Margot « Sephira » Queen
broken wings
| Lors de ce doux temps, bien avant qu'on parle de ce petit merdeux de « J.C. », ma tronche de cake est apparue dans ce monde apocalyptique qui s’avère être la belle Elvendyr, sur les Terres de Lumière. Vous pouvez le calculer au nombre de squelettes dans le placard, je déclare avoir en apparence 30 ans, en réalité 2091 automnes. Puisque que je n’ai pas eu l’occasion de choisir la chaumière dans laquelle je suis arrivé, ma classe sociale appartient à celle des hurluberlus riches, ceux qui pètent des paillettes et chient des arc-en-ciel en or. Défais de ce moule, c’est ce qui m’aspire joyeusement à devenir wedding-planner, ces temps-ci que vous avez le malheur de croiser aujourd’hui. Dans les grandes confessions, je peux également vous annoncer que je suis célibataire, peut-être mariée quelque part ... Disons, que j'ai fait quelques séjours à Végas et que l’étiquette de pansexuelle se colle à mon front. Qu’est-ce qui me rend si spécial à vos yeux de biche émerveillée ? Bah, voilà je suis un ange, un être fait de lumière, d'une puissance rare et supposée d'une pureté sans failles ... Mais y a eu quelques coups de canifs dans le contrat ses trente-neuf dernières années. Avec tout ça, j’appartiens à la classe des dusk till dawn et qu’avec tout ça je me vois être d'une grande aigreur à propos d'Elvendyr. Rooyaume perdu, quasi-oublié, renié. Sans comprendre pourquoi, les gens me comparent à Summer Bishil. Mais l’habit ne faisant pas le moine, comme on dit ! Je suis de nature spontanée mais je ne veux pas que le choix de mon élément et pouvoir soit un choix du staff. |
Margot. Margot est ce nom terrien qu'elle s'est choisie, reniant celui qu'elle s'est vue attribuée à sa naissance d'ange. Qu'elle ne prononce plus depuis son bannissement forcé sur cette planète. Sephira la douce, l'ingénue, naïve et influençable, persuadée de véhiculer le bien et la pureté ... Envolée ! Ou plutôt, aplatie comme une crêpe, les ailes écrasées à coups de millions de bottes crottées. Dure fut la chute,
ave soit la Reine Margot !
Margot est exubérante. Margot est bruyante. Margot aime rire et s'esclaffer. Margot boit comme un trou. Margot se remarque, à défaut d'être toujours remarquable. Margot a un goût sûr en tout, sauf pour les hommes, qu'elle choisit toujours perdus, brisés, qui la quittent et qui la font pleurer. Margot est intelligente, et tellement stupide à la fois.
Margot a fait deux grosses bêtises dans sa vie. Margot s'est mesurée à plus fort qu'elle durant la Guerre et a été propulsée hors d'Elvendyr. Alors, Margot, cette imbécile, était du mauvais côté quand le passage s'est refermé. Mais comme Margot n'apprend jamais vraiment, elle a merdé une autre fois et il y a trente ans, elle a donné naissance à un enfant. Margot a un petit garçon, qui, d'ailleurs, n'est plus si petit que ça. Un semi-ange, une moitié d'être humain. Margot sait qu'il mourra un jour, parce que lui n'est pas immortel et décidément, Margot se dit et se répète qu'elle est, mais alors,
vraiment stupide.
Margot n'est jamais parvenue à ne plus aimer les gens, malgré tout ce qu'elle a vu, même s'ils sont parfois absolument monstrueux. Margot a une âme sœur, qui s'appelle Lestiel. Margot donnerait tout pour lui, sa moitié, son autre qui l'a suivi jusque dans ce monde. Margot lui a dit merci, une fois, mais elle n'est pas sûre qu'il ait entendu, vu qu'il lui a proposé un whisky à la place.
Margot est un concentré de forces de lumière pure. Sauf que Margot, ses pouvoirs, ça fait longtemps qu'elle ne s'en sert plus. Margot porte les stigmates de son Royaume perdu. Gloire à Margot, la reine n'est pas morte !
TAKE A BITE OF THIS WORLD WHILE YOU CAN
La chambre sent la mort. Elle empeste l'attente de la Faucheuse, planquée dans un coin, lorgnant sur le cadavre qui lui appartiendra bientôt. Margot la connaît bien, cette odeur. Deux mille ans qu'elle lui tapisse les narines à chaque coin de rue ou de couloir. Alors, pensez-vous, elle la reconnaîtrait entre mille ! Pourtant, ce n'est pas tant ce qui l'obsède quand elle entre, que la silhouette frêle somnolant dans un vieux fauteuil. «
Je vous laisse. » La femme a l'air pincé que l'ange lui a toujours connu. Trois décennies qu'elle a l'air d'avoir mordu dans une citrouille quand elle la voit, son ex belle-sœur. Dommage qu'elle n'ait pas un aussi joli sourire que le légume. «
J'étais sûr que tu viendrais. Sam en doutait, mais moi, je le savais. » intervient l'homme au fauteuil, tout maigre, tout malade. Tellement diminué. Un coup au cœur de la brune. Elle qui l'a connu si vaillant, si gaillard. Il ne reste plus grand-chose de l'homme qu'elle a connu. Pourtant, Margot sourit et Clive a l'impression que cette simple esquisse remplit toute la pièce de lumière. «
J'aurais pas manqué ça, tu penses ! » Elle n'a jamais les bons mots. Elle est maladroite. Mais c'est pour ça qu'il est tombé amoureux d'elle, il y a trente-deux ans. C'est exactement la raison pour laquelle il l'aime encore, trente-deux ans plus tard. «
Approche-toi. Le cancer n'est toujours pas contagieux. » Elle s'exécute. Bientôt, elle est tout près de lui. Clive hume les effluves de ses cheveux que charrie le vent par la fenêtre ouverte. Leurs doigts s'enlacent, elle s'accroupit devant lui, pose sa tête sur ses genoux cagneux. Lui, il sent les médicaments et la lessive. Les larmes lui montent aux yeux mais Margot les réfrène. Inspire. «
Je peux pas guérir ça. » Sa main libre caresse les mèches sombres de son ancienne compagne. Il est plus serein qu'elle. La mort ne l'effraie pas. Elle fait partie de la vie. «
Je sais. Je sais bien. Je voulais juste ... Te voir. Avant que tout s'arrête. » Elle relève la tête. Ses lèvres forment une moue tressautante, entre enfant boudeuse et adulte contrariée. Margot, qui n'est ni plus une enfant, ni tout à fait adulte. Margot est un ange. Déchue. Ça aussi, il le sait depuis longtemps, même si au début, il ne l'a pas cru. «
Est-ce que t'as mal, Clive ? » Il hausse les épaules. «
Un peu. » «
Laisse-moi t'aider pour ça, au moins. » Il secoue la tête. Il a de la morphine, les soins palliatifs. Et puis, elle est là. Elle a toujours su soulager tant de maux. «
Rends-moi un autre service plutôt. » «
Lequel ? » «
Sam. Il faut que tu t'occupes de Sam. » Un soupir. Sam, c'est un sujet compliqué. De discorde, de bonheur et de détresse. Sam, c'est leur tout, ce qui les unit et à la fois, ce qui les sépare. «
Il est grand. Il a jamais eu besoin de moi, ça va pas commencer maintenant. » La caresse passe de ses cheveux à son menton volontaire, buté. Toujours si sûre d'elle et à la fois bourrée d'insécurités. «
Tu es sa mère, Margot. » «
C'était Jenna sa mère. C'est elle qui l'a élevée, elle qui l'a aimée comme j'ai pas été foutue de le faire. Moi, je l'ai juste mis au monde et je te l'ai laissé. C'est pas une mère, ça, Clive. » Il n'avait pas un an quand elle a quitté la maison. Épouse inutile, mère indigne. Clive le lui a pardonné des années auparavant. Mais Sam ... Ah non, Sam, jamais ! «
Sauf qu'il n'a plus que toi. Jenna est partie et moi, c'est pour bientôt. Margot, s'il te plaît ... » Elle voit qu'il fatigue, cherche ses mots. Son beau et grand amour. Réduit dans sa plus stricte humanité. «
... Occupe-toi de lui. Tu me dois bien ça. » Elle pique un peu du menton. Il a raison. Il a tout assumé, tout accepté d'elle. «
Il voudra jamais ... » marmonne-t-elle, absolument certaine de ce qu'elle affirme. «
Le temps au temps, Margot. Le temps au temps. » Ses yeux se ferment quelque peu. Il va s'endormir. Il est si fatigué et elle, si impuissante. «
Je t'aime. Tu le sais ça, hein ? Malgré tout ce que j'ai fait et pas fait, malgré mon abandon, malgré mes conneries, malgré les autres après toi ... Tu es mon grand amour. » Les pupilles de l'homme réapparaissent, il s'empare de ses lèvres avec une vigueur qui lui rappelle tous ces jours, toutes ces nuits partagées. De si belles années. Un malade de soixante-dix balais dont la flamme s'éteindra sous peu, mais qui brûle encore pour elle. Elle s'y accroche un instant, lui rend son affection. Il va tellement lui manquer. «
Tu me chercheras chez les anges, ma reine. On se retrouvera là-bas. » Un faible sourire éclaire le visage de la brune. «
Promet. » «
Juré. » Des adieux comme on en souhaiterait tous.
La porte se referme derrière elle un instant plus tard. La vieille chouette n'est pas dans les parages. Ouf. Elle a assez vu sa tronche de goule pour la journée. C'est une autre tête, toute aussi familière, qui manque de lui foncer dedans. «
T'es venue ... Putain. » Sam, bien sûr. Elle crève d'envie de le prendre dans ses bras. Son fiston. Si beau. Si grand. Qui lui ressemble tellement. Jusqu'à l'âge, qu'ils ont presque en commun. «
Jure pas devant ta mère, il paraît que ça se fait pas. » Un rire cynique échappe au garçon. «
Tu n'es pas ma mère. » Qu'est-ce qu'elle disait, hein ? «
T'aimerais bien. » Il secoue la tête, déjà las de cette petite joute. «
Ton père ... » «
Va mourir, je sais, merci pour l'info maman. Et tu peux rien faire ? Avec tes super pouvoirs, là ? Qu'ils servent à quelque chose ? » «
Alors, non. Je guéris pas le cancer, Sammy. Et change de ton. Je t'ai peut-être pas élevé, mais la cicatrice sur mon bide me fait dire que j'ai le droit de t'en coller une si tu me manques encore de respect. » Margot est une gentille fille. Pas bien violente, toutefois, sanguine et détenant l'autorité de ces puissants qu'elle a dû quitter. S'opposer à la Reine Margot revient à s'attirer quelques ennuis. Sam le sait. Alors, Sam se garde bien de répliquer. Et l'ange réalise qu'elle y a peut-être été un peu fort. Son bébé souffre. Elle se radoucit. «
Sammy ... » «
Laisse tomber. Je vais aller le voir. » Il tente de la contourner, elle le retient. «
Il dort, là. Il faut qu'on parle un peu. Est-ce qu'ils se sont réveillés ? » Aussitôt, elle sent le jeune homme sur la défensive. Un mouvement de recul qui ne trompe pas. Elle avait presque espéré qu'il n'aurait rien hérité d'autre d'elle que ses yeux. Visiblement, le pauvre a aussi écopé d'un autre genre de gênes. Beaucoup plus encombrants. «
Je vois pas de quoi tu parles. » Cette fois, il la contourne. L'abandonne dans le couloir. Elle n'a plus rien à faire ici. De toute façon, elle doit rentrer à Revealdown. La Source l'appelle. Le passage est rouvert. Elle le sent aussi sûrement qu'elle a perçu la maraude de sa copine en cape noire. Après trente-neuf ans de bannissement, Sephira va rentrer à la maison et bientôt, son fils devra l'y rejoindre. Qu'il le veuille, ou non.