y a tout de même une chose incroyable avec un bar : on a jamais le temps de s'ennuyer ! Même lorsque vous pensiez avoir tout vu... vous êtes loin du compte. Vous voulez un exemple ? Prenez ce jeune homme d'une vingtaine d'année, à la tenue absolument rocambolesque, qui venait de franchir la porte d'un pas assuré pour mieux se diriger... tout droit vers le comptoir. Allons bon, un barjot de plus.
...Je suis d'accord, il ne faut pas ( toujours ) juger les gens au premier regard ( mais souvent quand même. Question de survie ). Mais soyons franc, qu'est-ce que c'est que cet accoutrement ? C'est pourtant pas carnaval...
-Bonjour Mademoiselle. Serait-il possible d'avoir euh... Qu'est-ce que vous servez en fait ?
Awww... Un mormons. Mouais, ça se tient. Un mormons émancipé, qui ne sait rien de ce à quoi ressemble le monde à l'heure actuelle et qui a attrapé les premières fringues qui lui passaient sous la main, en pariant sans doute que sur... oysh, allez savoir.
-On sert les habituels, thé, café, soda, alcool... tenez, la carte, ajoutais-je en lui tendant le carton plastifié des choix.
A tous les coups ce type ne tient pas l'alcool, va être bourré au bout d'un verre et va s'écrouler lamentablement de tout son long après s'être assommé sur le chambranle de la porte, parce qu'il aura loupé la sortie. J'ai déjà materné un ivre mort et une que j'ai foutu volontairement K.O, j'ai fais ma bonne action de la journée les gars ! Comptez pas sur moi sur ce coup !
-Vous... venez auditionner pour Derek ? demandais-je en lançant un regard appuyé sur ses vêtements.
Évidemment, je connaissais déjà la réponse. Derek faisait les auditions lorsque le Devil's était fermé... à moins qu'il n'ait engagé l'énergumène pour faire un show ce soir ? ...Naaaon. Je le saurais...

fiche by disturbed

Touch me again and I'll rip out your rib cage and wear it like a vest.

Décembre 1869

Phoebe : (...)

Les habituels. Pour elle oui, ça a l'air d'être habituel. Pour Kingsteen... En fait si, ça ressemble aux boissons de son monde. Enfin presque. A Elvendyr, il y a un petit quelque chose de magique qui flotte dans chacune des boissons. A moins que ça ne soit juste son imagination. Enfin bref. Attrapant la carte qu'elle lui tend, il lui fit un petit signe de tête et la parcourt quelques temps des yeux. Que choisir ? Un alcool ? Il en avait bien envie. Mais... il ne voulait pas non plus se faire remarquer. Peut-être qu'il devrait se contenter d'un café. Non, en réalité il n'aimait pas trop ça. Il en buvait pendant les réunions simplement pour faire comme les autres, comme son père principalement, mais ce goût était toujours ignoble. Alors... quoi prendre ?

Phoebe : (...)

Quittant la carte des yeux, King les pose sur la serveuse qui semble le détailler. Oui, son paternel aurait pu le prévenir que leurs habits sont un peu... étrange. Enfin, vous me direz, un costume, une cravate bien serrée et une veste en cuir noir est-ce que c'est totalement démodé ? A voir que les gens dans ce bar semblent habillés de manière... plus simple et décontractée, peut-être. Et puis le mélange des styles... ne doit peut-être pas convenir à la terre, tout simplement. Son costume doit aussi faire "mode de l'an dernier", mais il s'en fiche. Il lui va bien.

De...rek ? Non. Je ne connais pas de Derek. Par contre je veux bien un soda s'il vous plaît. Celui-là.

Il lui pointa la boisson qu'il souhaitait sur la carte puis la lui tendit avec un charmant sourire.

Quel genre d'auditions vous faites passer ici ?

Curieux ? Oui. Il avait hâte d'en apprendre un peu plus sur la terre. Comme apprendre à connaître ces trucs dehors qui passent parfois à une vitesse folle et qui font bien plus de bruits que les sabots de chevaux.

Loukoum