Drôle d'oreiller

14 Février 1870

Deux mois. Cela faisait déjà deux mois que Tallie s'était tranchée la gorge au beau milieu du Harvest. Déjà deux mois qu'elle avait été sacrifiée par Illyria pour plonger le monde dans le chaos. Mais pas que le monde.
Le coeur de notre pauvre petit Kingsteen avait du mal à s'en remettre. Bien souvent, lorsqu'il fermait les yeux, la scène se déroulait en boucle sous ses paupières. La lame tranchant la gorge de la jeune femme, le sang s'écoulant de la blessure, lui ne pouvant rien faire, et le corps encore chaud tombant au beau milieu de l'eau. Il se réveillait en sueur et en hurlant. Mais maintenant que le manoir était bien vide, il n'y avait plus personne pour veiller sur lui.
La seule personne qui avait le droit d'entrer et possédait les clefs du domaine, c'était Mai, sa secrétaire. Il lui faisait assez confiance pour la laisser se balader dans le Manoir sans la surveiller. Mais elle ne venait jamais à l'étage. Alors notre petit prince pouvait crier autant qu'il le voulait, personne ne viendrait le consoler.

Pour tenter d'oublier, Kingsteen se renfermait sur lui même et dans le travail. Il n'était pas rare de le voir en chaussettes, cravate défaite et chemise à moitié ouverte lorsqu'il était seul et sûr de ne pas être dérangé dans la journée. Ses cheveux en bataille et la bouteille de whisky à ses côtés venaient compléter ce tableau du petit Prince devenu Roi sans personne pour l'épauler.
Si dans son coeur tout allait mal, l'entreprise elle se portait bien. Il la dirigeait d'une main de fer mais avec tellement d'humanité et d'empathie pour ses employés que le blason de la maison allait enfin se redorer. De nouveaux contrats commençaient, une nouvelle mine allait bientôt voir le jour. Oui, clairement, l'empire minier de King continuait de s'agrandir. Au déplaisir de son paternel qui devait certainement ruminer une belle vengeance dans son coin.

Après une nuit agitée et blanche, Teeny avait commencé sa journée de travail simplement. Un tour dans les mines et sur le coup de midi il était rentré pour manger. Seul. Cette solitude... lui convenait. Les bruits dans le Manoir ne lui manquait pas. Enfin il tentait de s'en persuader.
Repas engloutit, le petit prince s'était laissé aller sur la bouteille. Trois verres avalés. Si bien que sa tête n'avait pas tardée à tourner à cause du manque de sommeil. Et elle s'était écrasée sur son bureau. Les papiers n'étaient pas forcément très confortables comme oreiller, mais ça lui convenait. De toute façon il était tellement fatigué qu'il ne pouvait pas réagir.
Cheveux en bataille, les trois premiers boutons de sa chemise ouverts, pieds libérés de leurs entraves, cravate trônant sur le bureau tel un serpent prêt à dévorer sa proie, le petit prince faisait peine à voir aujourd'hui. Et pour cause. Qui aimerait passer la saint valentin seul ? Enfin son cerveau n'avait pas fait le lien avec la date. Du moins consciemment. Peut-être que l'apparition des cauchemars dans la nuit étaient une manifestation inconsciente de cette date et pour lui rappeler que oui... il est seul. Mais il ne laissera pas son père lui retrouver une épouse. De toute façon il n'est pas prêt.
Son agenda étant libre pour le reste de l'après-midi, il pouvait dormir tranquillement. Et le léger filet de bave s'échappant lentement au coin de ses lèvres prouvait qu'il venait enfin de trouver le sommeil. Mais pour combien de temps ?

Loukoum

Shine on, diamond. Don't make me wait another day. 'Cause passion is passion. You know it just as well as me. Now, let's stop running from love. Let's stop, my baby. Let's stop running from us. Let's stop, my baby. Oh my, my, my. I die every night with you.

Partagez-moi, les preux. Dites-moi, les valeureux. Ne réfléchissez point de pas à la question et balancez-moi votre opinion ; à la Magie, vous y croyez ?! Bah, moi, dur comme l’air et fier comme je flaire, j’y crois à cette croyance. J’ai foi de boa en la sorcellerie et l’ensorcèlement ! C’est coulé scellé dans le béton depuis le jour où j’ai posé petons en le bedon bien rond de la planète terre ; la magie est occulte, mais présente. Idem comme l’amour rougeoyant de mon majestueux requin blanc ; il occulte tout ceci dans les tréfonds séduisants de sa personnalité, mais je sais qu’il est amoureux fou de moi ! Une fleur m’a confessé le secret et les flores bah ça ne ment point de pas. Il a simplement besoin d’un petit coup de poucettes pour laisser murir tout ceci. Et le petit coup de poucettes, je l’ai trouvé dans les paillettes et ciboulettes de la magie. C’est mademoiselle Azalea et son pouvoir de cupidon-dindon qui m’ont aiguillé-tricoté pour la confection de mon plan infaillible ! Pour faire battre le palpitant d’or de mon majestueux requin blanc, madame Cupidon-Didon m’a conseillé de saupoudrer l’oreiller de mon futur époux de quelques gouttelettes de cette potion magique alias filtre d’amour. Sceptique de chez moustique, pour être persuadé de chez certain, profitant de l’absence de mon futur mari dans la maisonnée, j’ai vidé le flacon en entier et j’ai ai même profité pour vider le fond de la fiole dans la bouteille de fort de mon amant tout tristounet depuis le dernier Harvest. Il est vrai que voir sa promise se tuer dans la flotte mystique et sous nos mirettes éprouvées cela attriste les mœurs. Mais heureusement que je suis toute pimpante et frétillante pour veiller sur lui.

Parce que c’est ce que nous faisons, dans l’amour avec un grand pourtour ! On rend heureux celui qui est malheureux. Cauteleux de chez moustique, je veille sur lui comme une mère grenouille sur ses bébés têtards.

Maintenant je dois me cacher dans le garde-robe, pour attendre l’arrivée/couchée de mon majestueux requin blanc ! J’en ai pour la journée, mais je vais l’attendre. Parce que dans l’amour avec les grands pourtours… c’est ce qu’on fait !

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Violer l’intimité et le palpitant de mon majestueux requin, certain d’entrevous songe que c’est peut-être extrême ; mais moi pas de point alors voilà qui ça !

Les globuleuses mirettes amoureuses observent avec tendresse et pâmoison le corps de velours qui est tout paisible assoupie dans son lit de son alesté royale. Le sourire qui naquit sur mes si jolies lippes est sans égale alors que je sors de ma cachette et vient rejoindre mon futur époux tout doux. J’avais caché tout en-dessous du plumard menotte et ; que j’empresse d’attacher au pied et à la tête du lit… pour ensuite les fixer aux chevilles et poignets de mon futur époux tout doux. J’veux pas le séquestrer…. Juste profiter de l’instant présent sans qu’il ne prenne la poudre d’escampette si jamais le filtre d’amour ne fonctionne pas… toujours guérir avant de prévenir comme on dit ! Les risques considérés et neutralisés, c’est mon long corps tout frémissant qui vient s’étendre et s’allonger à côté de mon tout beau au bois ronflant…

J’aime le regarder dormir ; il a l’air d’un chérubin-dodin et cela me rend d’autant plus gredin ! Sauf que la journée a été épuisante alors bien rapidement les longs bras barbants de Morphée m’interpellent de chez appellent ! Je lutte contre le sommeil quelques instants… mais le combat est trop rude pour moi alors bien soumise et promises… je me love contre le corps musculeux de mon majestueux requin blanc et enfin mes yeux se ferment et vous disent bonne nuit !

Juste une petite sieste de rien du tout.
Une toute petite riquiquitte…. Pour recharger mes batteries….
Je suis siiiiii épuisé et Kiki est si apaisant !

Drôle d'oreiller

14 Février 1870

Mais c'est pas vrai.

Kingsteen remu lentement la tête en entendant la voix si familière de sa secrétaire. Mais il ne bouge pas plus. Fermant simplement la bouche. Poussant un soupir de découragement, May attrapa la cravate qui trônait sur le bureau, attrapa le mouchoir dans la poche du petit prince et lui essuya le bord des lèvres, faisant remuer un peu plus King qui relève lentement la tête.

Monsieur Kingsteen, ce n'est pas une tenue. Regardez vos papiers.

Teeny marmonne et frotte ses yeux avant d'observer le papier sur lequel il était allongé. Une belle auréole de bave avait fait son apparition. Mais tant pis. Ses yeux à moitié fermés, il tourna la tête vers la jeune femme et bailla sans prendre la peine de mettre sa main devant sa bouche.

Vous n'avez aucun rendez-vous. Si vous êtes fatigués, allez donc vous coucher. Je fermerai en partant.

Bien. Merci May.

Le petit prince se leva, tituba et fut rattrapé de justesse par sa secrétaire. Cette dernière lui mit la cravate dans la main et l'accompagna jusqu'au majestueux escaliers de marbre qui menait à l'étage. Kingsteen lui fit signe de la tête pour lui signifier qu'il s'en sortirait tout seul. Et il grimpa donc les nombreuses marches en s'agrippant fortement à la barrière, sous le regard de May qui vérifia qu'il arriva bien jusqu'en haut.
Prenant la direction de sa chambre, le petit prince avait perdu sa cravate en cours de route mais il n'eut pas le courage de la récupérer. Après un tour dans la salle de bain pour rendre le contenu de tout ce qu'il avait avalé, il prit une nouvelle gorgée de la bouteille qui traînait dans sa chambre et après s'être défait de ses chaussures il se laissa tomber dans son lit en poussant un soupir de satisfaction. Il y avait une délicate odeur, différente de d'habitude. Est-ce que May avait demandé à la femme de ménage de laver les draps ? Bonne question. Mais l'odeur était vraiment très douce et le fit sombrer avec un fin sourire étirant ses lèvres.

Quelle heure est-il quand Kingsteen se décide à rouvrir les yeux ? Il ne sait pas trop. Mais le rideau qu'il n'a pas fermé montre que lentement le soleil est entrain de se coucher et bientôt la pénombre fera totalement son apparition.
Se sentant dans une situation fort inconfortable, le petit prince tenta de bouger pour se mettre en position foetus comme il avait l'habitude mais... ses bras tout comme ses jambes se retrouvèrent bloqués par... quoi ? Il n'en savait rien. Mais ça lui permis de se réveiller rapidement. Et de remarquer le corps se trouvant à moitié sur le sien.
S'il l'avait reconnu ? Bien sur que non ! Et il flippait totalement. Bougeant à plusieurs reprise son épaule pour tenter de réveiller la personne posée sur lui, la panique s'emparait doucement de son esprit. Surtout qu'il était encore légèrement sous l'effet de l'alcool.
Est-ce qu'il devait ouvrir un portail pour faire tomber cette personne ? Il n'avait jamais essayé au travers de son lit. Donc c'était dangereux... Et puis impossible de se débarrasser de ces maudites menottes ! Mais merde, c'était quoi ce bordel ! Si c'était une blague, elle n'était pas drôle, mais alors pas du tout ! Cet individu avait intérêt à courir vite une fois qu'il serait libre de ses liens, parce qu'il allait regretté d'avoir attaché ainsi notre petit prince. Et encore... courir vite... plutôt le don de devenir invisible. Sinon King le ferait disparaître dans un portail.

Loukoum