@Soraya McKenzie @Derek Morrow

19h h 00. Emily Reddick se dirigeait, les pieds traînants, vers l'inconnu, un terrain plus que glissant et jamais emprunté. Ce soir, elle n'était pas seule mais accompagnée. Ses beaux-parents ainsi que Isiah, son fils de huit ans, la soutenaient. Ses proches l'amenaient à sa première réunion des alcooliques anonymes. La honte ! Comment Red en était-elle arrivée là ? Il s'agissait d'une histoire simple. Em' avait un réel problème : l'alcool. De coutume, la brunette se cachait pour s'adonner à cette addiction. Cette grande amie l'aidait à oublier sa vie merdique et surtout la douleur d'avoir perdu son amour de toujours. Ses employés ne demeuraient pas dupes. La trentenaire ne sortait pas de son bureau et parfois, elle attendait la fermeture pour quitter cet endroit, afin d'éviter d'être vue. Parfois, elle ne possédait pas le choix. Elle devait intervenir. Alors, elle dissimulait mal son état. Elle donnait l'illusion en se servant de son pouvoir pour divertir autrui. Or, cela ne suffisait plus. Lors de sa dernière garde, elle avait accueilli Isiah dans un instant discutable. Avec l'oubli, elle s'était abandonnée à l'écoute de sa vicieuse pote : la bouteille. Alors, elle n'avait pas assurée et Isiah avait appelé ses grands-parents pour qu'ils interviennent d'où ce moment de pure gêne. Une décision avait été prise. Emily ne rencontrait plus le choix, pas d'échappatoire. Présentement, son fils lui lançait un : fais-le pour moi maman, pour nous. Comme elle le perdait de plus en plus, elle tenait à le récupérer. Elle ferait tout pour reconquérir son fiston. Après un léger sourire, Reddick s'avançait dans la salle qui représenterait un lieu de confidences. Discrètement, elle s'asseyait à une place, située au fond. Em' n'assumait rien. Or, elle devait assurer... . La séance allait débuter. Emily espérait ne pas devoir se livrer dès le premier rendez-vous. Cela l'incommodait beaucoup. La situation ne plaisait pas du tout à la propriétaire de l'Alabama Bar.

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Figure livide comme le marbre d’un lavabo, pour des pommettes rongées par une sombre barbe pas rasée depuis des mois. Yeux bouffis, baveux comme deux œufs imbibés de beurre, pour des cernes bleutés creusés là et qui me retombent pratiquement jusqu’aux narines. Impassible, d’apparence, tout du moins, pour un état d’esprit fulminant d’appréhension et bouillonnant de rage. Le reflet qui se réfléchit  sur le verre de la porte vitrée, il appartient à celui d’un homme que je reconnais à peine et me révèle une apparence que je néglige depuis foncièrement trop longtemps. J’ai une sale gueule. Une sale gueule de bois, ouais ! Pas besoin de vous dire, que je me dirige d’un gigantesque pas de recule, à cet endroit. Bastion d’une civilisation de pauvresses chouineuses, asservies à la déprime et à l’infernale spirale des dépendances. Des âmes fêlées, criblées de vices, qui pour exorciser leurs petits bobos purulents, trouvent comme médecine, rien de mieux à faire que de se livrer boyaux sur table au alentour d’un petit cercle intime et condensés d’inconnus boiteux. Ugh ! Je déteste le meeting des Alcooliques Anonymes ! Je n’y retrouve aucun réconfort et ressors ordinairement de là avec le moral dans les choux. Entre les discours déprimants qui te font sentir comme une merde, (parce qu’il y a toujours un petit Jérémy, quelque part, qui souffre plus que toi) et une plèbe d'hypocrites qui applaudissent ta bonne volonté en souhaitant intérieurement que tu te plantes, il ne reste peu de place pour l’optimisme…

Et ouais, le clown que je suis, il en n’est pas à sa première tentative et à sa première visite chez les AA. Comme la première fois, comble de l’ironie, c’est qu’une infime partie de moi espère que cette fois-ci sera la bonne. La bonne foi et l’espoir, elles sont deux flammes bien fragiles, qui éclairent les ténèbres de mon âme avec un faisceau lumineux bien piteux, mais qui pourtant résistent au moindre souffle d’agonie et ne cessent d’onduler comme des succubes. Bref, après avoir écrasé de mon pied cette cloppe grillée jusqu’au filtre, c’est le torse gonflé, pour des poumons dangereusement emboucanés, que j’attrape la poignée de porte et plonge enfin le pif dans ce que je redoute plus ! Dans la salle improvisée à son activité de ce soir, j’y retrouve une maigre ribambelle de visages parfois familiers, parfois inconnus, parfois en petits groupes, parfois seuls, qui conversent entre eux, ou parfois tout seuls (comme quoi la santé mentale peut véritablement toucher tout le monde). C’est en souhaitant bénéficier d’un certain répit, puisque mort de trouille, mort de honte, que je me dirige vers le buffet communautaire, pour attraper on the go et café et beignet.

Armé du nécessaire, c’est la moue résignée, qui appartient normalement à celle d’un condamné à la chaise électrique, que je me dirige vers l’assemblée de chaises dispersées, pour y laisser choir mon précieux séant sur l’une d’elles et plonge les canines dans la pâtisserie. Les lippes enduites de sucre à glacée, la bouche pleine, c’est dans ce merveilleux hasard que mes opales rougies de fatigue se posent sur la porcelaine d’une brunette qui ressemble étrangement à la bouille de ma meilleure amie---What the f---?

- B-Em’ ?! Bonté b'ivine, tu baises b'oi ichi ?! Que je ne peux m’empêcher de lui murmurer, la bouche bourrée de pâte et obstruant bien évidemment l’articulation de ma surprise.

AA, WHAT SO SERIOUS ? @EMILY REDDICK @DEREK MORROW @SORAYA MCKENZIE

Je marchai d’un pas lent vers la salle qui allait abriter la réunion des alcooliques anonymes de ce soir. Une réunion où j’allais pour la première fois mais que j’étais obligée de suivre pour garder mon boulot. Il était près de 19h00 et la séance allait commencer, il fallait que je me grouille, j’étais encore chez moi et j’allais rater l’occasion de ne pas être mise à pieds au boulot. Parce que, mine de rien, je tenais à ce boulot, je n’avais plus que ça en fait. Enfin, sans parler de mes amis, je dois bien avouer que sans eux, je me serais déjà foutue en l’air.

J’arrive enfin à la porte de la salle où se passait la réunion, j’arrive à temps, je vois quelqu’un demander le silence et je comprends que j’suis arrivée à temps. Mais, déjà, je me sens mal d’être ici et j’aurais préféré rester en tête-à-tête avec madame vodka qu’être ici. Foutue cuite qui m’avait poussée à utiliser mon arme sur un homme innocent. Je l’avais pris pour le coupable et je croyais qu’il allait tirer sur mon co-équipier, Jared Griffin, mais en fait, il ne faisait que sortir sa plaque pour prouver qu’il travaillait pour le FBI. Foutue bavure qui n’était pas passée inaperçue évidemment, le FBI avait demandé à mes chefs des comptes et là, ils ne pouvaient plus passer au-dessus de mes incartades. Ils m’avaient donné un choix : soit je devenais sobre, soit j’étais virée. Evidemment, en attendant, j’étais écartée pour un petit temps et j’allais devoir faire mon choix. J’avais eu une conversation intéressante avec Jared qui m’avait convaincue d’y aller, me proposant même de m’accompagner si je le souhaitais. Je préférais y aller seule, j’avais déjà assez honte comme ça.

J’entrais donc discrètement dans la salle et m’installa à une place derrière tout le monde mais mon attention fut vite reportée sur deux têtes que je connaissais bien, deux de mes meilleurs amis, Emily et Derek. J’avais justement eu des conversations intéressantes sur nos états de dépendance à l’alcool ces jours-ci et ce fut une surprise pour moi de les voir là. Justement, une chaise se trouvait juste derrière eux et je me relevais pour venir les rejoindre.

« Em’, Derek ! Je ne m’attendais vraiment pas à tomber sur vous ici ! Derek, merci d’avoir un peu écouté ce que je t’ai dit la dernière fois ! »

Je l’avais coffré et j’avais eu une discussion sur le fait qu’on se détruisait à petit feu. Quant à Em’, elle m’avait vu dans un sale état tant de fois et la dernière fois, elle m’avait fait comprendre certaines choses. Si je n’avais pas eu ces conversations avec eux aussi, je n’aurais certainement pas fait le pas de venir jusqu’ici.

« Tu partagerais pas un peu de ton trésor avec les filles, Morrow ? »

Je donne une petite tape amicale dans le bras de mon ami qui se goinfrait de gâteaux qu’il avait certainement été cherché au buffet.

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Emily Reddick rêvait de faire demi-tour mais elle ne pouvait pas agir ainsi. Ses beaux-parents et son fils devaient l'attendre à l'extérieur. Ils la connaissaient trop bien. Em' fuyait ses responsabilités. Il fallait qu'elle pense à Isiah, son fils de huit ans. Il méritait une mère plus efficace que cela, plus impliquée et plus stable. Red devait « se réparer ». Elle était complètement brisée depuis quelques années, depuis la disparition de son mari. Elle se perdait en route, elle n'arrivait pas à remonter la pente. Serait-elle capable d'effectuer des progrès et de retrouver un semblant de vie plus équilibré et positif ? Elle pourrait peut-être s'occuper un peu plus de son enfant. Pour le moment, elle n'en avait pas la garde. La justice ne lui faisait pas confiance. Reddick restait trop fragile mentalement pour apporter le meilleur à son gamin. Alors, elle devait se soigner. Isiah représentait tout pour elle, il fallait avancer pour lui.

Dans la salle, des têtes connues dont celles de quelques habitués de l'Alabama Bar. Vraiment la loose..., pensait la brunette. Elle devrait assumer son problème ou elle mentirait. En effet, elle pouvait accompagner quelqu'un. Les clients ne se gêneraient pas pour divulguer l'information. La patronne de leur bar préféré se situait dans une réunion des alcooliques anonymes. Cette soirée débutait très mal. Les minutes ne passaient pas du tout, cette réunion promettait d'être longue pour Em'. Cette dernière fut subitement interpellée par une personne présente dans l'assemblée. Il s'agissait de Derek Morrow : son meilleur ami. Emily reconnaîtrait sa voix entre mille. Que faisait-il là ? Actuellement, il se gavait et il parlait doucement mais la bouche pleine. Un vrai petit comique !

Très sexy ! J'aimerai mieux être là pour ça, tu te doutes bien. Vraiment ? J'sais pas ce que j'fous là. Et toi ? Une autre personnalité venait les rejoindre : Soraya McKenzie. Salut So', p***** on vit un sketch ! On s'casse les gars ? Mckenzie se montrait plus décontractée. Derek ne paraissait pas stressé également. Red sentait qu'elle ne possédait pas sa place ici. Que faire ?

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Quelles sont les chances ? Quelles sont les possibilités ? Le pourcentage se dresse à combien d’échelons, sur mille ? Deux. Pas une, mais deux ! Deux de mes bonnes et meilleures amies se retrouvent là. Comble de l’ironie, hasardeusement comme ça, il a fallu que nos miches viennent se poser sur un alignement de chaises qui se succèdent, de manière à ce qu’il nous devienne inévitablement impossible de s’éviter ou se louper. Jugeant que la bouchée de pâte a depuis assez longtemps roulée sur ma langue, je déglutis de travers et cette dernière passe dans ma trachée comme un kilo de roches… pour retomber dans mon estomac avec l’effet d’une enclume. Une brûlante gorgée de café pour essayer de faire passer tout ça, mes deux pierres de zéphires ne cessent de jouer la navette entre les deux brunes. Pourquoi je suis embarrassé de les retrouver ici ? C’est n’est pas comme si nous étions en train de faire la queue, à la pharmacie, avec les mains emplies de crèmes pour se guérir d’une ITS ou hémorroïdes ! Il n’y a rien de gênant, en ce scénario-ci ! Alors pourquoi ai-je cette impression de vulnérabilité et de mise à nue ?

La bible nous enseigne à s’aimer les uns les autres, mais dans ma vision de voir les choses, j’ai toujours tendance à me dire que le Kamasutra nous apprends à accomplir plus amples encore ! Em’ à raison, si seulement nous étions là pour baiser, finalement. À la taquinerie de Soraya, dont il s’émane de chez elle un relax take it easy que j’aimerais bien posséder, malgré tout attendri, je lui présente la pâtisserie sous le pif alors que le café vient rejoindre les mains d’Emily. Cette manière bien à moi, de reproduire avec mes deux copines d’enfance, un « Buvez/mangez-en tous, car ceci est mon sang/chair livrés pour vous » et putain mais ces réflexions chrétiennes me sortent littéralement du cul ! L’ambiance des AA, sans doute. Et l’idée de se casser d’ici, à peine, elle m’effleure, maintenant…

- Ce matin, je me suis surpris à m’être endormi en cuillère avec le clodo du centre-ville. Mignon comme tout, il a eu la présence d’esprit de me laisser dans les mains, la bouteille de whisky qu’on s’est sifflé tous les deux… il m’a même partagé son sac de couchage.

La honte de ma vie. Après on s’étonne, que je sois ici ? Une œillade gredine dressée aux filles, j’ajoute :

- C’est quoi votre histoire ? Qu’est-ce qui vous emmène sur le chemin de la rédemption, ce soir ?

À peine ai-je le temps de m’en faire et enfin m’intéresser aux conjonctures des deux brunettes, qu’une voix tonitruante explose à côté de nous et s’exclame :

- OH. MON. DIEU. AGENT MCKENZIE ET MADEMOISELLE REDDICK !? OH. MON. DIEU ! J’Y CROIS PAS !

What the…

- Vous vous souvenez de moi ? Stefan Albatros, un habitué de l’Alabama Bar et fidèle citoyen junkie qui a à de nombreuses reprises diverti le service de police ! Oh. Mon. Dieu. Les filles, vous êtes une source d’inspiration pour moi ! Je vous aime tellement…mais tellement !

Il y a vraiment quelqu’un qui possède « Albatros », comme nom de famille ? Totalement invisible aux yeux de ce fangirl, ce dernier ajoute :

- C'est la soirée des témoignages. Vous allez montées sur scène et nous confier vos palpitantes histoire, dites ? Hiiiinnnn, dites ?

Sérieusement, dude ?

AA, WHAT SO SERIOUS ? @EMILY REDDICK @DEREK MORROW @SORAYA MCKENZIE

Comme le monde était bien fait, après avoir eu des conversations sur nos états alcoolisés avec Derek et Em’, nous voilà réuni chez les AA. J’avais plus ou moins proposé à Derek de s’y rendre sans être certaine - je ne pensais pas qu’il viendrait d’ailleurs - qu’il viendrait. Moi, je lui avais promis que je viendrais et j’avais tenu parole. Évidemment, je n’avais pas été enjouée de venir par ici, ce ne fut pas facile mais c’est à mes deux amis que j’ai pensé, c’est eux qui m’ont donné la force de venir. Ils ne le savent pas encore mais c’est bien Em’ et Derek qui sont à l’origine de ma venue chez les AA. OK, c’est aussi le boulot et ce « mini » problème qui m’était arrivé qui avait poussé mes patrons à me reprendre en main... Ça tombait bien, j’avais prévu de le faire mais bon, sans mes amis et mon boulot, je n’aurais jamais fait le pas.

Dès que je vis les deux visages connus, je me déplaçais vers eux pour les saluer. A trois, nous aurions plus de motivation à rester. Derek était encore en train de faire son Derek, bouffant comme un cochon. Et après m’avoir saluée, Em se demandait si ce n’était pas un sketch mais surtout, elle voulait déjà baisser les bras. Je fis la moue, maintenant qu’on avait fait le chemin jusqu’ici, c’était pas le moment de repartir... Je motivais donc les troupes alors que Derek me fichait son gâteau sous le nez, je le repousse doucement avec ma main et prend la parole :

« Ah mais non, tu l’as déjà bouffé ! Em’, on ne va pas partir maintenant ! On a fait l’effort de venir, autant rester non ? Motivons-nous les gars ! »

Je savais que ma petite phrase de fin allait bien les faire rire mais je le pensais réellement : à trois, nous serons plus forts, non ? Derek reprit la parole et expliqua pourquoi il s’était enfin décidé à venir, il s’était endormi avec un clochard, c’était son franc qui tombait ça. Je ne voulais pas le juger mas j’étais heureuse que cela lui donne envie de venir jusqu’ici. Enfin, entre nous trois, je semblais être la plus à l’aise, enfin, ça n’était qu’une image parce qu’au fond, je représentais quand même la police et ça la foutait mal si je tombais sur un ancien criminel... Pour l’image, on repassera... Puis, il nous demanda quelle était notre histoire à nous deux et j’allais y répondre quand on entendit quelqu’un hurler le nom de mon amie et le mien. Stefan Albatros, un habitué de l’Alabama Bar, se présenta-t-il, il a aussi fait un tour au commissariat. Et effectivement, je le reconnais, je n’aurais jamais retrouvé son nom mais sa tronche de con, je la reconnaîtrais entre mille. Son attitude de petite fille qui rencontre son boys band préféré me saoulait et j’étais certaine qu’il saoulait aussi mes amis. Il nous demanda si on allait témoigner... Euh... Non, je crois pas non....

« Moins fort, ce serait mieux et ça ne paie pas plus cher ! »

Dis-je un peu froidement avant de rajouter :

« Ça ne sera pas pour moi le témoignage ce soir, désolée mais vous, vous devriez aller parler, je sens que vous avez des choses à nous dire ! »

Dis-je avec un petit sourire, je me moquais un peu de lui mais bon, son attitude, franchement ???

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Les trois amis se retrouvaient au même endroit de manière hasardeuse : aux AA. Le destin faisait-il correctement les choses ? Ensemble, ils seraient plus forts. Normalement, tout devrait bien se passer. Ils allaient peut-être apprendre plus d'éléments les uns sur les autres. Quand Derek faisait le pitre, Soraya jouait d'une décontraction déconcertante et Emily prouvait le malaise qui l'envahissait à l'idée de se présenter à ce genre de réunion. Il s'agissait d'une grande première. Sa famille l'y avait forcé. Elle pouvait perdre la garde complète et définitive de Isiah, son fils. Alors, elle devait réfléchir à ses actes. En demeurait-elle capable ? Elle représentait un danger pour son fils. La brune préférait taire l'événement qui l'avait conduite jusqu'ici. Sur ce coup, la honte l'habitait. Morrow avançait un courage monstre. Il partageait sa dernière anecdote. Il était courageux car celle-ci ne le mettait pas du tout en valeur. Il s'était endormi à l'extérieur auprès d'un SDF. Ce dernier lui avait donné son seul bien : sa bouteille de whisky. Ils avaient bu ce liquide tous les deux, comme deux potes qui pouvaient se comprendre. Par contre, Derek précisait, ironiquement, que le clochard n'avait pas eu la présence d'esprit de partager son sac de couchage. Em' posait le café sur la chaise d'à côté. Elle parlait de se barrer. L'idée devenait de plus en plus présente et réalisable. Fallait-il entendre autant d'histoires tristes ? En quoi cela pouvait apporter une quelconque aide ? Sentir qu'il y avait plus minable … franchement, cette perspective n'enchantait pas Red. Elle se sentait déjà nulle alors... cette sorte de thérapie ne l'aiderait absolument pas. Emily ne jugeait pas Derek. Elle se rendait juste compte de ce qui se tramerait si elle continuait à côtoyer cet univers. Ce n'était pas pour elle … . L'homme de la bande demandait aux filles ce qui les amenait en ces lieux. Les mots ne sortaient pas, la vérité plus précisément.

Euh... une histoire sordide également.

Avec la voix stridente de Stefan Albatros, il était très compliqué d'entendre la phrase d'Emily. Ses mots se perdaient dans le lointain. Em' connaissait bien Stef', il squattait l'Alabama Bar très souvent. Il buvait énormément, il perturbait rarement la salle. Il n'était pas plus dangereux qu'un autre. Reddick lui avait déjà parlé deux ou trois fois, rien de plus. Apparemment, il connaissait également Soraya, surtout le lieutenant de police. Cela ne présageait rien de bon. McKenzie le cassait de suite. Elle le coupait dans son élan. Pourtant, il n'était pas si vilain. Il ressemblait à une groupie mais il témoignait son appréciation. Emily devait rétablir un bon dialogue pour éviter de froisser son client, un habitué qui loupait quelques soirs. Allait-il mieux ? La brune l'espérait.

Salut, tu vas bien ? Mon amie a raison, ne t'excite pas. C'est une première pour moi. On t'écoutera plus parler si cela ne t'ennuie pas. La réputation passait après. L'humain prenait le dessus. Bien-sûr, elle ne parlait pas à la place de Soraya : il pouvait la prendre pour une accompagnante. Stefan, je te présente Derek Morrow, vous vous êtes peut-être déjà vus ?

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La proposition d’Emily me fait de l’œil. Je dois le reconnaître. Me carapater, avec elles, fort fort fort loin de cette chambre à gaz et se sauver d’une soirée complètement pourrie à se scruter les petites crottes qui patinent sur nos cœurs usés par le temps et les maux de la vie ?! Bien sûr que cela me séduit ! Il est toujours plus facile d’éviter la merde, que de sauter à pieds joints dedans et la laisser s’incruster dans les craques de nos semelles embourbées. C’est jamais plaisant, que de marcher dans les crottins de clébard, alors pourquoi on le ferait avec nos propres emmerdes, hin ?! À des années lumières de l’optimisme que nous fait preuve Soraya, bien que j’ai la colonne vertébrale aussi tendue que la corde d’un string qui se perd à quelque part dans le trou de balle d’un gros sumo potelé, j’essaie de faire écho à la bonne foi de notre amie et nait à la commissure de mes lippes le doux spectre d’un sourire.

Ma petite anecdote avec le clochard ne semble pas les effaroucher outres mesures et me donne plutôt l’impression d’éveiller en les onyx de leurs pupilles une bien étrange lueur. Mes claires prunelles ne manquant pas de loucher sur Emily qui se veut aussi ostentatoire que le triangle des Bermudes avec ce semblant de réponse évasive qui ne me rassure pas de tout et qu’elle me livre à froid ainsi. Nous sommes tous les trois à la fois courageux et lâches. Trop profondément marqués par le sceau de nos perditions, pour voir au-delà de ces défauts qu’on s’aliène à pointer du doigt, s’emmurant dans nos forteresses de solitudes, pour nous éviter tout funambules flottant en parfait déséquilibre sur le fil rasoir de la vie en générale.

Parlant de funambule en parfait déséquilibre, disons que cette chose au nom à coucher dehors est un parfait exemple de ce que des gueules cassées comme nous trois, on cherche à éviter…

Sourire goguenard aux lèvres, je ne peux m’empêcher de me bidonner dans ma barbe, face aux joutes mesquines que lui balance à la gueule Soraya, alors que le sens des affaires s’accroche aux tripes de la propriétaire de l’Alabama Bar qui essaie de préserver meilleure figure avec l’un de ses clients réguliers. Finalement, avec ce fier partisan qui prône le droit des femmes modernes, la soirée peut se présenter de meilleures augures… il me tarde de voir le petit discours qu’il nous a préparé, celui-là !

Je ne peux m’empêcher de fusiller du regard Emily, qui a eu la condamnable politesse de me présenter à ce boulet fanatique… ce dernier me regard d’ailleurs avec le petit air dédaigneux de celui qui vient de se découvrir dans le froc une ITS.

- Ouais. Non. Sa face ne me rappelle rien du tout, qu’il révèle, condescendant à l’impossible et me regardant de haut comme s’il était juché sur des échasses.

Moi, le cul écrasé sur ma chaise inconfortable, j’hausse bêtement le sourcil et reluque à la dérobée mes deux amies. Non mais c’est quoi son problème, à ce blaireau ?! Est-ce qu’il serait jaloux du lien étroit qui me rallie à mes deux petites puces d’amies ?!

- Tu veux un beignet ? Un café ? dis-je, un rien petit connard de première, pour tâter un peu le terrain et voir l’idée saugrenue qu’il peut se faire de notre petit trio.

- Un vrai gentleman offre ce genre de petites douceurs aux deux magnifiques demoiselles qui lui tiennent compagnie… non à la gent masculine, Derek, que chouine notre ami Stefan, le torse gonflé comme un fier paon alors qu’il fléchit les rotules, pour venir agripper les mains de ses deux idoles et les couvrir de doux baisers.

- Il faut le pardonner, mesdames. Votre ami, j’crois qu’on ne lui a pas enseigné les bonnes manières. Est-ce que je peux vous offrir quelque chose ? Thé ? Café ? Une chaise proche des vôtres et où je pourrais m’asseoir et vous tenir compagnie ? Vous saviez que j’ai fait un petit collage sur vous… du moins… sur les articles du journal local qui vous concernent ?! Je vous aime tellement ! Hihihihihihihihi !

- Euh, Stefan, t’as déjà entendu parler de la petite gêne ? Dans le sens où tes bisous, tes mains, tu les retires de là et les gardes dans tes poches ?

Mes phalanges perdent peu à peu de leurs couleurs, à mesure que mes poings se crispent et que ce freak joue sur les tendons de mes nerfs tels les cordes d’un violon qu’on afflige de bêtise humaine…

Emily et Soraya, c'est sacré.
On regarde avec les yeux, mais jamais avec les mains !

AA, WHAT SO SERIOUS ? @EMILY REDDICK @DEREK MORROW @SORAYA MCKENZIE

Je n’aurais jamais cru que cette réunion tournerait en eau de boudin comme c’était en train d’arriver. Comment une simple réunion entre alcooliques anonymes avait tourné en combat de coq sans que nous ne nous y attendions. En réalité, tout cela partait d’un seul homme, cet imbécile de Stefan qui s’amusait à jouer au plus malin parce qu’il se sentait menacé par Derek ? C’était ça son problème à lui ? Il croyait que Derek avait la chance de nous connaître et ça le rendait fou, il aurait voulu être à sa place ? Qu’elle que soit sa raison, on n’était pas là pour s’amuser à savoir qui avait le plus de chance de nous connaître, savoir qui était le plus gentleman des deux. Franchement, on avait d’autres chats à fouetter. Alors qu’Em’ tentait de garder une certaine camaraderie avec ce type, je perdais – personnellement – patience face à ce comportement plus que déplacer… On n’avait pas élevé les cochons ensemble tout de même. Le pire arriva quand Stefan posa ses mains sur nos cuisses à toutes les deux, nous expliquant qu’il avait des collages sur nous deux, je fis des yeux ronds et dans d’autres circonstances, j’aurais pu éclater de rire face à cette situation mais je lui lançais plutôt des éclairs de colère avec mes yeux. J’attrapais sa main et lui tordis doucement, pas trop pour éviter trop de scandales. J’étais connue quand même, ça aurait pu être de la violence policière tout de même. J’acquiesçai sur ce que venait de dire Derek :

« Comme le dit Derek, tes mains elles retournent d’où elles viennent ! Ne t’avise plus de poser tes mains sur moi sans ma permission, compris ? »

Dans une grimace de douleur, il acquiesça et je le lâchai avant de rajouter :

« Dis-moi t'as quel âge ? Non parce que pour faire des collages sur nous, on dirait que t’as l’âge mentale d’une adolescente boutonneuse ! T’as pas autre chose à faire que de collectionner des photos de nous ! Tu sais, dans ma branche, on te prendrait pour un pervers obsessionnel et on te surveillerait pour être sûrs que tu ne kidnapperas pas l’une de nous deux ! Tu vois l’genre ? En tant qu’adolescente, ce comportement, ça passe mais en tant qu’homme adulte, ça passe moins ! Encore heureux pour toi, on est majeur et vaccinée mais tout de même, poser tes mains sur nous sans notre consentement, ça peut s’appeler du viol ! En plus, avec tout ce qui se passe en ce moment sur le non-consentement des femmes, tu risques gros ! »

J’étais partie dans un monologue mais ce gars me saoulait et je commençais à perdre patience. J’espère que mes amis n’allaient pas trop m’en vouloir. En fait, j’étais certaine que Derek se marrait derrière moi mais Em’, j’espérais qu’elle m’en voudrait pas trop, elle avait un commerce à faire tourner elle… La pauvre… Ca ne devait pas être facile tous les jours avec un énergumène comme lui.

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Emily Reddick remarquait le regard que Derek Morrow lui avait lancé au moment de lui présenter Stefan Albatros. Le mécontentement se faisait sentir. Em' gardait un sourire en coin. Il était vrai que la brune pensait aux affaires. Elle ne désirait pas perdre un client bêtement alors elle restait polie. Un fidèle pouvait ramener du monde. Il fallait conserver une bonne image. C'était important, le côté commerçant de Red ressortait. Elle écoutait la réponse de Derek. Il prouvait son indifférence pour Stefan. La situation était presque comique. Morrow se montrait un peu hautain, comme pour dire qu'Albatros ne valait rien. Pourtant, ils se situaient tous au même point : sous l'emprise d'une addiction, faibles et dépendants. Alors, ils ne pouvaient pas se prendre pour des rois. Derek poursuivait son petit jeu. Emily pensait de plus en plus à partir. Elle ne trouvait pas sa place en ces lieux. Elle pensait à sa bouteille de whisky qui saurait lui apporter du réconfort de retour à la maison. Un combat de coqs se déroulait. Que cherchaient-ils à prouver ? Stefan souhaitait prendre l'avantage. Il se montrait entreprenant. Cela ne plaisait pas au trio. Certains le montraient plus que d'autres. Stefan avançait un côté glauque... . Il dépassait les bornes. Emily ne disait rien pour l'instant. Elle préférait quand-même souligner les valeurs humaines qu'un business. Ce type allait trop loin. Les yeux d'Emily se remplissait de noir. Sa force hors du commun représentait le danger car la trentenaire ne se contrôlait pas toujours. Derek défendait ses amis, un vrai gentleman ! Il semblait à bout, ses poings se serraient. Allait-il commettre une faute ? Soraya aussi, elle perdait littéralement patience. Elle osait un geste agressif et elle déballait un monologue bien dirigé. McKenzie n’oubliait pas son grade et elle l'invitait à se calmer sous peine de subir les conséquences de ses actes au niveau judiciaire. Les deux femmes pouvaient-elles réellement porter plainte à cause d'un collage à la con ? C'était flatteur d'être bien vues mais cela pouvait être pris pour de la perversion, voire une obsession. Il fallait se méfier. Emily bouillonnait. Stefan s'emportait :

Agent Mckenzie, il ne faut pas le prendre comme cela. Vous êtes si parfaite pour moi, un vrai symbole ! Je viole personne, je vous donne juste de l'attention car vous le méritez. Ne faites pas cette tête. Il se tournait vers Derek. Cool man, je ne vais vous les piquer, ne soyez pas si jaloux. Je vais m'asseoir et attendre les témoignages de mes princesses, la séance débute les amis. Red choisissait de se calmer dans les toilettes. Elle n'avait pas entendu la fin de cette altercation. La propriétaire de l'Alabama Bar, faisait les cents pas, dans le lieu choisi pour faire redescendre la température. Elle soufflait mais son envie de détruire quelque chose primait. Sans plus attendre, son poing s'écrasait dans l'une des portes qui cachait un toilette. Ce dernier venait traverser l'objet. Emily retirait son poing pour passer de l'eau sur son visage. La brune marquait peu, son don s'étalait peut-être. Bref... sans regarder les dégâts, la belle s'intéressait à une photo de son fils. Elle prenait sur elle pour revenir. P*****, il m'a saoulé ce con. Merci les gars, vous avez assuré. Il se passe quoi ? Le silence s'installait chez les autres.

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Ça tourne au vinaigre. Oh, que ça tourne au vinaigre, c’te situation ! Bras croisés sur mon torse massif, confortablement affalé sur mon siège inconfortable, je dois plaquer ma paume sur ma gueule, pour subtilement y cacher dedans le sourire caustique qui présentement se fend d’une oreille à l’autre sur mes lippes. Mes claires prunelles jouent la navette entre Emily, Soraya et l’autre harceleur fanatique aux petits péchés mignons… qui tout compte fait ne renferment rien de mignon. C’est creepy et malsain, comme atelier de bricolage ! C’est limite inquiétant et bon à foutre dans une chambre capitonnée, cette énergumène !

Sous l’assaut des joutes incisives et verbales du lieutenant de police qui cette fois-ci ne s’est pas gênée pour métaphoriquement bien haut dresser en l’air son badge de flic, défendant les droits de l’Humain (de la Femme plus particulièrement), ledit Stefan devient aussi livide qu’un lavabo et se liquéfie littéralement sur place. Ce qui déclenche en moi une quinte de rire tout à fait légitime aux vus des circonstances, mais que je m’efforce d’étouffer au creux de mon poing alors que l’autre connard tente de rectifier le tir et d’arrondir les coins en dressant en désespoir de cause l’étendard du capitalisme émotionnel… pour ensuite OSER s’adresser à moi et me dire de prendre ça cool man et de ne pas être si jaloux ?! Sérieux ?! Naaahhh. Siiii ? Mais nooonnnn ! Siiii ?! Mais nooonnnn ! Siiiiiiii ? Il a osé ? Nooonnn ! Siiiiiiiiiiiii ?

La sensation qui présentement me transcende est indescriptible, mais elle s’apparente à un met indigeste qu’on a fait l’erreur de bouffer et qui là ne passe tout simplement pas. Feeling que je dois fort probablement partager avec la propriétaire de l’Alabama Bar, parce que cette dernière brille par son absence depuis un petit moment déjà et l’écho de baston que nous pouvons inévitablement entendre rebondir depuis les chiottes pour dames en dit long sur ce qui peut bien se tramer là-bas. Hum.  

Sanguin, fiévreux, dents grinçantes telles une craie sur un tableau noir, les azurées rivées sur la tête de con de cet enfoiré d’Albatros, je murmure à l’oreille de Soraya un méprisant :

- Je vous raccompagne chez-vous, ce soir. Sous aucun prétexte, avec ce barge en liberté, vous allez rentrer seules à la maison.

Sur cette sage décision, la propriétaire de l’Alabama Bar nous revient et ses dernières paroles sont pour moi la goutte faisant déborder c’vase déjà à rebord rempli. Comme si mon siège en plastique était soudainement devenu une chaise électrique, poings serrés, la colonne vertébrale tendue comme un « I », je me relève et ronchonne un venimeux :

- HEY, ALBATROS !

Le silence qui déjà planait dans la salle nous retombe dessus avec l’effet d’une douche froide. Rienàfoutre que les témoignages commencent, rienàfoutre que l’on me prenne pour un décérébré de l’asile… j’en suis actuellement un et je l’assume !

- T’aimes ça les collages ?! Et si je te collais mon poing dans la gueule, pour te refaire le portrait à la Picasso, t’aimerai ça aussi ?!

Comme une balle de ping-pong, je pars et m’élance et à la manière d’un joueur de rugby, je me précipite et me plaque tout contre l’Albatros de mes deux qui lui comme un tas de merde se rétame sur le sol et au centre de l’allée de chaises. Même pas le temps de chouiner sa mère, que je suis déjà à califourchon dessus pour me passer les nerfs.

- C’est pas chez les AA que tu devrais être, mais chez les AAA !

Accros Affectifs Anonymes. À noter que je ponctue chaque « A » de mon poing sur sa gueule alors que l’autre est moulé à son col.

Emily et Soraya… c’est sacré.

AA, WHAT SO SERIOUS ? @EMILY REDDICK @DEREK MORROW @SORAYA MCKENZIE

On n’était pas censé être là pour parler de notre souci d’alcoolisme ? On n’était pas là pour écouter les témoignages de ceux qui, comme nous, étaient ivres bien trop souvent ? Parce qu’apparemment, la soirée tournait à un règlement de comptes que nous n’avions pas prévu. Ce type était arrivé dans notre champ de vision, nous emmerdant bien profondément et nous étions maintenant pris dans une joute verbale avec lui.... Je ne me privais pas pour lui dire ce dont je pensais de lui et je ne remarquais qu’à peine que mon amie, Emily, s’était levée alors que Derek et moi tentions de le dégager au plus vite. Ce lourd dingue commençait à avoir raison de notre résolution. Si ça n’était pas déjà assez dur de se retrouver ici, il fallait en plus compter sur le psychopathe complètement boutonneux qui se croyait irrésistible en tant que fan n°1... Non mais j’hallucine là...

« J’ai quand même l’impression que tu violes mon intimité quand tu fais ça et franchement, je suis à deux doigts de porter plainte si tu continues ! »

Il s’était tourné vers Derek en l’appelant « Cool Man » Mauvaise idée, très mauvaise idée si tu veux te prendre un pain dans la tronche Stefan... J’entends un bruit de fond et je sursaute un peu, je tourne la tête vers ce qui doit être les toilettes. Je fronce les sourcils en me demandant ce qu’était ce bruit et j’étais sur le point d’aller voir si mon amie allait bien - je savais déjà que Derek n’allait pas bien avec ce Stefan et en fait, peut-être que je devais rester avec lui pour s’assurer qu’il ne fasse pas une connerie... Ce dernier me murmure d’ailleurs qu’il nous raccompagne ce soir, qu’il ne voulait pas qu’avec ce barge, on se promène seules...

« On est de grandes filles tu sais ! Et puis, tu sais, j’ai une arme et je sais très bien m’en servir ! »

Je rigolais et lui fis un clin d’œil mais sincèrement, je crois que revenir tous les trois, ça nous fera du bien. Je ne disais pas non à une réunion après-réunion entre amis.

« Mais, tu peux venir nous accompagner ! »

J’essayais de détendre un peu l’atmosphère que ce con avait encore plus plombée, si cela avait possible. En fait, oui, c’était possible. Em’ revint jusque à ce moment-là et elle nous annonce qu’elle en peut plus de ce gars et demande ce qui se passe. Parce que oui, depuis quelques secondes, un silence de mort s’est installé, preuve que les premiers témoignages allaient commencer. Je ne compris pas ce qui se passa juste après, Derek eut une espèce de montée d’adrénaline et il cria après notre obsessionnel. Pour une fois qui se la fermait, je roulais des yeux, merde quoi ! On ne pouvait pas écouter les gens tranquillement sans qu’un mec foute le bordel. Ok, c’était mon pote Derek, je l’aimais comme un frère mais là, il exagérait non ? Tout le monde nous regardait à présent et je ne savais plus où me mettre. Ok, je n’avais pas l’habitude de l’être mais là, toutes les têtes s’étaient tournées vers nous, désapprobatrices pour certaines, heureuses pour d’autres qu’il y ait un peu de spectacle. Je sursaute quand Derek plonge sur Albatros et le fout à terre. Il lui promet de lui refaire un portrait style Picasso, l’autre est recroquevillé sur lui-même, il n’ose plus moufter et Derek en rajoute une couche, disant qu’il devrait aller au AAA tout en lui foutant des coups de poings. S’en est trop, bien que Stefan soit un gros con, Derek ne peut pas agir de la sorte, clairement. Je me lève et me rapproche de Derek, je tente de lui faire arrêter son poing mais c’est un coup dans le nez que je me prends.

« PUTAAAAAAAIIIIN ! DEREEEEEK ! STOOOOOP MAINTENANT ! »

Je suis vénère aussi maintenant, je ne crie presque jamais mais là, c’en est trop.

« QUELLE SOIRÉE DE MEEEEERDE ! PUTAIN ! »

Et je me tiens la tête en arrière, espérant que mon nez ne saignera pas trop longtemps. Ma main tente de trouver un mouchoir dans mon sac... Un nez pété à cause d’un con qui fait du collage et un autre qui est trop fier. Je l’adore mon Derek mais il est trop impulsif parfois....

CODAGE PAR AMATIS
AVATARS PAR CRISTALINE & MORRIGAN

Après avoir calmé ses nerfs, Emily Reddick revenait auprès de ses amis. Cette première séance aux AA tournait en eau de boudin. Stefan restait responsable de cette cacophonie. Il provoquait tout le monde. Les premiers témoignages allaient débuter. Emily, qui n'avait pas l'habitude de ces réunions, ne comprenait pas de suite ce qui se tramait donc elle posait la question. Avant, elle exprimait son ras-le-bol concernant Albatros. Elle savait que ses amis partageaient cet énervement. Derek Morrow jouait le grand-frère très protecteur envers les filles. Soraya McKenzie mettait en avant sa position dans la société. Em' ne disait pas grand chose. Elle ne souhaitait pas créer des problèmes, ni envenimer les choses.

Soudainement, Derek changeait d'attitude. Il semblait très tendu et surtout en colère. Il pestait après Stefan. Qu'allait-il faire ? Sa rage grandissait. Il brisait le silence pour s'attaquer à celui qu'il ne pouvait pas supporter et qui avait oser l'appeler « Cool Man ». Morrow n'était plus lui-même. Il devenait provocateur. Il s'élançait sur sa proie comme un animal sauvage pour la jeter au sol et se placer à califourchon sur celle-ci et lui donner des sacrés coups de poing. Tout le monde les regardait. L'ambiance était teintée d'une couleur sombre et lugubre. Soraya tentait d'arrêter son meilleur ami. Elle ne tolérait pas ses agissements. La belle venait de se prendre un coup dans le nez. Elle saignait. Sans plus attendre, Emily qui ne s'affichait pas depuis le début lui tendait un mouchoir. Elle en profitait pour attraper Derek en le portant à l'aide de sa force surhumaine. Elle pouvait le soulever de n'importe quelle manière. Il ne représentait rien en poids pour elle. Em' parlait à voix haute. Elle s'adressait à l'assemblée.

Désolé tout le monde, on sort. Stefan, un conseil, va voir un médecin : Cool Man ne t'a pas raté. A bientôt. La brune invitait So' à aller dehors également. Une fois sortie, Red relâchait son grand ami. La propriétaire de l'Alabama Bar était touchée d'être défendue ainsi et en même temps, elle était énervée car Derek n'avait pas à se mettre en danger à ce point, ni à tabasser gratuitement un citoyen comme lui. M**** Derek, qu'est-ce qui se passe dans ta tête ? Tu as laissé ta colère parler et ce n'était pas beau à voir ! Tu as blessé Soraya ! T'es fou ou quoi ? Elle ne pouvait pas encore le remercier. Il avait mal agi.

Let this be our little secret.

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Tout part en cacahuète ! Si je croyais avoir un parfait contrôle de la situation… bah, royalement ladite situation m’envoie paitre de son gros doigt du milieu et bien haut dressé en l’air. Non seulement je perds le contrôle, mais ça nous chie littéralement à la gueule ! Toujours confortablement avachi à califourchon sur ce crétin d’Albatros, j’ai à peine le temps de voir où ma droite peut bien partir en vrille comme ça, que mes jointures s’abattent et s’impriment sur la truffe de ma pauvre amie. Rouge de colère, bleu de culpabilité et violet de honte, je suis trop sans-dessus dessous pour constater la gravité de la situation, outre peut-être la réplique approximativement parfaite de la truffe de Soraya qui se prend soudain pour La Fontaine de Sang :

- MAIS S’ÉTAIT QUOI L’IDÉE DE TE PLANTER LÀ AUSSI !? BORDEL, SO’ ! que je râle à m’en vomir les poumons, à bout de souffle, le poing en suspend, la face enfarinée du crétin peinant désormais à se faire voir en-dessous de moi qui se passais les nerfs dessus.

Je vous l’ai déjà dit : je suis trop rouge de colère, bleu de culpabilité et violet de honte pour assumer que j’ai merdé. Je préfère et de loin être cet amas de glaise, de boue et de roches qui pernicieusement dégouline et déboule sur la pauvre carcasse frémissante de ce fanatique stalker pour mieux l’ensevelir et l’étouffer au cœur de ma vilenie ! Mais la boule de muscles et de graisse que je peux être n’est absolument pas de calibre pour lutter et résister contre la prise herculéenne d’Emily qui me récolte comme une fleur par la ganse de mon pantalon et attrape mon poing comme une balle de ping-pong. Dans le zèle de ce redressement forcé, j’en profite pour balancer une ultime savate dans les côtes de sa Majesté le Moche et même lui crépiter dessus le plus beau des crachats alors que mes deux amies se traînent et m’entraînent vers la sortie.

Un mioche. Un sale gosse. Un foutu sale gosse qui ne veut pas quitter le parc d’amusement et qui en profite pour brailler :

- C’est pas juste un médecin que tu devrais voir, espèce de malade, mais un psy et j’espère que la facture te sera salée !

Et sur cette belle tombée de rideau, nous quittons cette comédie de l’horreur. Tous les trois déboulés sur la chaussée du parking, je respire comme un taureau écumé, me tortille dans tous les sens praticables pour me répartir de l’étau d’Emily et peu à peu recouvrer mes esprits. L’air frais me fait du bien et j’en avale de généreuse goulée. Groggy, ankylosé, empreint d’une maladresse qui n’a d’égale que tous les efforts que j’ai épuisé pour tabasser le crétin fanatique, c’est là que je constate les dégâts et dommages collatéraux.

- Soraya… je suis désolée. Je---

Mais la réprimande d’Emily me coupe non seulement le souffle, mais toutes paroles, mes azurs jouant frénétiquement la navette entre les deux jolies brunes, l’échine frissonnante d’un orgueil mal placé :

- Tu de fous de moi, Em’ !? C’est cet Albratos le barge qui fait peur à voir et c’est moi qui es fou !? Vous vous foutez de moi toutes les deux ?!

Halluciné, je titube de l’arrière, balaye l’air de ma main.

- La prochaine fois qu’un creep vous harcèle, n’ayez craintes que j’vous laisse vous démerder toutes seules et ravalerai mon élan de preux chevalier servant ! J’aurai de vos nouvelles dans la rubrique nécrologique du journal local de RD et pleurerai votre assassinat sur vos tombes !

J’suis 100% pour le mouvement de la femme moderne, mais mon tempérament protecteur et ma loyauté ont parfois raison de mon jugement…

- J’y crois pas ! C’est vraie de putain de soirée de merde ! Je savais que ça allais être un fiasco cette idée à la noix de AA !

Qu’elles approuvent ou non, ce soir, je me bourre la gueule !